Histoire du Consulat et de l'Empire
mort toute personne ayant porté la cocarde blanche. Le chevalier de Gouaut qui avait provoqué une manifestation royaliste à Troyes, à l'arrivée des Prussiens, est passé par les armes au moment où Napoléon reprend la ville, à la fin du mois de février.
Dans ce contexte peu favorable, la déclaration de Bordeaux du 12 mars prend toute sa valeur, d'autant que bientôt la plus grande partie du Sud-Ouest se rallie aux Bourbons. Son effet est surtout efficace sur les alliés, car elle accrédite le bien-fondé d'un rétablissement des Bourbons sur le trône de France. Le comte d'Artois est désormais choyé par les alliés. Il est vrai que la détérioration de la situation militaire de Napoléon, ajoutée à son refus de toute négociation, a contribué à voir s'éloigner la perspective d'up.
maintien de l'Empire. Il reste aux royalistes à montrer leur force. A Paris, les Chevaliers de la foi disposaient d'une organisation bien établie. Ses membres, parmi lesquels Sosthène de La Rochefoucauld ou Adrien de Montmorency, frère de Mathieu parti rejoindre le comte d'Artois dans l'Est, préparaient la proclamation de la monarchie lorsque le Sénat vota la déchéance de Napoléon. Ce n'est donc pas l'opposition royaliste qui a provoqué la chute de l'Empire, mais elle l'a accompagnée et surtout la persistance de réseaux royalistes a permis de convaincre les alliés de la nécessité de restaurer la royauté en faveur des Bourbons.
3. L'ABDICATION
Tandis que Napoléon continue de combattre en Champagne, de sourdes intrigues se nouent à Paris où le danger menace. Dans la capitale, le pouvoir repose entre les mains de l'impératrice Marie
Louise, à qui Napoléon a confié la régence avant de partir en campagne. Elle est secondée par Joseph Bonaparte, lieutenant général de l'Empire. Mais le véritable animateur du jeu politique, en ces temps de crise, n'est autre que le prince de Bénévent, autrement dit Talleyrand. Bien qu'écarté du ministère des Relations extérieures en 1807, Talleyrand est resté proche du pouvoir. Vice-grand électeur, il participe régulièrement au Conseil privé et continue d'être consulté sur les grands sujets politiques. Pourtant, ses sentiments à l'égard de l'Empire n'ont cessé de se dégrader. Il y a déjà longtemps qu'il a pris langue avec les puissances étrangères, notamment l'Autriche et la Russie qu'il renseigne moyennant quelques fortes espèces sonnantes et trébuchantes. A partir de 1810, il ne croit plus guère dans les chances de survie de l'Empire, ce que la catastrophe de Russie devait confirmer ; on lui attribue alors ce mot fameux, à 407
L'ÉCHEC DU SURSAUT DYNASTIQUE (1810-1815)
propos de la campagne de Russie : « C'est le commencement de la fin. » Pourtant Napoléon continue d'être fasciné par le personnage, tout en se méfiant de lui. Les scènes qu'il lui fait sont restées mémorables. Les deux hommes entretiennent depuis l'époque de la campagne d'Italie une relation faite d'admiration réciproque, de jalousie et de méfiance. La dernière de ces scènes a eu lieu le 16 janvier 1814, au sortir de la messe dite dans la chapelle des Thileries. Dix jours plus tard, Napoléon quittait Paris. Il ne devait jamais plus revoir Talleyrand, mais il continue de se méfier de lui comme l'attestent les messages qu'il adresse à Savary. Talleyrand est alors l'objet d'une attention particulière des services de la police. Malgré cette surveillance, le salon du prince de Bénévent devient un des principaux lieux d'intrigue politique du moment.
On y croise beaucoup d'ecclésiastiques, en charge ou défroqués.
L'ancien évêque d'Autun se plaît dans la compagnie d'hommes férus de théologie. Parmi eux figure notamment l'abbé de Pradt que l'avancée des troupes alliées a contraint d'abandonner son archevêché de Malines où le clergé local ne l'avait jamais accepté. Prélat à la fibre plus politique que religieuse, l'abbé de Pradt s'entend à merveille avec Talleyrand sur le devenir du pays. L'abbé de Montesquiou est également un des familiers de son salon. Il avait siégé à l'Assemblée constituante comme Talleyrand, mais avait conservé alors sa foi monarchiste. Revenu d'émigration après Thermidor, il avait appartenu sous le Directoire aux réseaux royalistes, avant de tenter de convaincre Bonaparte de favoriser la restauration en France. L'abbé Louis était également présent à Versailles en 1789. À l'époque simple diacre,
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