Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
sagesse des princes chrétiens, qui voyaient d’un œil de mépris ces derniers
efforts de la superstition et du désespoir [3326]  ;
mais ils faisaient exécuter à la rigueur des lois qui proscrivaient les
sacrifices et les cérémonies du paganisme, et chaque jour contribuait à
détruire une religion soutenue par l’habitude plutôt que par le raisonnement.
La dévotion d’un poète ou d’un philosophe peut se nourrir en secret par la
prière, l’étude et la méditation mais les sentiments religieux du peuple, dont
toute, la force vient de l’habitude et de l’imitation, ne peuvent guère avoir
de fondements solides que l’exercice du culte public. L’interruption de ce
culte est capable d’opérer dans un petit nombre d’années l’ouvrage important
d’une révolution nationale. Le souvenir des opinions théologiques ne se
conserve pas longtemps privé du secours artificiel des prêtres, des temples et
des livres [3327] .
Un vulgaire ignorant, dont l’imagination est en proie aux terreurs et aux
espérances d’une aveugle superstition, se laissera facilement persuader par ses
supérieurs de diriger ses vœux vers les dieux du siècle ; et son zèle
s’enflammera insensiblement pour la défense et la propagation de la nouvelle
doctrine que le seul besoin d’une religion l’avait forcé d’abord à recevoir. La
génération qui vint au monde après la promulgation des lois impériales, se
laissa sans peine attirer dans le sein de l’Église catholique, et la chute du
paganisme fut en même temps si douce et si rapide, que vingt-huit ans après la
mort de Théodose, ses faibles restes n’étaient plus sensibles aux yeux du
législateur [3328] .
    La ruine de la religion païenne est rapportée par les
sophistes comme un prodige effrayant qui couvrit la terre de ténèbres et rétablit
l’ancien règne du chaos et de la nuit. Ils racontent en style pompeux et
pathétique, que les temples se convertirent en sépulcres, et que les domiciles
sacrés, ornés naguère des statues des dieux, furent déshonorés par les reliques
des martyrs chrétiens. Les moines (race d’animaux immondes, auxquels
Eunape est tenté de refuser le nom d’hommes) sont , dit-il, les
auteurs de la nouvelle doctrine qui, à des divinités conçues par l’esprit, a
substitué les plus méprisables esclaves. Les têtes salées et marinées de ces
infâmes malfaiteurs que la multitude de leurs crimes a justement conduits à une
mort ignominieuse, leurs corps, où l’on voit encore les traces des fouets et
des tortures ordonnées par les magistrats ; tels sont , ajoute Eunape, les
dieux que la terre  produit de nos jours ; tels sont les martyrs, les juges
suprêmes des prières et des vœux adressés à la Divinité, et dont on respecte
aujourd’hui les tombes comme des objets consacrés à la vénération des peuples [3329] . Sans approuver
l’animosité du sophiste, il est assez naturel de partager sa surprise d’une
révolution dont il fut le témoin, et qui éleva les victimes obscures des lois
romaines au rang de protecteurs célestes et invisible de l’empire romain. Le
temps et les succès convertirent en adoration religieuse la respectueuse
reconnaissance des chrétiens pour les martyrs de la foi, et on accorda les
mêmes honneurs aux plus illustres des saints et des prophètes. Cent cinquante
ans après les morts glorieuses de saint Pierre et de saint Paul, les tombes ou
plutôt les trophées de ces héros spirituels [3330] décorèrent le
Vatican et la voie d’Ostie. Dans le siècle qui suivit la conversion de
Constantin, les empereurs, les consuls et les généraux des armées, visitaient
dévotement les sépulcres d’un faiseur de tentes et d’un pêcheur [3331] ; et l’on
déposa, respectueusement leurs os sous les autels du Christ, où les évêques de
la ville impériale faisaient tous les jours à Dieu l’offrande de leur sacrifice [3332] . La nouvelle
capitale de l’Orient, ne pouvant fournir par elle-même de ces glorieux
monuments, s’appropria les dépouilles des provinces : les corps de saint André,
de saint Luc et de saint Timothée, avaient reposé près de trois cents ans dans
des tombeaux obscurs, d’où on les transporta en pompe à l’église des Saints Apôtres,
fondée par Constantin, sur les bords du Bosphore de Thrace [3333] . Environ
cinquante ans après, ces mêmes rivages furent honorés de la présence de Samuel,
juge et prophète d’Israël. Les évêques se passèrent

Weitere Kostenlose Bücher