Histoire du Japon
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Ainsi, la politique économique de Sadanobu connut un succès temporaire. Il introduisit certaines réformes monétaires simples, qui semblent avoir été une réussite. De son temps, c’est-à-dire de 1787 à la fin du siècle, il n’y eut pas de troubles sociaux dus à la pénuries de nourriture. Il y eut d’ailleurs de bonnes récoltes pendant plus de dix ans, et il limita la spéculation sur le riz en surveillant les grands marchands de riz d’ôsaka, et, au besoin, en les punissant sévèrement. Cette mesure fut temporairement efficace, et il poursuivit ses efforts pour garder les prix bas. Il prit des précautions contre la famine en ordonnant à tous les daimyô de constituer une réserve de riz en mettant chaque année de côté pendant cinq ans 50 koku par 10000 koku de revenu.
Il estimait que la cause fondamentale des prix élevés résidait dans un manque d’équilibre entre production et consommation, et il pensait pouvoir y remédier en limitant le commerce et en favorisant l’agriculture. Il supprima ou réduisit les corvées imposées jusque-là aux paysans, et fit entreprendre de nouveaux travaux de drainage, d’irrigation et de déboisement. En général, ces mesures furent bénéfiques, mais il commit une grave erreur en essayant d’arrêter le dépeuplement des villages au profit des villes. Il est très douteux que sa politique agricole obtînt jamais un réel succès. Tandis qu’il annonçait des bénéfices, les collecteurs d’impôts se montraient sans pitié 267 . Il est caractéristique de l’administration de Sadanobu que ses théories bienveillantes fussent rarement mises en pratique à fond.
Son édit de 1790 ordonnant aux paysans de retourner à la terre visait à réduire la population d’Edo pour augmenter celle des campagnes. Mais c’était une politique rétrograde dont on ne voit guère quels bons effets elle aurait pu avoir. Son principal intérêt est d’éclairer les qualités de Sadanobu en tant qu’homme d’État. En dépit de ses idéaux et de son travail acharné, il était à la merci de ses théories et manquait de sagesse pratique. Dans ses efforts pour en revenir à Ieyasu et à Yoshimune, il se montrait réactionnaire à une époque où le changement était inévitable. Ce qu’on appelle d’ordinaire la réforme de Kansei fut, c’est vrai, une phase de bon gouvernement dans l’intention, mais ce fut avant tout une période sans famines et sans catastrophes. Ainsi, s’il y eut alors de bons résultats, c’est grâce aux circonstances plus qu’à la politique.
Alors qu’il s’intéressait de très près au côté purement monétaire de l’économie nationale, il est clair que Sadanobu était aveugle à ses autres aspects. Il ne fit pas grand-chose pour encourager l’industrie ni le commerce. Il semble avoir considéré qu’une telle initiative eût entraîné une hausse des prix, ce qu’il était très inquiet de prévenir. Il écrivit un Essai sur les prix (Bukka- row), et le bakufu s’efforça de maintenir les prix bas eh manipulant le marché de l’or et de l’argent utilisés pour la monnaie. Cette tâche complexe n’eut qu’un piètre succès, et de meilleurs résultats furent obtenus en réglementant le marché du riz, base de l’économie. Toute tentative visant à « accaparer » le riz fut interdite sous peine de punition sévère.
Dans la mesure où les grands efforts de Sadanobu visaient une réforme permanente, sa politique ne fut pas un succès. Elle eut certains effets visibles durant quelques années entre 1787 et 1794, mais elle se fondit bientôt dans le grand flot des événements et ne laissa guère de traces. Jugée d’après ses résultats, ce fut un échec ; mais elle n’en eut pas moins une certaine importance dans le sens où elle marqua une étape historique dans l’évolution du bakufu, un changement dans la vision de ses fonctions.
LE BAKUFU ET LA COUR
On se souviendra qu’au XVIIe siècle les relations entre la cour impériale et le bakufu étaient amicales, mais que Yoshimune, quoique respectueux, ne prêtait guère attention au Trône. Vers 1760 toutefois, un puissant mouvement loyaliste inquiéta le bakufu, et en 1766, on punit un groupe de conspirateurs qui avaient ourdi un soulèvement. Un mouvement souterrain continua pourtant, pas tellement dans le but de restaurer le pouvoir de la maison impériale que pour assurer un revenu raisonnable à l’empereur et à ses nobles. En 1774,
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