Histoire de la Bretagne ancienne et moderne
Galeran, Nicolas et Jean de Guistry. Geoffroy
Duplessis-Balisson donna ses biens et son nom au collège Duplessis,
où il établit quarante boursiers et un principal. Guillaume de
Coatmohan créa celui de Tréguier, devenu plus tard le
collège
royal de France.
Le duc Jean III ne voulut pas rester
inactif spectateur de ce mouvement si remarquable des
esprits ; il résolut de fixer les diverses juridictions qui
tendaient à s’envahir réciproquement, et de déterminer, pour le
bonheur et la tranquillité de son peuple, les bases d’une
administration constante et surtout équitable. Il convoqua
successivement à cet effet trois parlements : à Rennes, à
Ploërmel et à Quimperlé. Malheureusement il ne put mettre la
dernière main à ces importantes et si utiles réformes. Philippe de
Valois venait d’inciter les grands vassaux de la couronne à
l’accompagner dans une expédition contre les Flamands rebelles à
Louis, leur comte. Les ducs de Bretagne, de Bourgogne et de
Lorraine, le roi de Navarre, les comtes d’Alençon, de Bar, de
Boulogne et de Savoie se trouvèrent au rendez-vous ;
Jean III y était venu avec quinze bannières de chevaliers et
dix mille fantassins.
Les Flamands furent écrasés à Cassel ;
mais plusieurs des princes alliés de Philippe de Valois furent
gravement blessés. On comptait parmi eux Jean III, qui, après
s’être fait transporter à Saint-Omer, y congédia la plupart de ses
gens. À peine convalescent, il s’achemina vers Paris, et le roi de
France lui exprima en termes chaleureux sa gratitude pour les
services qu’il venait d’en recevoir. Mais un des intimes
conseillers de Jean lui fit entendre que, s’il s’était conduit en
bon parent, comme son prédécesseur, en participant sans
rémunération à des entreprises aussi coûteuses, on avait à craindre
de la part des monarques français l’habitude d’appeler dorénavant
ses successeurs sous la bannière royale comme devoir de vasselage.
Jean jugea donc convenable d’avoir une explication avec
Philippe.
« Jamais duc n’aura regret de m’avoir
fait service, lui répondit le monarque ; je déclare hautement,
et devant tous, que je ne dois celui de mon cousin de Bretagne qu’à
son plein gré, mû par la proximité du sang. Pareil fait ne saurait
tirer à conséquence pour ses successeurs, et grâce d’amitié ne
dégénérera point en dette de service ou obligation. C’est bien le
moins que je lui doive. »
Philippe lui écrivit ensuite une lettre (3
novembre 1328), qui déclarait expressément que les ducs de Bretagne
n’avaient suivi les rois en Flandre que par
pure
courtoisie
et
libéralité.
Jean III perdit, peu après, sa troisième
femme, fille unique du comte de Savoie et de Blanche de Bourgogne.
La mort de ce comte éveilla un instant l’ambition du duc de
Bretagne ; il réclama la souveraineté de la Savoie au nom de
la duchesse, s’unit à Guigues, dauphin de Viennois, et les deux
princes se promirent le loyal partage de leurs conquêtes. Mais
bientôt, cédant aux judicieuses observations que lui présentèrent
les états de Savoie, il conclut un traité de paix.
Cependant la mort dévastait la famille
souveraine de Bretagne ; elle frappa Gui de Penthièvre, frère
puîné de Jean III, et le comte de Richemont, son oncle. Il ne
resta de la nombreuse postérité d’Arthur II qu’une fille de
Gui de Penthièvre, encore dans l’enfance, et le fils de la comtesse
de Montfort, frère consanguin de Jean III, qui avait essayé de
contester sa légitimité.
Jean n’avait jamais eu d’enfants, et il
haïssait trop Yolande sa belle-mère pour appeler un de ses enfants
à sa succession. Ce sentiment funeste lui fit déshériter Jean de
Montfort, pour donner sa fille, et avec elle son duché, à Charles
de Blois, comme nous l’avons dit plus haut. Il ne s’attendait
certes pas à tous les malheurs qu’un pareil choix allait attirer
sur le pays qu’il aimait avec une si grande affection. Il expira le
30 avril 1341, et avec lui s’évanouit pour longtemps le bonheur de
la Bretagne. Sa mort devint le signal de la guerre civile, du
pillage, de l’incendie et du meurtre. Jean III possédait des
vertus rares : il était charitable, loyal, équitable,
craignant Dieu, aimant le peuple, qui le lui rendait bien et ne le
nommait que
le bon duc.
CHAPITRE VII
Jean de Montfort et Charles de Blois. – Leur lutte. –
La comtesse de Montfort.
(1341 – 1346)
Jean de Montfort, dans
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