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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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eut quelques rapports avec l’empereur Aurélien.
Lorsque le fondateur de Rome disparut, le trône resta vacant pendant douze
mois, jusqu’à l’élection d’un philosophe sabin, et la tranquillité générale se
maintint de la même manière par l’union des différents ordres de l’État ;
mais du temps de Numa et de Romulus, l’autorité des patriciens contenait les
armes du peuple, et l’équilibre de la liberté se conservait aisément dans un
État vertueux et borné [1011] .
Rome, bien différente de ce qu’elle avait été dans son enfance, commençait à
pencher vers sa ruine ; tout semblait alors annoncer un interrègne orageux
: la vaste étendue de l’empire, une capitale immense et tumultueuse, l’égalité
servile du despotisme, une armée de quatre cent mille mercenaires, enfin
l’expérience des révolutions fréquentes qui avaient déjà ébranlé la
constitution. Cependant, malgré tant de causes de désordre, la mémoire
d’Aurélien, sa discipline rigide, réprimèrent l’esprit séditieux des troupes
aussi bien que la fatale ambition de leurs chefs. L’élite des légions resta
campée sur les  rives du Bosphore, et le drapeau impérial imprima du respect
aux camps moins formidables de Rome et des provinces. Un enthousiasme généreux,
quoique momentané, semblait animer l’ordre militaire. Il faut croire qu’un
petit nombre de zélés patriotes entretinrent la nouvelle amitié du sénat et de
l’armée, comme le seul moyen de rétablir la vigueur du gouvernement et de
rendre à la république son ancienne splendeur.
    Le 25 septembre, huit mois environ après la mort d’Aurélien,
le consul convoqua les sénateurs et leur exposa la situation incertaine et
dangereuse de l’empire. Après avoir insinué légèrement que la fidélité précaire
des légions dépendait d’un seul instant, du moindre accident, il peignit, avec
l’éloquence la plus persuasive, les périls sans nombre qui suivraient un plus
long délai pour le choix d’un empereur. On avait appris, disait-il, que les
Germains avaient depuis peu passé le Rhin ; qu’ils s’étaient emparés des
villes les plus opulentes et les plus fortes de la Gaule. L’ambition du roi de
Perse tenait tout l’Orient dans de perpétuelles alarmes. L’Égypte, l’Afrique et
l’Illyrie, se voyaient exposées aux armes des ennemis étrangers et
domestiques ; et les inconstants Syriens étaient toujours prêts à préférer
même le sceptre d’une femme à la sainteté des lois romaines. Le consul
s’adressant alors à Tacite, le premier des sénateurs [1012] , lui demanda
son avis sur le choix important d’un nouveau candidat à la dignité impériale.
    Si le mérite personnel peut nous paraître au-dessus d’une
grandeur empruntée, l’extraction de Tacite doit être à nos yeux plus
véritablement noble que celle des souverains ; il descendait de
l’historien philosophe dont les écrits immortels éclaireront la postérité la
plus reculée [1013] .
Le sénateur Tacite était alors âgé de soixante-quinze ans [1014] . Les richesses
et les honneurs avaient embelli le cours de sa vie innocente ; il avait
été revêtu deux fois de la dignité consulaire [1015] . Possesseur
d’un patrimoine de deux ou trois millions sterling, il vivait honorablement et
sans faste [1016] .
L’expérience qu’il avait acquise sous tant de princes dont il avait estimé ou
supporté la conduite, depuis les ridicules folies d’Héliogabale, jusqu’à la
rigueur utile d’Aurélien, lui avait appris à se former une juste idée des
devoirs, des dangers et des piéges qui environnaient un rang si élevé. Une
étude assidue des immortels ouvrages de son aïeul, lui avait donné les notions
les plus parfaites sur la nature humaine [1017] ,
et sur la constitution de l’État. La voix du peuple avait déjà nommé Tacite
comme le plus digne de l’empire. Loin d’être flatté de ces bruits, il n’en fut
pas plus tôt informé, qu’il se retira dans une de ses maisons de plaisance en
Campanie. Il goûtait, depuis deux mois, à Bayes, les douceurs d’une vie
tranquille, lorsqu’il se trouva forcé d’obéir au consul, qui lui ordonnait de
reprendre la place honorable qu’il occupait dans le sénat, et d’assister la
république de ses conseils.
    Dès qu’il se leva pour parler, toute l’assemblée salua des
noms d’Auguste et d’empereur. Tacite empereur, Auguste, les dieux te
préservent ; nous te choisissons pour notre

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