Histoire du Japon
Avec très peu d’élaboration, il semblait qu’il pourrait devenir la foi fondamentale du pays. Mais il est douteux que la tendance générale du gouvernement d’un pays suive une théorie, encore moins une loi morale, et il faut se garder de supposer une relation directe entre philosophie systématique et action politique.
Lorsqu’on considère l’histoire gouvernementale du Japon, on ne peut qu’être frappé par le fait que, malgré le respect professé pour l’enseignement confucianiste depuis le vine siècle, on trouve difficilement une application délibérée d’un canon confucianiste à la solution d’un problème politique. Au début comme au Moyen Age, lorsqu’elle n’était pas bouddhique, la vision du monde prédominante était chinoise, et toutes les complexités de l’astrologie et de la divination (qui eurent une influence considérable, mais pas toujours bénéfique, sur la vie de la classe dirigeante) entrent dans cette rubrique. Certains traits de l’ordre social furent également influencés par les premières idées confucianistes, et en matière d’institutions, plusieurs noms et fonctions furent copiés de la Chine. Il serait toutefois difficile de démontrer que, sorti du domaine institutionnel, la pensée confucianiste eut une quelconque influence créatrice ou décisive sur la conduite réelle du gouvernement japonais entre le vine et le XVIIe siècle. Durant cette longue période, la force morale directive fut le bouddhisme plutôt qu’une quelconque croyance ou pratique séculière.
Touchant la position du confucianisme dans le Japon du XVIIe siècle, une tendance attribue à Hayashi Razan une part importante dans les décisions politiques de Ieyasu. Razan joua sans doute un rôle considérable dans la promotion des études confucianistes, et peut-être aussi dans la planification de détail des institutions gouvernementales, mais rien ne prouve qu’on le consulta jamais pour décider de la politique. Lorsqu’on considère l’influence des lettrés sur les décisions pratiques d’hommes d’État, il convient de faire preuve d’un certain scepticisme. Les biographies d’éminents hommes de lettres ou d’Église donnent souvent l’impression qu’ils étaient les auteurs de la politique pratiquée par les gouvernants ; mais les biographes ont tendance à oublier que les grands hommes prennent leurs décisions politiques sans attendre l’approbation des théoriciens.
Ainsi, lorsqu’on nous dit que des hommes comme le dignitaire bouddhiste Musô Kokushi influencèrent la politique des shôgun Ashikaga et lui donnèrent une certaine qualité zen, il faut considérer de telles affirmations avec prudence. Au commencement du bakufu d’Edo, on ne trouve rien qui prouve que Ieyasu consulta Razan en matière politique, ni même qu’il considérait la doctrine de Razan comme le confucianisme officiel. Sans être un érudit, Ieyasu avait une curiosité intellectuelle très vive, et un grand intérêt pour l’histoire ; mais ses sympathies allaient au bouddhisme, et (bien qu’il commandât de nouvelles éditions de classiques japonais et chinois) il est peu w vraisemblable qu’il s’intéressât aux subtilités du raisonnement philosophique chinois. Il est significatif qu’il ait donné l’ordre à Razan de se raser la £ tête et de porter une robe de moine, tenue traditionnelle d’un maître.
Nous ne pouvons entreprendre ici une étude approfondie de la philosophie néo-confucianiste par laquelle Razan fut guidé, mais nous devons en n ? relever du moins les grands traits avant de discuter la croissance du confucianisme en général durant cette période. La qualité la plus marquante du l . système de Zhu Xi est son rationalisme. Il ressemble d’une certaine façon au L : positivisme de Comte, en ce sens qu’il traite de faits établis et de phénomènes observables. C’est peut-être d’ailleurs ce qui attira les penseurs japonais. En dehors de sa simplicité, probablement plus apparente que réelle, les 2_ raisons qui le firent adopter au Japon ne sauraient être mieux formulées que par cet extrait du chapitre intitulé « Neo-Confucian Orthodoxy », des Sources of the Japanese Tradition (édité par William Theodore de Bary) : « Un autre trait important de la philosophie de Zhu Xi est son humanisme essentiel, qui, comme son rationalisme, vient de la tradition confucianiste primitive. Les doctrines morales de cette école sont centrées
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