Histoire du Japon
d’atteindre au pinacle de l’ambition terrestre.
Alors qu’il y avait beaucoup de cruauté et de vaine parade dans la société que la famille Fujiwara tenait sous son empire, il ne fait aucun doute qu’elle engendra bien des femmes remarquables, et créa une tradition de beauté, de grâce et de dévotion dont le pays peut être fier.
Si Michinaga devint le plus puissant régent Fujiwara, sa naissance et son rang à la cour ne faisaient pas de lui un candidat particulièrement bien placé pour obtenir la charge la plus élevée. Il fut heureux pour lui que ses frères mourussent jeunes, et qu’il eût plusieurs sœurs intelligentes et belles. Mais par ailleurs, c’était un homme d’État d’une grande habileté, qui savait comment traiter avec ses ennemis aussi bien qu’avec ses amis. Conscient des changements qui s’opéraient dans le pays, il prévit l’ascension des familles militaires qui commençaient à dominer la vie provinciale, et, tôt dans sa carrière, il décida de s’allier les principaux guerriers, qui, en échange de ce qu’il avait à offrir, pourraient l’aider en cas de besoin. Il choisit certains membres du clan Minamoto, dont les capacités l’impressionnaient, et ce fut leur présence à l’arrière-plan qui lui permit, au début de sa montée au pouvoir, de battre ou d’intimider ses rivaux. Il n’y avait alors pas d’autre force armée qu’il pût utiliser, et personne qu’il eût à redouter, car la garde impériale était incompétente, étant constituée de paysans que la paresse avait conduits à quitter la campagne et ses durs travaux pour la capitale, et commandée par des jeunes gens décoratifs qui n’avaient aucune intention de pratiquer les arts militaires.
Quant à son titre, il reçut la suprême dignité de nairan, mais son office était en fait celui d ’udaijin, ou ministre de la Droite, fonction relativement modeste. Il ne prit jamais le titre de kampaku, ni ne devint même dajô dai-jin, c’est-à-dire chancelier du royaume, qui était la charge la plus haute dans la hiérarchie purement officielle. Le rang ne l’intéressait guère, car il savait pouvoir compter sur sa propre force de caractère et sur ses liens de parenté extrêmement étroits avec le Trône.
Lorsqu’il devint nairan, en 995, rien ne lui permettait de prétendre à la régence en tant que « parent maternel », et il entreprit de remédier à cette situation. Sa fille Akiko n’était alors qu’une enfant de sept ans, mais en 999, bien que trop jeune pour le mariage, elle devint dame impériale ( nyögo ) et, l’année suivante, elle fut promue chügü, ou deuxième épouse de l’empereur Ichijô (qui régna de 986 à 1011). Elle est fréquemment mentionnée dans l’histoire de l’époque, surtout sous le nom de Jôtômon-In, qu’elle porta après le décès de l’empereur. Elle fut l’impératrice au service de laquelle une favorite et dame d’honneur, la romancière Murasaki Shikibu, acquit cette connaissance intime de la cour si bien utilisée dans sa grande œuvre, le Roman de Genji.
Michinaga donna le ton de ses relations avec la maison impériale en organisant une fête gigantesque pour célébrer l’entrée d’Akiko dans le palais intérieur. Ses appartements furent meublés de façon somptueuse, et ornés de peintures par de grands artistes (tels que Kose Hirotaka) ; et elle eut quarante dames d’honneur, choisies parmi les plus intelligentes et les plus belles des nombreuses candidates de l’aristocratie. Elle fut bientôt la favorite de l’empereur Ichijô, et lorsqu’elle lui donna un fils, il le nomma héritier présomptif, car sa position impériale dépendait du soutien d’un homme aussi puissant que Michinaga. En fait, il plaida auprès de ce dernier en faveur du fils qu’il avait eu de sa première épouse, promettant que, le moment venu, l’enfant d’Akiko monterait sur le trône. Mais Michinaga ne voulut rien entendre. Cela se passait en 1008, et le fils d’Akiko devint plus tard l’empereur Go-Ichijô. Ichijô, son père, était si malade, et si inquiet de la faiblesse de sa position, qu’il abdiqua en 1011 et mourut quelques semaines plus tard, âgé de trente et un ans seulement, alors qu’il régnait depuis l’âge de cinq ans. Il fut remplacé par l’empereur Sanjô (1011-1016), fils de l’empereur Reizei, auquel succédèrent deux fils d’Akiko, Go-Ichijô (1016-1036) et Go-Suzaku (1036-1045), né en 1009. La pression
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