Indomptable

Et les fauconneries sont propres, continua Simon.
    Mentionner les fauconneries était une erreur. L’expres-
    sion de Dominic se marqua de courbes sauvages.
    — Dieu gâte un seigneur paresseux, grogna-t-il. Tant
    recevoir et en faire aussi peu !
    Simon regarda sur le côté l’écuyer de Dominic, qui
    paraissait très contrarié. Simon ne blâmait pas le garçon.
    Très peu d’hommes avaient vu Dominic s’emporter. Aucun
    n’avait apprécié l’expérience.
    — Est-ce que tout se trouve à portée de main pour le
    bain de ton seigneur ? demanda Simon.
    L’écuyer acquiesça rapidement.
    — Dans ce cas, va chercher le souper de ton seigneur.
    Une chope de bière, peut-être. Plusieurs, en fait. De la viande
    froide. Du fromage. Est-ce que la cuisine a enfin préparé un
    pudding décent ?
    — Je ne sais pas, monsieur.
    38
    INDOMPTABLE
    — Va t’enquérir.
    — Et tant que tu y es, coupa Dominic, trouve où se
    cache ma fiancée !
    Le garçon quitta la pièce à toute vitesse, oubliant de
    refermer les tentures derrière lui.
    — Il a combattu les Turcs avec moins de frayeur, dit
    Simon alors qu’il replaçait les tentures de manière à se pro-
    téger des courants d’air qui venaient de la porte. Tu effraies
    cet enfant.
    Le son qu’émit Dominic était plutôt un grognement
    qu’une réponse.
    — Ton faucon pèlerin est-il souffrant ? demanda Simon.
    — Non.
    — Les fauconneries sont-elles mal entretenues ?
    — Non.
    — Devrais-je trouver une servante pour te donner le
    bain ?
    — Bon sang, non ! dit Dominic. Je ne veux pas de jeune
    femme au teint de lait s’apitoyant devant mes cicatrices.
    Lorsque Simon reprit la parole, son ton était aussi
    intransigeant que celui de son frère aîné.
    — Dans ce cas, peut-être as-tu besoin d’un peu d’exer-
    cice avec épée et bouclier ? suggéra doucement Simon. Je
    serais ravi de te faire les honneurs.
    Dominic pivota vers son frère et le jaugea du regard.
    La tension était palpable et, pendant quelques instants,
    Simon pensa qu’il aurait droit au combat qu’il avait
    suggéré.
    Tout à coup, Dominic laissa échapper un souffle
    puissant.
    — Tu sembles irrité, Simon.
    39
    ELIZABETH LOWELL
    — Je fais simplement de même que toi.
    — Hum, je vois.
    Sous la barbe de Dominic, le coin de sa bouche remonta
    légèrement.
    — M’aideras-tu à prendre mon bain, mon frère ? Pour
    se tenir dans mon dos, je n’ai confiance en personne d’autre
    dans ce château.
    — C’est ce que j’allais te proposer. Je n’apprécie pas que
    ta fiancée te fuie et que ton hôte soit « trop malade » pour te
    saluer de manière décente.
    — Oui, dit Dominic gravement.
    Dominic défit la grosse broche scandinave qui tenait sa
    cape en place et jeta l’habit fourré sur le tréteau qui se trou-
    vait près de la porte.
    La cape atterrit sur le petit coffre que Simon avait
    apporté dans la pièce et fit vaciller la flamme des bougies
    sur le chandelier. Sur la table se trouvait également un pot
    de savon doux.
    Simon souleva le couvercle et renifla.
    — Épices. Et un peu de rose, je pense.
    Il regarda Dominic avec affabilité, tentant de ne pas
    montrer son amusement.
    — Dieu me préserve, dit Dominic sèchement. J’aurai
    l’odeur du harem d’un sultan.
    Une lueur passa dans les yeux noirs de Simon. Il ricana
    derrière sa barbe blonde, mais prit garde de ne pas éclater
    de rire.
    Avec des mouvements rapides, Dominic se départit
    du reste de ses vêtements, continuant à ensevelir le petit
    coffre. Dans la lumière vacillante, la longue cicatrice qui
    40
    INDOMPTABLE
    barrait, en diagonale, son bras et son torse musclés, avait le
    même éclat nacré qu’une perle.
    Dominic entra dans la baignoire et s’assit, menaçant de
    faire déborder l’eau et de mouiller le sol. Il émit un gémisse-
    ment de plaisir tandis que l’eau chaude léchait sa peau, atté-
    nuant la douleur causée par sa vieille blessure qui se
    réveillait lorsqu’il était particulièrement fatigué.
    — Du savon ? demanda platement Simon.
    Dominic tendit la main. Un morceau visqueux de savon
    atterrit dans sa paume. Une fragrance qui lui paraissait
    familière flotta jusqu’à ses narines. Fronçant les sourcils,
    essayant de se souvenir où il avait déjà senti cette odeur,
    Dominic commença à répandre le savon dans ses cheveux
    et sur sa barbe.
    — Maintenant, dit-il à travers la mousse, parle-moi de
    ces inepties à propos de la malédiction qui