Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
pays, les Celtibériens étaient les plus puissants : une
opiniâtreté invincible distinguait surtout les Asturiens et les Cantabres. Sûrs
de trouver un asile dans leurs montagnes, ces peuples furent les derniers qui
se soumirent aux armes de Rome ; et, quelques siècles après, ils
secouèrent les premiers le joug des Arabes.
L’ancienne Gaule, qui comprenait tout le pays situé entre
les Pyrénées, les Alpes, le Rhin et l’Océan, était beaucoup plus étendue que la
France moderne. Aux domaines de cette puissante monarchie, et à l’acquisition
récente qu’elle a fait de la Lorraine et de l’Alsace, il faut encore ajouter le
duché de Savoie, les cantons de la Suisse, les quatre électorats du Rhin, le
pays de Liège, le Luxembourg, le Hainaut, la Flandre et le Brabant. Après la
mort de César, Auguste eut égard, dans la division de la Gaule, à
l’établissement des légions, au cours des rivières, et aux distinctions de
provinces déjà connues dans ce pays, qui renfermait plus de cent États
indépendants, avant que les Romains s’en fussent rendus maîtres [84] . La colonie de
Narbonne donna son nom au Languedoc, à la Provence et au Dauphiné. Le
gouvernement d’Aquitaine s’étendait depuis les Pyrénées jusqu’à la Loire.
Entre ce fleuve et la Seine, était située la Gaule celtique, qui reçût bientôt
une nouvelle dénomination de la fameuse colonie de Lugdunum, Lyon. Au delà de la
Seine était la Belgique, bornée d’abord seulement par le Rhin, mais, quelque
temps avant le siècle de César, les Germains, profitant de la supériorité que
donne la bravoure, s’étaient emparés d’une partie considérable de la Belgique.
Les empereurs romains saisirent avec empressement une occasion favorable aux
prétentions de leur vanité, et la frontière du Rhin, qui s’étendait depuis
Leyde jusqu’à Bâle, fût décorée du nom pompeux de Haute et Basse Germanie [85] . Telles étaient,
sous les Antonins, les six provinces de la Gaule, la Narbonnaise, l’Aquitaine,
la Celtique ou Lyonnaise, la Belgique et les deux Germanies.
Nous avons déjà parlé de l’étendue et des bornes de la
province romaine de Bretagne : elle renfermait toute l’Angleterre, le pays
de Galles, et le pays plat d’Écosse jusqu’au passage de Dunbritton e
d’Édimbourg. Avant que la Bretagne eût perdu sa liberté, elle était inégalement
divisée en trente tribus de Barbares, dont les plus considérables étaient les
Belges à l’occident, les Brigantes au nord, les Silures au midi du Pays de
Galles, et les Icéniens dans les comtés de Norfolk et de Suffolk [86] . Autant qu’il est
possible de s’en rapporter à la ressemblance des mœurs et ces langues, il est
probable que l’Espagne, la Gaule et la Bretagne avaient été peuplées par une
même et vigoureuse race de sauvages. Ils disputaient souvent le champ de
bataille aux Romains, et ils ne furent subjugués qu’après avoir livré une
infinité de combats. Enfin, lorsque ces provinces eurent été soumises, elles
formèrent la division occidentale de l’empire en Europe, qui s’étendait depuis
le mur d’Antonin jusqu’aux colonnes d’Hercule, et depuis l’embouchure du Tage
jusqu’aux sources du Rhin et du Danube.
Avant les conquêtes des Romains, la Lombardie n’était point
regardée comme partie de l’Italie. Des Gaulois avaient fondé une colonie
puissante le long des rives du Pô, depuis le Piémont, jusque dans la
Romagne : ils avaient porté leurs armes et leurs noms dans les plaines
bornées par les Alpes et les Apennins. Les Liguriens habitaient les rochers où
s’est élevée la république de Gènes. Venise n’existait point encore, mais la
partie de cet État située à l’orient de l’Adige était occupée par les Vénètes [87] . Le milieu de
l’Italie, qui compose maintenant le duché de Toscane et l’État ecclésiastique,
était l’ancienne patrie des Étrusques et des Ombriens ; des Étrusques à
qui l’Italie était redevable des premiers germes de la civilisation [88] . Le Tibre roulait
ses ondes au pied des superbes collines de Rome ; et depuis cette rivière
jusqu’aux frontières de Naples, le pays des Sabins, des Latins et des Volsques,
fut le théâtre des succès naissants de la république. Ce fut dans cette contrée
si renommée, que les premiers consuls méritèrent des triomphes ; que leurs
successeurs s’occupèrent à décorer des palais, et leur postérité à élever
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