Histoire du Japon
C’était un point de vue naturel, car ils ignoraient les théories scientifiques, et l’accumulation d’objets utiles était dans leur esprit la meilleure façon d’améliorer l’économie nationale.
En 1757, Tamura Enyü, le collègue de Gennai, qui avait beaucoup voyagé à travers le Japon pour étudier la culture de denrées alimentaires d’appoint et d’herbes médicinales, ouvrit à Edo une exposition de produits importants. En fait, ce fut le premier exemple d’une exposition au Japon, et son succès fut partiellement dû au soutien énergique de Gennai. En 1762, ce dernier ouvrit une exposition à lui, consistant avant tout en articles touchant à la médecine. Le nombre des objets exposés alors et à d’autres occasions dans le courant de la même décennie atteignit un total de 2000, et ils provenaient de trente provinces. Dans son Butsurui hinshitsu, ouvrage de 1763 mentionné plus haut, certains parmi les plus importants objets exposés étaient décrits, avec des dessins et des explications.
La nature des objets exposés et les explications de Gennai montrent clairement que l’importance de son bussangaku réside dans le fait qu’il prévoit un accroissement planifié de la production et non pas seulement un effort indirect. Remarquons que, dans ses études européennes, Gennai eut le soutien de Tanuma, qui était en faveur d’un accroissement rapide de la production, tant agricole qu’industrielle.
Il est aussi possible que l’idée de Gennai de faire des objets un catalogue complet lui fut inspirée par la philosophie de l’école de Zhu Xi, pour qui on ne pouvait arriver à une compréhension de la raison universelle qu’en étudiant chaque chose et en collationnant les résultats de cette étude. En Occident, cet état d’esprit conduisit à la science, mais en Orient, il lui fallait combattre l’idée de soudaine illumination ou de religion révélée.
CHAPITRE LXIII
La réforme de Kansei
matsudaira sadanobu, 1758-1829
On donne parfois le nom de « réformes » à certaines phases récurrentes du gouvernement des shôgun Tokugawa à partir de la fin du XVIIie siècle ; mais ce terme est trompeur, car il donne l’impression que l’on a alors introduit une forme nouvelle et meilleure de gouvernement. Or ce qui a vraiment eu lieu, c’est un retour à un ancien système ayant produit de bons résultats mais tombé en désuétude pour des raisons économiques plutôt que politiques. Le modèle était le gouvernement dit de Kyôhô, mis en place par Yoshimune durant la période de Kyôhô (1716-1736).
En 1787, ce que l’on appelle la réforme de Kansei fit suite à son déclin. Cette année-là, le bakufu prit conscience de la nécessité de mesures constrictives devant l’incapacité du gouvernement à mettre fin aux révoltes paysannes et citadines. Le recours à la force armée permettait parfois d’obtenir un succès momentané dans une région limitée, mais pour les membres les plus sensés de la classe des guerriers, il était évident qu’il fallait remédier de façon pacifique aux causes de ces révoltes elles-mêmes, étant clair qu’elles étaient provoquées par des conditions que le peuple ressentait comme insupportables.
Un mouvement de réforme qui débuta fin 1787 se trouva stimulé par les intolérables privations dues à une succession de mauvaises récoltes. Au commencement de l’été de cette année-là, le riz était si rare qu’on le payait cinq ou six fois le prix normal. Les pauvres se soulevèrent, et des émeutes eurent lieu à Osaka d’abord puis dans certaines villes plus petites (voir ci-dessus chapitre lxii ). Quand elles se furent calmées, la question de la politique à venir fut soumise au conseil des Aînés, qui, cette même année (année de la chute de Tanuma) avait nommé pour président le jeune Matsudaira Sadanobu, daimyô de Shirakawa, dans le Mutsu.
Petit-fils de Yoshimune, Sadanobu était un fils du chef de la branche Tayasu de la famille Tokugawa, qui, adopté par la maison de Matsudaira, avait hérité du fief de Shirakawa, dont le revenu était de 110000 koku. Imbu d’idéalisme néo-confucianiste, il consacrait son énergie à améliorer son domaine, s’occupant en particulier de redonner vie aux villages ruinés par kes catastrophes successives. Au plus fort de la famine de Temmei (1783), les provinces du Nord eurent à souffrir plus que toutes les autres, il fit venir du riz en quantité à Shirakawa, grâce
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