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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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il
disposa, dans un testament militaire [2800] ,
de sa fortune particulière. Ayant ensuite demandé pourquoi il ne voyait pas
Anatolius, Salluste répondit qu’il était tombé sous les coups des Persans ; et
l’empereur, par une inconséquence qui avait quelque chose d’aimable, regretta
la perte de son ami. Il désapprouva en même temps la douleur immodérée des
spectateurs, et les conjura de ne pas avilir par des larmes de faiblesse l’a
mort d’un prince qui, en peu de moments, se trouverait uni au ciel et aux
étoiles [2801] .
Chacun se taisait, et Julien entama, avec les philosophes Priscus et Maxime,
une conversation de métaphysique sur la nature de l’âme. Ces efforts de corps
et d’esprit abrégèrent probablement sa vie de quelques fleures. Sa blessure se
rouvrit et donna du sang en abondance ; le gonflement des veines embarrassa la
respiration ; il demanda de l’eau froide, et dés qu’il eut cessé de boire, il
expira sans douleur vers le mi-lieu de la nuit. Ainsi mourut cet homme
extraordinaire, à l’âge de trente-deux ans, après avoir régné vingt mois depuis
la mort de Constance son collègue. Il déploya dans ses derniers instants,
peut-être avec un peu d’ostentation, l’amour de la vertu et de la gloire qui
avaient été ses passions dominantes [2802] .
    En négligeant d’assurer, par le choix prudent et judicieux
d’un collègue et d’un successeur, l’exécution future de ses projets, Julien fut
en quelque sorte la cause du triomphe du christianisme et des calamités de
l’empire ; mais il se trouvait le dernier de la famille royale de Constance
Chlore ; et s’il forma jamais sérieusement le dessein de revêtir de la pourpre
le plus digne d’entre les Romains, la difficulté du choix, la jalousie du
pouvoir, la crainte de l’ingratitude, et la présomption qu’inspirent la santé,
la jeunesse et la fortune, éloignèrent l’effet de cette résolution. Sa mort
inattendue laissa l’empire sans maître et sans héritier, dans un embarras et
dans un danger où il ne s’était pas trouvé depuis l’élection de Dioclétien,
c’est-à-dire, depuis quatre-vingts ans. Sous un gouvernement qui avait presque
oublié les distinctions de la noblesse, on faisait peu de cas de la supériorité
de la naissance ; les prétentions que donnaient les emplois étaient précaires
et accidentelles ; et ceux qui sollicitaient le trône vacant, ne pouvaient
compter que sur leur mérite personnel ou sur la faveur populaire. Mais la
situation des troupes romaines qui manquaient de vivres, et qu’une armée de
Barbares environnait de tous côtés, abrégea les moments donnés à la douleur et
à la délibération. Au milieu de cette inquiétude et de cette détresse, on
embauma honorablement le corps de Julien, ainsi qu’il l’avait ordonné, et à la
jointe du jour les généraux convoquèrent un conseil militaire, où furent
appelés les chefs des légions et les officiers de cavalerie et d’infanterie.
Les trois ou quatre dernières heures de la nuit avaient suffi pour former
quelques cabales ; et lorsqu’on proposa l’élection d’un empereur, l’esprit de
faction se montra dans l’assemblée. Victor et Arinthæus réunirent ceux des
guerriers qu’on avait vus à la cour de Constance ; les amis de Julien
s’attachèrent à Dagalaiphus et Nevitta, deux chefs gaulois ; et on, avait lieu
de craindre les suites les plus funestes de la mésintelligence de deux partis
si opposés par leurs caractères et leurs intérêts, parleurs maximes de
gouvernement, et peut-être par leurs principes de religion. Les vertus
éminentes de Salluste pouvaient seules. écarter la discorde et réunir les
suffrages ; et ce respectable préfet eût été sur-le-champ déclaré successeur de
Julien, s’il n’eût avec sincérité représenté, d’un ton aussi ferme que modeste,
que son âge et ses infirmités ne lui laissaient plus la force de soutenir le
poids du diadème. Les généraux, surpris et embarrassés de son refus, parurent
disposés à suivre l’avis salutaire d’un officier inférieur [2803] , qui leur
conseilla de taire ce qu’ils eussent fait dans l’absence de l’empereur, de
mettre en œuvre tous les moyens pour tirer l’armée de la situation effrayante
où elle se trouvait, et s’ils avaient le bonheur de gagner les confins de la
Mésopotamie, de procéder alors, avec maturité et de bonne intelligence, à
l’élection d’un souverain légitime. Pendant qu’ils

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