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Histoire du Japon

Titel: Histoire du Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Sansom
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koku), chefs de bandes de yakko (valets ou subalternes) dits hatamoto-yakko, qui hantaient les rues à la nuit tombante pour voler et assassiner les imprudents. Leurs chefs étaient vêtus de façon extravagante et coiffés à l’avenant. C’est cette originalité qui leur valut le surnom de kabukimono. Ils arboraient des favoris (alors que la coutume voulait qu’un samurai soit rasé jusqu’au sommet du crâne), et ils portaient des sabres d’une longueur extrême. Leurs bandes avaient des noms absurdes, tels que « daishôjingi-gumi », ou bande de tous les dieux, grands et petits – « bande du Panthéon ».
    En considérant le rôle joué par les hatamoto dans ces mouvements hautement irréguliers, il faut se souvenir que, en les organisant après 1635, le bakufu avait éloigné de la terre les hatamoto de moins de 500 koku et leur avait donné des traitements qui se révélaient inadéquats. Ce furent des gens de cette espèce qui devinrent rônin ou chefs de bandes.
    Contre les bandes de hatamoto, il y avait des bandes de jeunes citadins, les machi-yakko, qui prétendaient remédier à l’injustice et punir les malfaiteurs. Elles avaient le même genre d’habitudes en matière de tenue et de comportement que les hatamoto-yakko, mais leurs chefs étaient d’origine sociale différente, car la plupart d’entre eux n’étaient pas issus de la caste militaire mais de celle des employés de bureau, des boutiquiers, des aubergistes et des artisans supérieurs. Leurs affaires les mettaient en contact avec les milieux militaires, car beaucoup d’entre eux servaient d’agents de placement, cherchant des serviteurs pour les samurai que les daimyô avaient ramenés à Edo. En littérature, le plus célèbre des machi-yakko est Banzuiin Chôbei, homme d’un grand courage et d’une grande force physique, qui fut tué en 1657 par le chef d’une bande de hatamoto-yakko lors d’une querelle sur un sujet sans importance. Chôbei doit sa renommée à une pièce de théâtre beaucoup plus tardive, dans laquelle il finit découpé en tranches « comme une carpe sur une planche 225  ». Dans la pièce, c’est un personnage héroïque, champion du faible et fléau du méchant.
    Pour une raison mal définie, la littérature romanesque prête aux yakko des qualités exceptionnelles. Elle les dépeint comme des modèles de chevalerie et les appelle otokodate, champions de la justice. Il est vrai qu’entre eux ils avaient parfois des codes de loyauté très stricts, et qu’il leur arrivait d’accomplir des actions chevaleresques ; mais dans la vie réelle, ils semblent avoir été de vrais coquins, et c’est essentiellement à la littérature théâtrale du XVIII e siècle qu’ils doivent leur réputation de héros. Il est d’ailleurs étrange que le théâtre japonais se soit développé à travers sa représentation des kabukimono et de leurs exploits. Une pièce où l’otokodate est le personnage principal rappelle du reste l’Opéra du gueux.
    Les bandes de yakko continuèrent d’inquiéter le gouvernement d’Edo jusque tard dans le XVII e siècle. En 1686, trois cents membres de la bande dite daishôjingi-gumi furent arrêtés et leurs chefs mis à mort. Par la suite, les yakko semblent avoir perdu leur courage et leur influence, dégénérant en équipes de joueurs et de tire-au-flanc. La formation de ces bandes de jeunes et la guerre qu’elles se livraient entre elles a sa contrepartie dans les grandes villes occidentales de notre époque. Le style de comportement des jeunes paraît le même dans les deux sociétés. L’attention portée au costume et à la coiffure, le jargon et l’obéissance aux chefs sont fondamentaux, et le plus frappant est peut-être la stricte observance d’un code de loyauté au sein de la bande, parallèlement à la poursuite de buts illicites.
    Les yakko éclairent en outre d’un jour intéressant la tendance de la vie citadine japonaise au lendemain des guerres. Comme les rônin (qui leur servaient souvent de chefs), ils étaient le produit d’une rapide expansion de la population des villes et d’une élévation des prix, ou plus exactement du niveau de vie. Après les besoins auxquels il avait dû faire face durant la guerre, il fallait que le bakufu s’occupe de mettre en place une administration civile efficace, et cette nécessité voulait qu’il sacrifiât certains des privilèges de la classe militaire – en particulier de ses éléments les plus

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