Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
permettaient souvent de troubler le service de
l’assemblée, enfin, entraînés par l’orgueil ou par un faux zèle, ils
introduisirent particulièrement dans l’Église apostolique de Corinthe, une
foule de désordres funestes [1458] .
Comme l’institution des prophètes devenait inutile, et même pernicieuse, leurs
pouvoirs leur furent retirés et leur office fut aboli. On ne confia les
fonctions publiques de la religion qu’aux ministres établis de l’Église, les évêques et les prêtres : dénominations, qui dans leur première origine,
paraissent avoir désigné la même dignité et le même ordre de personnes [1459] . Le nom de prêtre exprimait leur âge, ou plutôt leur gravité et leur sagesse ; le titre d’ évêque marquait leur inspection sur la foi et sur les mœurs des chrétiens commis à
leurs soins paternels. Dans le premier âge du christianisme, ces prêtres
épiscopaux , dont le nombre était plus ou moins grand en proportion du
nombre respectif des fidèles, gouvernaient chaque congrégation d’un commun
accord et avec la même autorité [1460] .
Mais la plus parfaite égalité de liberté exige la main d’un
magistrat supérieur, qui la maintienne, et l’ordre nécessaire dans les
délibérations publiques crée bientôt un président, qui est au moins chargé de
recueillir les voix de l’assemblée, et d’en exécuter les résolutions. Les
premiers chrétiens persuadés que les élections annuelles, ou faites seulement
quand l’occasion l’exigerait, troubleraient souvent la tranquillité publique, se
déterminèrent à former une magistrature perpétuelle et honorable, et à choisir
parmi les prêtres le plus renommé par sa sainteté et part sa sagesse, pour
remplir, durant sa vie, les devoirs de gouverneur ecclésiastique. Ce fût alors
que le titre pompeux d’évêque commença de s’élever au-dessus de l’humble titre
de prêtre. Tandis que le dernier de ces noms continuait à distinguer les
membres de chaque sénat chrétien, l’autre exprimait la dignité de son nouveau
président [1461] .
Les avantages de cette forme de gouvernement épiscopal, qui fut
vraisemblablement institué avant la fin du premier siècle [1462] , parurent si
frappants, et d’une telle importance pour la grandeur future, et pour la paix
présente du christianisme, qu’il fût adopté sans délai, par toutes les sociétés
déjà répandues dans l’empire. Dès les premiers temps il avait acquis la
sanction de l’antiquité [1463] ;
aujourd’hui les Églises les plus puissantes, tant de l’Orient que de
l’Occident, le révèrent encore comme un établissement primitif et même divin [1464] . Il est inutile
d’observer que les prêtres humbles et pieux qui furent d’abord revêtus de la
dignité épiscopale, ne possédaient sûrement pas, et qu’ils auraient
probablement rejeté le pouvoir et la pompe qui environnent maintenant la tiare
du pontife romain ou la mitre d’un prélat allemand. Mais il est facile de
tracer en peu de mots les limites étroites de leur juridiction, qui,
principalement spirituelle dans son origine, était quelquefois aussi temporelle [1465] . Elle avait
pour objet l’administration des sacrements et la discipline de l’Église ;
l’inspection générale sur les cérémonies religieuses, qui, devenaient de jour
en jour plus variées, se multipliaient imperceptiblement ; la consécration
des ministres ecclésiastiques auxquels l’évêque assignait leurs nations
respectives ; la direction des fonds de la communauté été la décision de tous
les différends que les fidèles ne voulaient pas porter au tribunal d’un juge
idolâtre. Pendant un espace de temps assez court, l’évêque prit l’avis des
autres prêtres, et l’exercice de ses pouvoirs fut soumis au consentement et à
l’approbation de l’assemblée des chrétiens. On le regardait alors comme le
premier d’entre ses égaux et comme le serviteur honorable d’un peuple libre.
Toutes les fois que, par sa mort, le siège épiscopal devenait vacant, un
nouveau président, tiré du collège des prêtres, était élu par le suffrage libre
de la congrégation entière, dont chaque membre se croyait revêtu d’un caractère
sacré et sacerdotal [1466] .
Telles furent la douceur et l’égalité du gouvernement des
chrétiens pendant plus de cent ans après la mort des apôtres. Chaque société
formait en elle-même une république séparée et indépendante ; et, quoique
les
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