Histoire du Japon
de la part du kanjö-bugyö (commissaire des finances) Hagiwara Shige-hide, qui se remplissait les poches en passant des accords secrets avec divers entrepreneurs. L’altération de la monnaie d’argent lui rapporta, dit-on, plus d’un quart de million de ryô. On savait que ses fraudes duraient depuis trente ans, mais personne n’avait osé le dénoncer jusqu’au jour où Hakuseki prit la plume et coucha par écrit des accusations qu’il ne put réfuter.
On peut se faire une idée de la dégradation de la morale officielle vers la fin du siècle à l’évolution du problème monétaire depuis les premières années du bakufu. Durant la période Keichô (vers 1615), la monnaie consistait en pièces d’or (dites « koban ») renfermant 85,69 % d’or pur et 14,25 d’argent pur, alors que les pièces d’argent de la même période contenaient 80 % d’argent pur. En 1695 (8 e année de la période Genroku), ces proportions avaient changé au point que le koban d’or ne renfermait plus que 56,4 % d’or, et les pièces d’argent 64,35 % d’argent pur.
Ce processus d’altération reflète un échec progressif de la politique financière du bakufu. A l’époque de Ieyasu et de Hidetada, une grande accumulation de capital s’était produite du fait des impôts, des bénéfices du commerce extérieur, de la production minière, et même d’économies faites dans le domaine administratif.
Sous Iemitsu, on avait dépensé environ la moitié de ce capital ; sous le quatrième shôgun (Ietsuna), les revenus et les dépenses ne s’équilibraient plus. Le grand incendie de Meireki causa des pertes très importantes, et le prix des secours et des réparations qu’il fallut assurer fut si lourd que les finances du bakufu ne l’assumèrent qu’avec difficulté. Cependant, les dépenses excessives dans lesquelles on avait commencé à se lancer à l’époque de Iemitsu ne firent qu’augmenter, notamment sous Tsunayoshi. Par ailleurs, la production des mines d’argent diminua, et les catastrophes naturelles qui se succédaient jointes aux détournements de fonds commis par des fonctionnaires malhonnêtes aboutirent à l’effondrement complet du système. C’est alors que, pour colmater les brèches, une première dévaluation monétaire fut décidée en 1695 comme mesure d’urgence. La cause immédiate en fut le besoin pressant de fonds pour la construction du coûteux sanctuaire et l’accomplissement des rites funéraires d’usage pour la mort d’un shôgun – en l’occurrence Ietsuna. Ce fut Hagiwara Shigehide qui proposa cette dévaluation à Tsunayoshi.
Selon les calculs de Hakuseki, cette opération rapporta plus de cinq millions de ryô au bakufu. Cependant, en 1695, le bakufu avait tenté de faire rentrer les anciennes pièces d’or et d’argent, mais sans grand succès. Et, bien que l’édit fût répété les années suivantes (1696 à 1702), il n’eut jamais que peu d’effets. Selon Hakuseki, plus de la moitié de l’or mis en circulation échappa aux efforts de récupération. Ce n’est là qu’une estimation, mais il est évident que le public n’avait qu’une confiance limitée dans la politique monétaire du bakufu.
1713 vit une nouvelle montée des prix. Diverses propositions furent faites au bakufu, parmi lesquelles les projets de Shigehide prévoyant la frappe d’une nouvelle monnaie. Le bakufu ne voulut rien entendre, Shigehide fut démis de ses fonctions, et ce n’est qu’à la fin de l’année, après la mort de Ienobu, que des mesures furent prises. Une réforme monétaire fut alors proposée, comprenant le retrait des koban de 1695 et une nouvelle émission de pièces d’or.
Le public se méfiant de la politique gouvernementale, responsable de l’avilissement des pièces d’or et d’argent ainsi que du changement du taux de valeur entre l’or et l’argent, on estima qu’il fallait en revenir aux normes de Keichô, ce qui restaurerait la confiance et entraînerait une baisse des prix. Un nouveau numéraire fut donc introduit en 1714. Il était de même qualité que la monnaie de Keichô, et son effet fut salutaire. Le prix du riz en argent, qui était resté assez stable de 1695 à 1710, augmenta rapidement à partir de cette date jusqu’en 1713, puis, avec la mise en circulation des nouvelles pièces, tomba brusquement et continua de descendre jusqu’en 1718, où il était d’un point plus bas qu’en 1695.
Le problème monétaire était
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