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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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à l’attrait du pillage, ils aimaient
la guerre pour la guerre ; ils la regardaient comme l’honneur et la félicité
suprême du genre humain. Leurs âmes et leurs corps étaient si parfaitement
endurcis par une activité continuelle, que, selon la vive expression d’un
orateur ; les neiges de l’hiver avaient autant de charmes pour eux que les
fleurs du printemps. Dans le mois de décembre qui suivit la bataille de
Strasbourg, Julien attaqua six cents guerriers de cette nation, qui s’étaient
jetés dans deux châteaux sur la Meuse [2156] .
Au milieu de cette dure saison, ils soutinrent avec une constance indomptable
un siége de cinquante-quatre jours. Epuisés par la faim, et convaincus que la
vigilance avec laquelle l’ennemi rompait les glaces de la rivière ne leur
laissait aucun espoir de s’échapper, les Francs consentirent, pour la première
fois, à déroger à l’ancienne loi qui leur ordonnait de vaincre ou de mourir.
Julien envoya immédiatement ses captifs à la cour de Constance ; l’empereur les
accepta comme un présent précieux [2157] ,
et se réjouit de pouvoir ajouter cette troupe de héros à l’élite des gardes de
son palais. La résistance opiniâtre de cette poignée de Francs fit prévoir à
Julien les difficultés de l’expédition qu’il se proposait d’entreprendre, au
commencement du printemps, contre le corps ennemi de la nation. Sa rapide
diligence surprit et déconcerta l’activité des Barbares ; ordonnant à ses
soldats de s’approvisionner de biscuit pour vingt jours, il vint soudainement
placer son camp auprès de Tongres, tandis que les ennemis le croyaient encore à
Paris, dans ses quartiers d’hiver, et dans l’attente des convois qui arrivaient
lentement de l’Aquitaine. Sans donner aux Francs le temps de se réunir ni de
délibérer, il étendit sagement ses légions depuis Cologne jusqu’à l’Océan ; et,
par la terreur autant que par le succès de ses armes, il réduisit bientôt les
tribus suppliantes à implorer la clémence et à subir la loi de leur vainqueur.
Les Chamaviens se retirèrent docilement dans leurs anciennes habitations
au-delà du Rhin ; mais on permit aux Salens de conserver leur nouvel
établissement dans la Toxandrie, comme sujets et auxiliaires de l’empire romain [2158] . Le traité fut
ratifié par des serments solennels, et on nomma des inspecteurs pour résider
parmi les Francs, et faire exécuter strictement les conditions. On rapporte une
anecdote intéressante par elle-même, et qui ne dément pas le caractère que l’on
donne à Julien. Il arrangea et conduisit ingénieusement jusqu’à la fin cette
espèce de tragédie. Quand les Chamaviens demandèrent la paix, il exigea qu’on
lui remît le fils de leur roi, comme le seul otage qu’il pût lui inspirer
quelque confiance. Un silence lugubre, interrompu par des larmes et de longs
gémissements, peignit d’une manière expressive la douleur et la perplexité des
Barbares. Leur chef, vénérable par ses cheveux blancs, déclara que son fils
n’existait plus, et déplora d’une manière pathétique sa perte personnelle qui
devenait une calamité publique. Tandis que les Chamaviens demeuraient
prosternés au pied du trône, le jeune prince captif, qu’ils croyaient avoir été
tué, parut inopinément devant eux. Dès que les transports bruyants de la joie
furent assez apaisés pour qu’il put se faire entendre, Julien leur tint le
discours suivant : Contemplez le prince qui faisait couler vos larmes :
c’est par votre faute que vous l’aviez perdu ; Dieu et les Romains vous le
rendent. Je le garderai, j’élèverai sa jeunesse ; plutôt comme un monument de
ma propre vertu, que comme un gage de votre sincérité. Si vous violez la foi
que vous m’avez jurée, les armes de la république vengeront vôtre perfidie sur
les coupables, et non pas sur l’innocent . Les Barbares se retirèrent
pénétrés de reconnaissance et d’admiration [2159] .
    Ce n’était pas assez pour Julien d’avoir chassé des Gaules
les Barbares de la Germanie, il aspirait à égaler la gloire du premier et du
plus illustre des empereurs. À son exemple, il composa ses commentaires de la
guerre des Gaules [2160] .
César a raconté avec un sentiment d’orgueil la manière dont il passa deux fois
le Rhin. Julien pouvait se vanter qu’avant de prendre le titre d’Auguste, il
avait conduit les aigles romaines au-delà de ce fleuve, dans trois expéditions
également couronnées

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