Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
une chapelle du Soleil. L’heureux paysan avait contracté
dès l’enfance les sentiments d’une dévotion particulière pour le dieu du
jour ; et à chaque pas qu’il fit vers le trône, à chaque victoire, qui
signala son règne, la reconnaissance vint abouter à la superstition [998] .
    Ses armes avaient abattu les ennemis étrangers et
domestiques de l’empire. On prétend que sa rigueur salutaire étouffa, dans
toute l’étendue de l’univers romain [Vopiscus, H. Aug. ] , les
crimes, les factions, l’esprit de révolte, les complots pernicieux, et les maux
qu’entraîne un gouvernement faible et oppressif. Mais si nous songeons combien
la corruption augmente rapidement et se guérit avec peine, si nous nous
rappelons que les années de désordres publics surpassèrent en nombre les mois
du règne guerrier d’Aurélien, nous ne pourrons nous persuader que dans quelques
intervalles d’une paix souvent interrompue, il ait été possible à cet empereur
d’exécuter un plan si difficile de réforme. Ses efforts même pour rétablir la
pureté de la monnaie excitèrent un soulèvement dangereux. Ce prince se plaint
de ces troubles dans une lettre particulière. Sûrement , dit-il, les
dieux m’ont destiné à vivre dans un état de guerre perpétuel. Une sédition
vient d’allumer la guerre civile au milieu de ma capitale. Les ouvriers de la
monnaie se sont révoltés à l’instigation de Felicissimus, esclave auquel
j’avais donné un emploi dans les finances. La sédition est éteinte ; mais
elle m’a coûté sept mille soldats, l’élite de ces troupes qui campent dans la
Dacie et sur les bords du Danube [999] .
D’autres écrivains, qui parlent du même événement, le placent fort peu de temps
après le triomphe de l’empereur ; ils ajoutent que le combat décisif fut
livré sur le mont Célien ; que les ouvriers avaient altéré la monnaie ;
et que, pour rétablir le crédit public, Aurélien donna de bonnes espèces en
échange pour de mauvaises, que le peuple eut ordre de rapporter au trésor [1000] .
    Si l’on voulait approfondir un événement si extraordinaire,
on verrait combien, de la manière dont il est présenté, les circonstances en
sont incompatibles l’une avec l’autre, et dénuées de vraisemblance.
L’altération de la monnaie s’accorde très bien, à la vérité, avec
l’administration de Gallien ; et, selon toutes les apparences, ceux qui avaient
été employés à cette pratique odieuse redoutèrent la justice sévère d’Aurélien.
Mais le crime, aussi bien que le profit, ne devait concerner qu’un petit nombre
de personnes ; et il est difficile de concevoir comment de pareils coupables
ont pu armer un peuple qu’ils trompaient si indignement, contre un prince
qu’ils trahissaient. On croirait plutôt qu’ils auraient partagé la haine
publique avec les délateurs et les autres ministres de l’oppression. Il semble
que la réformation des espèces ne devait pas être moins agréable au peuple que
la destruction de plusieurs anciens comptes brûlés par ordre de l’empereur dans
la place de Trajan [1001] .
Dans un siècle où les principes du commerce étaient à peine connus, on ne
parvenait peut-être au but le plus désirable qu’en usant de rigueur, et en
employant dés voies peu judicieuses. Mais de pareils moyens, dont l’impression
ne saurait subsister longtemps, ne sont pas capables d’exciter ni d’entretenir
le feu d’une guerre dangereuse. Quelquefois le redoublement d’impôts onéreux
établis sur les terres et sur les nécessités de la vie, provoque enfin à la
révolte ceux qui se trouvent forcés à rester dans leur patrie, ou qui ne
peuvent se résoudre à l’abandonner.  Il en est tout autrement d’une opération
qui, par quelque expédient que ce soit, rétablit la juste valeur de la monnaie.
Le bénéfice permanent efface bientôt le mal passager. La perte se partage entre
une grande multitude, et s’il est un petit nombre d’individus opulents dont la
fortune éprouve une diminution sensible, ils perdent avec leurs richesses
l’influence qu’elles leur procuraient. A quelque point qu’Aurélien ait voulu
déguiser la cause réelle de la révolte, la réformation de la monnaie n’a pu
être qu’un faible prétexte saisi par un parti mécontent et déjà puissant. Rome,
quoique privée de liberté, était en proie aux factions. Le peuple, pour lequel
l’empereur, né lui-même plébéien, montrait toujours une

Weitere Kostenlose Bücher