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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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et
particulièrement des esclaves, dont on estimait peu la vie, et dont les anciens
contemplaient les maux avec trop d’indifférence [1636] . Le savant
Origène, qui avait étudié et qui connaissait par expérience l’histoire de
l’Église, déclare, dans les termes les plus formels, que le nombré des martyrs
était peu considérable [1637] .
Son autorité suffirait seule pour détruire cette armée innombrable de
confesseurs dont les reliques, tirées pour la plupart des catacombes de Rome,
ont rempli tant d’églises [1638] ,
et dont les aventures merveilleuses ont été le sujet de tant de romans sacrés [1639] . Mais
l’assertion générale d’Origène est expliquée et confirmée par le témoignage
particulier de saint Denys, son ami, qui dans la ville immense d’Alexandrie, et
du temps de la persécution rigoureuse de l’empereur Dèce, compte seulement dix
hommes et sept femmes exécutés pour avoir professé la religion chrétienne [1640] .
    Pendant cette même persécution, le zélé, l’éloquent,
l’ambitieux Cyprien gouvernait l’Église, non seulement de Carthage, mais encore
de l’Afrique ; il possédait toutes les qualités qui pouvaient lui attirer le
respect des fidèles, ou exciter les soupçons et le ressentiment des magistrats
païens. Le caractère de ce saint prélat, et le poste qu’il occupa semblaient le
désigner à l’envie comme la victime la plus digne de tomber sous ses coups [1641] . Cependant
l’histoire de la vie de saint Cyprien prouve assez que notre imagination a
exagéré la situation périlleuse dans laquelle se trouvait un évêque chrétien [1642] , et que s’il
était exposé à des dangers, l’ambition en court de plus grands dans la
poursuite des honneurs temporels. Quatre empereurs romains avec leurs familles,
leurs amis et leurs partisans, furent massacrés dans l’espace de dix années,
pendant lesquelles saint Cyprien guida, par son autorité et par son éloquence,
les conseils de l’Église de Carthage. Ce fut la troisième année seulement de son
administration qu’il eut lieu de redouter, pendant quelques mois, les édits
sévères de Dèce, la vigilance des magistrats et les clameurs de la multitude
qui demandait à grands cris que saint Cyprien, ce chef des chrétiens, fût jetés
aux lions. La prudence lui conseillait de se mettre à couvert pendant quelque
temps : la voix la prudence fut écoutée. Il se retira dans une solitude
obscure, d’où, il pouvait entretenir une correspondance suivie avec le clergé
et avec le peuple de Carthage ; et, se dérobant à la fureur de la tempête
jusqu’à ce qu’elle fût dissipée, il conserva sa vie, sans cependant renoncer à
sa réputation ni à son pouvoir. Malgré toutes les précautions, il ne put éviter
les reproches de ses ennemis personnels, qui insultaient à sa conduite, ni la
censure des chrétiens plus rigides qui la déploraient. On l’accusa d’avoir
manqué lâchement, et par une désertion criminelle, aux devoirs les plus sacrés [1643] . Saint Cyprien
allégua  pour sa justification, la nécessité de se réserver pour les besoins
futurs de l’Église, l’exemple de plusieurs saints évêques [1644] , et les
avertissements divins, qui lui avaient souvent été communiqués, comme il le
déclare lui-même, dans des visions et dans des extases [1645] . Mais sa
meilleure apologie est la fermeté avec laquelle, huit ans après, souffrit la
mort en défendant la cause de la religion. L’histoire authentique de son
martyre a été écrite avec une sincérité et une impartialité peu
ordinaires ; nous en rapporterons les circonstances les plus
intéressantes, persuadé qu’elles donneront les plus grands éclaircissements sur
l’esprit et sur la force des persécutions des Romains [1646] .
    Sous le troisième consulat de Valérien et le quatrième de
Gallien, saint Cyprien eut ordre de se rendre dans la chambre du conseil privé
de Paternus, proconsul d’Afrique. Ce magistrat lui fit part de l’ordre impérial
qu’il venait de recevoir [1647] ,
et par lequel il était enjoint à tous ceux qui avaient abandonné la religion
romaine, de reprendre immédiatement la pratique des cérémonies de leurs
ancêtres. Saint Cyprien répliqua qu’il était chrétien et évêque, et qu’il
resterait attaché au culte du Dieu véritable et unique qu’il priait tous les
jours pour la sûreté et pour la prospérité des deux empereurs ses légitimes
souverains. Réclamant avec une

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