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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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L’empereur
choisi par le sénat de Rome, après avoir été successivement élevé sur le trône,
dégradé, insulté, rétabli, et dégradé une seconde fois avec ignominie, fut
enfin abandonné à son triste sort. Lorsque le roi des Goths lui retira
totalement sa protection, le mépris ou la pitié l’empêchèrent de faire aucune
violence au malheureux Attale. Ce fantôme d’empereur, sans alliés et sans
sujets, s’embarqua dans un port de l’Espagne, pour se réfugier dans quelque
retraite solitaire ; mais il fut pris en mer, traîné en présence d’Honorius,
conduit en triomphe dans les rues de Rome et de Ravenne, et publiquement exposé
aux regards de la multitude, sur la seconde marche du trône de son invincible vainqueur. Attale subit le châtiment dont on l’accusait d’avoir menacé Honorius
dans les jours de sa prospérité. Après lui avoir coupé deux doigts de la main,
on le condamna à un exil perpétuel dans l’île de Lipari, où il reçut du
gouvernement une honnête subsistance. Il n’y eut plus de révolte durant le
reste du règne d’Honorius ; et d’on peut observer que dans l’espace de cinq
ans, sept usurpateurs avaient cédé à la fortune d’un prince également incapable
d’agir et de commander.
    La situation de l’Espagne, séparée de tous côtés des ennemis
de Rome par des mers ou des montagnes et par des provinces intermédiaires,
avait conservé, longtemps, sa tranquillité, et nous pouvons observer comme une
preuve de son bonheur intérieur, que, durant une période de quatre siècles,
l’Espagne a fourni très peu de matériaux à l’histoire de l’empire romain. Le retour
de la paix effaça rapidement les traces des Barbares qui avaient franchi les
Pyrénées sous le règne de Gallien ; et dans le quatrième siècle de l’ère
chrétienne, on comptait les villes d’Emerita ou Merida, de Cordoue, de Bracara
et de Séville au hombre des plus belles et des plus riches du monde romain. Des
peuples industrieux entretenaient l’abondance des différentes races d’animaux,
des végétaux et des minéraux. Les manufactures étaient en vigueur, et
l’avantage particulier des productions nécessaires à la marine contribuait à
soutenir un commerce lucratif et très étendu [3688] . Les arts et
les sciences florissaient sous la protection des empereurs ; et le courage des
Espagnols, un peu affaibli par l’habitude de la paix et de la servitude, sembla
jeter de nouveau quelques étincelles, lorsque les Germains répandirent la
terreur depuis les bords du Rhin jusqu’aux Pyrénées. Tant que les braves et
fidèles milices du pays conservèrent la garde de ces montagnes elles
repoussèrent avec succès toutes les entreprises des Barbares ; mais dès que les
troupes nationales furent forcées de remettre leurs postes aux bandes
honoriennes qui combattaient pour Constantin, ces troupes perfides livrèrent
les barrières de l’Espagne aux ennemis, environ dix mois avant le sac de Rome
par les Goths [3689] .
Coupables de rébellion contre leur souverain légitime, affamés de pillage, les
gardes mercenaires des Pyrénées abandonnèrent leur poste, appelèrent à leur
aide les Suèves, les Alains et les Vandales et grossirent le torrent
dévastateur qui se répandait avec une violence irrésistible depuis les
frontières de la Gaule jusqu’à la mer d’Afrique. Un des plus éloquents
historiens de l’Espagne a décrit les malheurs de sa patrie dans un discours
concis, où il a rassemblé les déclamations violentes et peut-être exagérées des
auteurs contemporains [3690] . L’irruption de ces peuples fut suivie des plus affreuses calamités. Les
Barbares pillaient et massacraient indifféremment les Romains et les Espagnols,
et ravageaient avec la même fureur les villes et les campagnes. La famine
réduisit les malheureux habitants à se nourrir de chair humaine, et les animaux
sauvages qui se multipliaient sans obstacle, rendus plus furieux par l’habitude
du sang et les aiguillons de la faim attaquaient sans crainte les hommes pour
les dévorer. La peste, suite inévitable de la famine, vint bientôt combler la
désolation ; la plus grande partie des peuples en fut la victime, et les
gémissements des mourants n’excitaient que l’envie de ceux qui leur
survivaient. Enfin les Barbares, rassasiés de meurtre et de brigandage, et
atteints eux-mêmes de la maladie contagieuse dont ils étaient les funestes
auteurs, se fixèrent dans le pays qu’ils avaient

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