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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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nous avons coutume de rapporter au système féodal, paraissent
venir originairement des Barbares celtes. Lorsque César subjugua les Gaulois,
cette grande nation se trouvait déjà divisée en trois ordres : le clergé,
la noblesse et le peuple. Le premier gouvernait par la superstition ; le
second, par les armes ; le troisième, entièrement oublié, n’avait aucune
influence dans les conseils publics. Des plébéiens, accablés de dettes ou
exposés à des injures continuelles, devaient naturellement implorer la
protection de quelque chef puissant qui disposât de leurs personnes et de leurs
propriétés avec une autorité semblable à celle que, parmi les Grecs et  les
Romains, un maître exerçait sur ses esclaves [1129] . La plus grande
partie de la nation, insensiblement réduite en esclavage, et condamnée à des
travaux perpétuels dans les terres des nobles, éprouva la servitude de la
glèbe, et gémit sous le poids réel des chaînes ou sous le joug puissant et non
moins cruel des lois. Durant les troubles qui agitèrent la Gaule depuis le
règne de Gallien, jusqu’à celui de Dioclétien, la condition de ces paysans
esclaves avait été singulièrement misérable ; ils subirent à la fois la
tyrannie de leurs maîtres, celle des Barbares, des soldats et des officiers du
fisc [1130] .
    Ces vexations les jetèrent enfin dans le désespoir. De tous
cotés ils s’élevèrent en foule, armés des instruments de leurs professions, et
guidés par une fureur capable de tout renverser. Le laboureur devint un
fantassin. Les bergers montèrent à cheval. Les villages abandonnés, les villes
ouvertes, furent livrés aux flammes, et les paysans commirent autant de ravages
que le plus terrible ennemi [1131] .
Ils réclamaient les droits naturels de l’homme, mais ils réclamaient ces droits
avec la cruauté la plus farouche. Les nobles Gaulois, redoutant à juste titre
leur vengeance, cherchèrent un abri dans les villes fortifiées, ou
s’éloignèrent d’un pays devenu le théâtre de l’anarchie. Les paysans régnèrent
sans obstacle. Deux de leurs chefs eurent même la folie, et la témérité de
prendre les ornements impériaux [1132] .
Leur puissance expira bientôt à l’approche des légions. La force unie à la
discipline obtint une victoire facile sur une multitude confuse et licencieuse [Eutrope,
IX, 20] .
    On punit sévèrement les paysans qui furent trouvés les armes
à la main. Les autres, effrayés, retournèrent à leurs habitations, et leurs
efforts inutiles pour la liberté, ne servirent qu’à appesantir leurs chaînes.
Le cours des passions populaires est si impétueux et en même temps si uniforme,
que, malgré la disette des matériaux, nous aurions pu décrire les
particularités de cette guerre. Mais nous ne sommes pas disposé à croire que
les principaux chefs de la révolte, Ælianus et Amandus, aient été chrétiens [1133] , ni que leur
rébellion, ainsi qu’il arriva du temps de Luther, ait été occasionnée par
l’abus des principes bienfaisants du christianisme, qui tendent à établir la
liberté naturelle de l’homme.
    Maximien n’eut pas plus tôt arraché la Gaule aux paysans de
cette province, que l’usurpation de Carausius lui enleva la Bretagne. Depuis
l’heureuse témérité des Francs sous le règne de Probus, leurs hardis
compatriotes avaient construit de légers brigantins, et ravageaient
continuellement les contrées voisines baignées par l’Océan [1134] . Pour repousser
leurs incursions, il parut nécessaire de créer une marine ; ce sage projet fut
exécuté avec vigueur et avec prudence. L’empereur fit équiper une flotte à
Gessoriacum ou Boulogne, située sur le détroit qui sépare la Gaule de la
Bretagne. Il en confia le commandement, à Carausius, Ménapien [1135] de la plus
basse origine [1136] qui avait longtemps signalé son habileté comme pilote, et son courage comme
soldat. L’intégrité du nouvel amiral ne répondit pas à ses talents. Lorsque les
pirates de la Germante sortaient de leurs ports, il favorisait leur passage,
mais il avait souci d’intercepter leur retour, dans la vue de s’approprier une
partie considérable des dépouillés qu’ils avaient enlevées. Les richesses que
Carausius amassa par ce moyen parurent avec raison, la preuve de son crime.
Déjà Maximien avait ordonné sa mort. Le rusé Ménapien avait prévu
l’orage ; il sut se dérober à la sévérité de son maître. Les officiers de
la flotte,

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