Il était une fois le Titanic
fait pas plus arrogant 41 ! »
Si la fiction ne s’embarrasse pas de nuances, elle prend sa source dans une certaine réalité. Ce tempérament était probablement la conséquence d’une grande timidité. Ce qui n’empêche pas de brosser de lui le portrait d’un administrateur zélé connaissant son métier, dans lequel il fit carrière dès l’âge de vingt-cinq ans. À tel point que, sous sa direction, « la prospérité de la White Star Line ne fut jamais plus grande 42 ». Le débat reste ouvert.
Une étoile à cinq branches
L’histoire de la compagnie étoilée remonte aux glorieuses années des pionniers de la vapeur. Et, bien que la Star ne fût pas la première compagnie à s’ouvrir au marché transatlantique, elle en est extrêmement représentative.
C’est en 1845, à Liverpool, que John Pilkington et Henry Threlfeld affrétèrent leur tout premier bateau sur la ligne de Boston. À sa poupe flottait pour la première fois le pavillon rouge frappé de l’étoile blanche de la White Star of Boston Packets’.
Entre l’Ancien et le Nouveau Monde, le transport des passagers suscitait alors de nombreuses vocations. Les armements 43 fleurissaient dans une totale anarchie, construisant à la hâte des paquebots sans confort, prompts à embarquer dans leurs entreponts, à n’importe quelle condition, les flots d’émigrants qui s’y entassaient sans protester contre l’inconfort et le manque d’hygiène. Les voyageurs étaient abandonnés à leur sort durant la traversée, les compagnies ne fournissant même pas leur subsistance. Au point que le New York Times scandalisa ses lecteurs en rapportant ce qui se passait à bord de ces « bétaillères ». Daniel Hillion a
repris dans L’Atlantique à toute vapeur 44 les propos tenus à l’époque par le grand quotidien : « Un fourneau, installé sur le pont, permettait aux émigrants de préparer des repas chauds quand le temps et l’allure du navire le permettaient, c’est-à-dire pas souvent. Pire, alors que l’équipage et les passagers des classes supérieures disposaient d’eau potable, ils ne pouvaient utiliser que l’eau résiduelle des appareils de chauffe et l’eau de mer… »
Après neuf ans d’exploitation sur l’Atlantique, Pilkington et Threlfeld se lancèrent à la conquête de l’Australie. Les affaires marchaient bien, mais la concurrence se faisait de plus en plus rude, obligeant les armements à moderniser leur flotte en permanence. Ce qui conduisit à de nombreuses faillites. D’autant plus que l’Allemagne était entrée dans la compétition, avec toute la force de son économie et l’ambition d’emporter le marché de l’émigration qui déferlait du nord et de l’est de l’Europe.
Épuisée par la course folle que lui imposait cette compétition sans merci, la White Star Line finit par déposer son bilan. Elle devait à ce moment-là plus d’un demi-million de livres aux banques.
Le père de Joseph Ismay, qui avait le démon des affaires, venait de s’associer avec un armateur du nom de Nelson. Cette compagnie ne possédait qu’un seul bateau, « mais qu’à cela ne tienne ! », se dit Thomas Henry. Il avait trente ans et la foi qui déplace les montagnes. Aussi, dès que son partenaire lui eut cédé ses parts, il se sentit libre et prêt à jouer le rôle de sa vie dans le métier.
En 1868, il racheta la White Star Line pour mille livres. Puis il convainquit l’un de ses amis, Christian Schwabe, de le rejoindre afin de constituer une nouvelle société sous le nom d’Oceanic Steam Navigation Company, à laquelle il accola celui de White Star dont il conserva l’emblème à l’étoile. Le 6 septembre 1869, l’accord était scellé.
Or il se trouve que Christian Schwabe, riche financier de Liverpool, était l’oncle d’un certain Wilhelm Wolff, copropriétaire d’un chantier de construction navale à Belfast. L’association, fortuite au départ, se révéla précieuse avec le temps.
En parallèle, Thomas Ismay développa d’autres armements, dont la société de transports Imrie & Company. Asseyant son autorité d’année en année, il deviendrait membre de l’association North Atlantic Steam Traffic, puis directeur de la North Western Railway Company.
Lorsqu’il mourut, Thomas Ismay laissait une entreprise en pleine prospérité. Au point de faire dire à l’empereur d’Allemagne que le monde maritime venait de perdre l’un de ses plus illustres membres et
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