Histoire de la Bretagne ancienne et moderne
capacité pour les grains, d’un
seul poids pour tous les objets livrés à la balance.
Il déclara que désormais les faux témoins
auraient une oreille coupée, que leurs biens meubles seraient
confisqués et leurs personnes vouées à l’infamie. Il rendit enfin
des ordonnances ayant pour but d’abréger les procès et de mettre
des limites à l’avidité des hommes de loi.
Le roi d’Angleterre, en refusant au duc de
Bretagne la liberté de son frère, Arthur, comte de Richemont, fait
prisonnier à la bataille d’Azincourt, qu’il lui avait demandée
plusieurs fois, avait confié Arthur au comte de Suffolk, qui
commandait ses armées en Normandie, et n’en avait exigé que sa
parole de ne pas quitter le général anglais. Les principaux barons
de Jean allèrent le voir à Pontorson, et lui proposèrent de
l’enlever les armes à la main. Arthur leur répondit qu’il avait
engagé sa parole, et qu’il aimerait mieux mourir que d’y manquer.
Le roi d’Angleterre lui sut gré de cette générosité, et la belle
conduite d’Arthur lui fit penser à contracter alliance avec son
frère, le duc de Bretagne. Jean V, qui venait d’avoir la
certitude que le dauphin, quoique son allié, avait trempé dans
l’infâme complot des Penthièvre contre sa vie, n’hésita pas
longtemps à se rendre aux instances de l’envoyé anglais.
Henri V, roi d’Angleterre et un moment de France, ayant suivi
de près au tombeau l’infortuné Charles VI, Arthur se déclara
dégagé de sa parole et revint en Bretagne. Peu de temps après, il
épousa à Amiens Marguerite de Bourgogne, veuve du duc de Guyenne,
fils de France.
Cependant Charles VII, dans le dessein de
détacher le duc de Bretagne du parti des Anglais, lui envoya
plusieurs ambassades. Les états assemblés résolurent que le comte
de Richemont se rendrait à la cour du roi de France pour travailler
à un traité de paix avec le duc de Bourgogne, qui soutenait
toujours le parti du roi d’Angleterre, quoique faiblement. Le comte
partit, et arriva à Angers, où le monarque français l’attendait. Ce
prince commença par lui offrir la charge de connétable, qui était
vacante. Le comte, sensible à l’honneur qu’on lui faisait, répondit
qu’il ne pouvait l’accepter sans avoir auparavant consulté le duc
son frère et le duc de Bourgogne. Sans différer, il alla trouver ce
dernier. Las de l’alliance des Anglais, ce prince ne cherchait que
des prétextes honnêtes pour rompre de funestes engagements, que le
juste ressentiment du meurtre de son père lui avait fait
contracter. Mais, pour préliminaire, il exigeait que ceux qui
avaient conseillé ce meurtre fussent chassés de la cour du roi.
Jean V demandait la même chose, parce que ces mêmes personnes,
à ce qu’il croyait, avaient conseillé la trahison des
Penthièvre ; ces reproches regardaient surtout Tanneguy du
Chastel et le président de Provence. Le premier, quoique se disant
innocent quant à la prise du duc de Bretagne et à la mort de Jean
Sans-Peur, consentit à se retirer ; mais le président, qui
voulait gouverner le roi et le royaume, rejeta cette
condition ; en sorte que la négociation fut inutile, et que le
comte de Richemont s’en retourna sans avoir pu rien conclure.
Il se rendit à Chinon, où était le roi. Ce
prince lui donna alors l’épée de connétable, après lui avoir promis
avec serment de chasser du royaume tous ceux qui avaient trempé
dans le meurtre de Jean Sans-Peur et ceux qui avaient conseillé la
prise du duc son frère. Le connétable partit ensuite pour la
Bretagne, dans le dessein d’y lever des troupes et de revenir
bientôt pour faire tête aux Anglais qui ravageaient la France.
Cependant Charles VII, ne pouvant se résoudre à exécuter ce
qu’il avait promis à Richemont, appréhendait fort son retour ;
il se vit enfin dans la nécessité de tenir sa parole. Tanneguy du
Chastel se comporta en homme qui n’a rien à se reprocher,
sacrifiant ses intérêts au bien de la France. Il fit plus :
avant de se retirer il aida à chasser tous les autres. Quant au
président de Provence, il alla se renfermer dans Avignon
(1425).
Le duc de Bretagne, peu de temps après, se
rendit à Saumur, où Charles VII lui avait donné rendez-vous.
Le roi de France accueillit avec beaucoup d’amitié Jean V, et
lui dit qu’il voulait à l’avenir se conduire par ses conseils et se
confier entièrement à lui. Jean, parlant au monarque avec
franchise, lui
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