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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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séduits par la libéralité de leur commandant lui étaient entièrement
dévoués. S’étant assuré, des Barbares, il partit de Boulogne pour se rendre en
Bretagne, gagna la légion et les auxiliaires qui défendaient l’île ; et,
prenant audacieusement avec la pourpre impériale le titre d’Auguste, il défia
la justice et les armes de son souverain irrité [1137] .
    Lorsque la Bretagne eu été démembrée de l’empire, son
importance fut plus vivement sentie, et sa perte sincèrement déplorée. Les
Romains célébrèrent et exagérèrent peut-être l’étendue de cette île
florissante, pourvue de tous côtés de ports commodes, la température du climat
et la fertilité du sol, également propre à produire du blé ou du vin, les
minéraux précieux dont le pays est rempli, ses riches pâturages couverts de
troupeaux innombrables, et ses bois où l’on n’avait point à redouter la bête
sauvage ni le serpent venimeux. Ils regrettaient surtout le revenu considérable
de la Bretagne, et ils avouaient cependant qu’une pareille province méritait
bien de devenir le siège d’un royaume indépendant [1138] . Elle fut,
pendant sept ans, entre les mains de Carausius ; et, pendant sept ans la
fortune favorisa une rébellion, soutenue par le courage et par l’habileté. Le
souverain de la Bretagne défendit les frontières de ses domaines contre les
Calédoniens du nord ; il attira du continent un grand nombre d’excellents
artistes. Plusieurs médailles, qui nous sont parvenues, attestent encore son
goût et ‘opulence. Né sur les confins de la patrie des Francs, il rechercha
l’amitié de ce peuple formidable, en imitant leur habilement et leurs manières
: il enrôla les plus braves de leur jeunesse dans ses troupes de terre et de
mer ; et, pour reconnaître les services que lui procurait une alliance si
utile, il leur enseigna la science dangereuse de l’art militaire et de la
navigation. Carausius resta toujours en possession de Boulogne et de son
territoire.  Ses flottes triomphantes couvraient le détroit, commandaient les
bouches du Rhin et de la Seine, ravageaient les côtes de l’Océan, et
répandaient la terreur de son nom au-delà des colonnes d’Hercule. Sous son
administration, la Bretagne, destinée à posséder l’empire des mers, avait déjà
pris son rang naturel de puissance maritime, qui devait un jour la rendre si
respectable [1139] .
    En s’emparant de la flotte de Boulogne, Carausius avait
enlevé à l’empereur les moyens de le poursuivre et de se venger. Lorsque après
un temps considérable et des travaux immenses, on mit en mer une nouvelle
flotte [1140] ,
les troupes impériales, qui n’avaient jamais porté les armes sur cet élément,
furent bientôt défaites par les matelots expérimentés de l’usurpateur. Cet
effort inutile amena un traité de paix. Dioclétien et son collègue, qui
redoutaient avec raison, l’esprit entreprenant de Carausius, lui cédèrent la
souveraineté de la Bretagne, et admirent, quoique avec répugnance, un sujet
rebelle aux honneurs de la pourpre [1141] .
Mais l’adoption des Césars rendit une nouvelle vigueur aux armes romaines.
Tandis que Maximien assurait par sa présence les frontières du Rhin, son brave
associé Constance prit la conduite de la guerre de Bretagne. Sa première
entreprise fut le siège de l’importante place de Boulogne. Un môle d’une
prodigieuse grandeur, construit à l’entrée du port, ôta à la ville tout espoir
de secours. Elle se rendit après une résistance opiniâtre, et la plupart des
vaisseaux de Carausius tombèrent entre les mains des assiégeants. Constance se
disposa ensuite à la conquête de la Bretagne [en 292] . Pendant les trois
années qui furent employées à la construction d’une flotte, il s’assura des
côtes de la Gaule, envahit le pays des Francs, et priva l’usurpateur de
l’assistance de ces puissants alliés.
    Les préparatifs n’étaient point encore terminés, lorsque
Constance apprit la mort du tyran [en 294] . Cet événement parut un
présage certain des victoires du César. Les sujets de Carausius imitèrent
l’exemple de trahison qu’il avait donné ; il fut tué par Allectus, son
premier ministre, qui hérita de sa puissance et de ses dangers. Mais l’assassin
n’avait pas assez de talents pour exercer l’autorité souveraine ni pour la
défendre. Il vit avec effroi sur le continent la rive opposée déjà couverte d’armes,
de troupes et de

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