Hitler m'a dit
le secret sur les circonstances de cet incendie était encore soigneusement observé dans le parti. Moi-même, je supposais que cet attentat était effectivement l’œuvre ou parti communiste ou tout au moins, de gens à la solde du Komintern. La vérité me fut brusquement révélée par les propos que j’entendis dans cette antichambre : les incendiaires n’étaient autres que les dirigeants du parti national-socialiste, Hitler avait été au courant du projet et l’avait expressément approuvé.
Le cynisme avec lequel 011 s’entretenait de cette machination dans le cercle étroit des initiés, avait quelque chose d’accablant. Éclats de rire de satisfaction, plaisanteries odieuses, fanfaronnades, telles étaient les réactions de ces « conjurés ». Goering racontait, avec force détails, comment ses « jeunes gens » avaient utilise un passage souterrain pour pénétrer dans le Reichstag, en partant du Palais de la Présidence ; ils avaient dispose de quelques minutes à peine et failli se faire prendre. Il regrettait que « toute la baraque » n’eut pas été complètement brûlée. Dans leur hâte, les braves garçons n’avaient pu terminer complètement leur joli travail. Goering termina son récit par cette exclamation qui en disait long : « Je n’ai aucune conscience ! Ma conscience s’appelle Adolf Hitler. »
Il est assez extraordinaire, quand on y réfléchit que ce crime inouï, dont les auteurs responsables finirent par être connus dans le public, n’ait jamais été juge avec la sévérité qu’il méritait même dans les milieux bourgeois. On semblait, au contraire, applaudir à ce « joli coup ». Il est plus extraordinaire encore que l’instigateur de l’incendie – dont le visage évoque de plus en plus le masque d’une vieille pierreuse défraîchie – ait trouve le moyen, malgré son crime avéré, de se concilier certaines sympathies à l’étranger, et cela jusque dans la période la plus récente. Certes, Goering a toujours eu une attitude assez opposée à celle d’Hitler, et dans le cercle de ses amis intimes, il ne s’est jamais gêne pour exprimer grossièrement son opinion sur le « fou efféminé ». Mais, dans les crises décisives, il s’est tenu toujours aux côtés du Führer. Il a fait incendier le Reichstag sur l’injonction d’Hitler, mais il en a revendiqué la responsabilité totale, de même qu’il a revendiqué celle des assassinats du 30 juin 1934, parce qu’il considérait Hitler comme trop timoré et trop indécis pour l’accepter. C’est là qu’est toute la différence entre Hitler et Goering. Hitler est constamment obligé de s’arracher à la léthargie et au doute et de s’exciter à une sorte de transe avant de pouvoir agir. Chez Goering, l’immoralisme totalitaire est devenu comme une seconde nature.
On nous introduisit dans le bureau d’Hitler. L’entretien fut bref. Le Führer commença par nous interroger sur la situation à Dantzig, puis il nous parla de sa position difficile dans le Cabinet. Il était d’ailleurs loin de prendre ces difficultés au tragique. Il se targuait, avec une superbe assurance, de rompre toutes les entraves et tous les liens dont on prétendait le gêner. En passant, il reprocha à Forster de n’avoir pas su mettre Dantzig au même pas que le Reich. Il déclara qu’il fallait avant tout affirmer la position du parti et que le reste viendrait tout seul : l’essentiel était d’agir sans aucun scrupule et d’aller de l’avant.
— « On m’a déconseillé d’accepter le poste de Chancelier du Reich aux conditions posées par le Vieux (le maréchal von Hindenburg), comme si j’avais le temps d’attendre que le petit Jésus me l’apporte pour Noël ! » La pièce où le Führer donnait ses audiences était à cette époque un bureau de petites dimensions. Il bondit de son fauteuil et tourna comme un ours en cage. – « Je sais ce que j’ai fait. Je vous ai ouvert la porte ! Maintenant, c’est l’affaire du parti de s’installer dans la place pour la victoire totale. »
Il s’agissait, dit-il, de transformer la position politique du national-socialisme, qui n’était forte qu’en apparence, en une position inexpugnable. « La réaction s’imagine m’avoir passé la chaîne autour du cou. Ils me tendront autant de pièges qu’ils pourront. Je sais qu’ils veulent m’avoir par usure. Mais nous ne leur laisserons pas le temps de passer à l’action.
Weitere Kostenlose Bücher