Histoire du Japon
patiemment érigé ; et c’est pourquoi il était obligé de viser en pratique au maintien de l’équilibre apparent des forces en présence. A l’arrière-fond, il pouvait y avoir une menace, mais elle disparut lorsque Iemitsu alla à Kyoto avec une grande armée pour faire voir sa puissance.
Ainsi, l’autonomie dont jouissaient la plupart des daimyô était considérable. Chacun d’eux avait une autorité absolue sur la population de son domaine, qui devait obéir à ses lois et payer les impôts dont il décidait. Il est difficile de définir de façon plus exacte le pouvoir et les fonctions d’un daimyô, car ceux-ci variaient selon l’endroit et le moment ; mais ses principaux devoirs consistaient à développer les ressources économiques de son fief, à maintenir l’ordre et à se tenir prêt à mobiliser une force armée à l’appel du shôgun.
La tâche du daimyô n’était pas simple, car il lui fallait d’ordinaire concilier des intérêts divers au sein d’une vaste région. Chaque daimyô, qu’il soit fudai ou tozama, était propriétaire et dirigeant de son domaine. Ses partisans (et ce terme comprend uniquement les membres de la classe guerrière) recevaient de lui soit des terres soit du riz. Ceux qui recevaient des terres étaient appelés chigyô-tori (bénéficiaires d’un revenu foncier), et ceux qui recevaient du riz kuramai-tori (bénéficiaires de riz provenant des magasins du daimyô).
Les chigyô-tori, composant la classe supérieure, recevaient des terres (avec autorité sur les paysans) faisant partie de l’ensemble des biens du daimyô et connues sous le nom de kyûchi (terres octroyées). Une terre octroyée n’était pas forcément toute dans la même localité. Elle se composait souvent de parcelles disséminées, en considération de quoi le bénéficiaire était autorisé à lever un impôt et à imposer des corvées à ses paysans. Sur toutes ces terres, le riz versé comme impôt était collecté par les officiers du daimyô puis reversé aux bénéficiaires respectifs, et la terre était mesurée non pas selon la surface mais en termes de boisseaux de riz : le kokudaka.
Les kuramai-tori, classe inférieure des partisans, recevaient une quantité donnée de riz provenant des terres placées sous le contrôle direct du daimyô, et communément appelées kurairi-chi (terre à entrepôt), du fait que leur produit allait directement dans les magasins du daimyô. Les samurai de rang inférieur touchaient une petite quantité de riz de même provenance, et on les connaissait d’ordinaire sous le nom de fuchimai-tori, terme qui signifie pensionnés. Il y avait plusieurs catégories sociales dans la classe guerrière, dont les membres se différenciaient selon le montant de leurs revenus ou pensions.
La proportion des terres réservées à ces deux types de tenanciers variait d’un fief à l’autre, mais les chiffres donnés ci-dessous peuvent être considérés comme une moyenne 221 :
Kurairi-chi
(sous le contrôle du daimyô)
(sous le contrôle d’un de ses partisans)
1625 Hagi 370000 koku 280000 koku 41 %
1631 ômura 42000 19000 31%
1632 Owari 150000 75%
1643 Mito 180000 50%
En général, la terre détenue par la classe supérieure des partisans (les « kashin », parents du daimyô) représentait une fraction plus petite de la surface totale des terres cultivables que celle d’où provenaient les pensions des kuramai-tori, qui étaient d’ordinaire beaucoup plus nombreux que les bénéficiaires d’un revenu foncier. Ainsi, dans le fief de Hagi, cité dans le tableau ci-dessus, les premiers étaient 4465 et les seconds 1764 222 .
Cette division du fief en deux classes de tenanciers posait naturellement des problèmes de juridiction. Les détenteurs d’une terre en sous-inféodation étaient, dans la mesure du raisonnable, libres de l’administrer à leur idée. Ils pouvaient décider de ce qu’il fallait cultiver, et quels impôts devaient payer les paysans. Ils avaient le droit d’imposer des
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