Histoire du Japon
dames lors des diverses cérémonies et fêtes liées à la naissance. Leurs costumes étaient somptueux, et leur comportement d’une perfection à défier toute critique.
Ces citations auront donné une vague idée de la croyance en les esprits et la magie qui avait alors une si forte emprise sur la noblesse et sur le peuple. Elle était toutefois tempérée par le goût des cérémonies, la jouissance des formes et des couleurs. Ce mélange de plaisir esthétique et de superstition est très bien illustré par un passage des Notes de chevet de Sei Shônagon où l’auteur décrit certains services bouddhiques auxquels assistent des ministres d’État qui portent à leur chapeau un billet de tabou (imifuda). Ils auraient en fait dû rester chez eux, mais ils sont venus pour jouir du spectacle et de la société sans prêter aucune attention au sermon. La sainteté de l’endroit (prétendent-ils) justifie leur présence, et le billet décourage la critique des étrangers.
La foi bouddhique
Nous avons déjà brièvement examiné la formation des écoles Tendai et Shingon durant les premières années de l’époque de Heian. Par la suite, l’histoire du bouddhisme au Japon est essentiellement celle du développement de ces deux systèmes et de certaines sectes dissidentes qui en sont plus ou moins directement issues. La secte, ou plutôt l’école, Tendai était moins exclusive, plus ouverte que celle du Shingon, et c’est elle qui donna naissance à presque toutes les versions ou sectes du bouddhisme qui se développèrent par la suite au Japon. Cependant, du fait surtout de son aspect mystique, de son fréquent recours aux charmes et aux formules magiques, le Shingon avait un grand succès dans les milieux de la cour, car il se prêtait à merveille aux rites et aux cérémonies dont le caractère impressionnant et volontiers ostentatoire flattait l’orgueil des nobles Fujiwara.
Quoique trop obscur pour pouvoir être qualifié de populaire, l’enseignement Tendai gagna une influence considérable grâce à ses nombreux monastères, temples et séminaires du mont Hiei, au-dessus de la capitale. Il tira grand profit de l’énergie et du savoir de certains de ses professeurs, et à la fin du XIe siècle, ses prêtres les plus ambitieux allaient jusqu’à s’immiscer dans la politique et à utiliser la force armée contre le gouvernement.
Il n’est pas nécessaire ici d’étudier les doctrines de ces deux écoles, mais il convient de relever que l’Église bouddhique connaissait alors une activité très intense, peut-être parce qu’elle attirait des hommes d’un grand savoir et d’une grande force de caractère qui n’avaient aucune chance de réussir dans une autre carrière aussi longtemps que la famille Fujiwara dominait le gouvernement. Après que la cour eut quitté Nara, le bouddhisme devint ce que l’on appelle le « bouddhisme priant » pour le distinguer du « bouddhisme enseignant » des premières sectes et confréries. Dès lors, il se répandit largement à travers le pays. La taille de ses établissements tout comme l’importance de son clergé augmentèrent rapidement, et, vers 900, soit une centaine d’années après la fondation de la capitale de Heian, le bouddhisme jouait un rôle très important dans presque tous les domaines de la vie nationale. Il ne rencontrait aucune opposition parmi les dirigeants, rien de comparable à l’hostilité, à la proscription et même à la persécution qu’il connaissait en Chine.
Ce que nous avons déjà vu de la société aristocratique sous les régents Fujiwara aura montré que l’empereur et les nobles étaient les patrons de l’Église. Ils dépensaient sans compter pour l’entretien et la décoration des temples et sanctuaires ; ils assistaient aux fréquents services religieux célébrant les grands événements ou organisés pour prier en période de détresse. Il n’était pas de bonne éducation sans une certaine connaissance des textes sacrés, et de nombreux termes bouddhiques étaient employés dans le langage quotidien. A première vue, il semble qu’aux beaux jours des Fujiwara le bouddhisme était avant toute une force sociale ; mais à y regarder de plus près, on s’aperçoit qu’il fut aussi une force spirituelle, notamment au début de l’époque de Heian. Dans sa période la plus heureuse, non seulement il inspira beaucoup des r lus grands chefs-d’œuvre artistiques, mais il encouragea la pratique
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