Histoire de la Bretagne ancienne et moderne
impossible.
Westermann, profitant de la division des
blancs, reparaît dans le Bocage, où il met tout à feu et à
sang ; le 10 octobre, au même moment, Carrier entrait à
Nantes. – À Cholet, les Vendéens réunis tentent un dernier et
sublime effort le 11 octobre ; mis en déroute complète, ils
ont la douleur de voir mortellement blessés d’Elbée et Bonchamps.
Trop tard, le conseil de passer la Loire, donné par ce dernier, est
compris. « Ainsi, dit Kléber, se termina cette sanglante et
mémorable journée. L’ennemi perdit douze pièces de canon. Jamais il
n’avait donné un combat si opiniâtre, si bien ordonné, mais qui lui
fût en même temps si funeste. Les rebelles combattaient comme des
tigres, et nos soldats comme des lions. » La nuit de cette
journée désastreuse, Lescure, Bonchamps et d’Elbée, tous trois
mourants de leurs blessures, se rencontrèrent à Beaupréau pour se
dire l’éternel adieu. L’armée royaliste s’achemina vers la Loire, à
la hauteur de Saint-Florent, suivie de près de cent mille paysans
de tout âge et de tout sexe, qui, chassés par le fer et le feu
républicain, n’avaient plus d’autre asile que le fleuve ou la mort.
On arriva ainsi, le 18, au bord de la Loire. Il était temps !
Rentré à Cholet, Carrier avait fait mettre la ville à feu et à
sang ; et Westermann accourait en toute hâte pour sabrer ou
noyer les derniers débris de l’armée vendéenne ; mais ses
troupes, harassées, tombant sur la route, il leur donna quatre à
cinq heures de repos. Ce fut là le salut des derniers blancs, Qu’on
se figure, s’il est possible, le navrant tableau du passage de la
Loire par ces milliers de malheureux, et dans des barques en
mauvais état. Bonchamps allait expirer, mais comme il avait vécu,
en héros chrétien, et en léguant à la postérité le souvenir d’un
des plus beaux traits que contienne l’histoire des peuples.
Cinq mille prisonniers républicains, des plus
féroces et des plus exécrés, venaient d’arriver de Cholet à
Saint-Florent ; une voix unanime réclame leur mort. Déjà les
canons sont braqués sur l’église qui les renferme ; Bonchamps
se relève sur sa couche de douleur, aux cris de : « Mort
aux républicains ! » et il dit cette sublime
parole : « Grâce aux prisonniers !… Que je ne meure
pas sans être assuré de leur vie ! » Bonchamps meurt le
sourire aux lèvres, car sa voix a été entendue, et la Vendée, riche
de tant de nobles actions, pourra encore se parer de celle-là (18
octobre 1793).
Puis le passage de la Loire s’effectua avec
tant de bonheur, qu’on n’eut à regretter que la perte d’un
homme : grâce aux soins et à l’intrépidité du prince de
Talmont, les canons mêmes et les bagages, tout le matériel enfin,
furent sauvés ; et quand Westermann arriva aux bords du
fleuve, tous les blancs étaient sur la rive opposée, où il ne put
les poursuivre, les Vendéens ayant brûlé après eux tous les moyens
de transport. Cependant l’armée royaliste, qui n’avait plus de chef
(on ne savait où d’Elbée était allé mourir), élut à l’unanimité
Henri de La Rochejacquelein généralissime ; il avait à peine
vingt-un ans. Conduite par lui, l’armée ne pouvait qu’aller en
avant : les cinquante mille soldats qui la composaient encore
prirent la route de Laval.
Des chefs qui n’étaient point à la bataille de
Cholet, et qui se trouvèrent isolés sur la rive gauche que venait
de quitter La Rochejacquelein, les uns déposèrent les armes, en
attendant l’occasion de les reprendre ; les autres
continuèrent la guerre de clocher contre les détachements
républicains. Charette occupa l’île de Noirmoutiers, qu’il offrit
pour asile à d’Elbée mourant. Charette continua ensuite à prouver à
la Convention que la Vendée n’était rien moins que soumise. Merlin
(de Thionville) proposa alors de nommer cette terre le
Département vengé,
de la partager à de pauvres
sans-culottes, à condition qu’ils en détruiraient en six mois tous
les bois et toutes les clôtures. Fayau, plus expéditif, fut mieux
écouté. « Je pense, écrivit-il, qu’il faut envoyer en Vendée
une armée
incendiaire,
pourque, pendant un an au moins,
nul homme, nul animal ne puisse trouver de subsistance sur ce sol
ennemi. » Barrère avait déjà dit : « Il faut désoler
jusqu’à la patience des Vendéens ! »
C’est une honte éternelle pour la république,
qu’elle
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