Interdit
avant même de s’être donnée à Duncan
sous le sorbier sacré. Deviné, mais sans certitude.
Maintenant, elle était sûre.
Trop tard.
— Parce que vous ne pouvez m’aimer véritablement
avant que les ténèbres ne se soient dissipées, murmura-
t-elle. Et lorsque ce sera le cas, vous ne m’aimerez plus du tout.
Sa main quitta ses lèvres. Sachant qu’elle ne le devait
pas, mais incapable de résister, elle posa sa bouche sur la
sienne.
— Cela n’a aucun sens, dit Duncan en scrutant son
regard troublé. Votre chute vous a embrouillée.
355
ELIZABETH LOWELL
— Non. Elle m’a fait voir clairement combien je vous ai
trahi au nom de votre protection.
— Trahi ? Balivernes. Vous m’avez sorti des ténèbres.
Secouant lentement la tête, ignorant les larmes qui cou-
laient sur ses joues, elle se força à avouer à Duncan ce qu’elle
ne pouvait plus nier.
— Lâchez-moi, sombre guerrier. Votre passé vous
entoure.
— Que voulez-vous dire ?
— Laissez-moi.
Perplexe, il ouvrit ses bras pour la relâcher. Elle s’assit.
Elle aurait voulu se lever, mais elle savait que ses jambes ne
la supporteraient pas.
Comme Duncan, elle était en conflit avec elle-même,
sachant ce qui devait être et le rejetant du même coup.
— Maintenant que nous ne nous touchons plus, ne
voyez-vous pas ? demanda-t-elle d’un air désolé.
— Je ne vois que vos larmes.
— Alors, écoutez mes paroles. La sorcière Druide de la
Vallée est votre amie d’enfance.
— Je sais. Meggie.
— Le chevalier aux cheveux blonds et aux yeux noirs
qui me hait tant… Le connaissez-vous ?
Duncan regarda Simon.
— Oui. C’est Simon, qu’on appelle… « le Loyal » ! s’écria
Duncan avec triomphe. Oui ! Je le connais !
— Et envers qui est-il loyal ? demanda-t-elle
doucement.
— Son frère.
— Qui est le frère de Simon le Loyal ?
356
INTERDIT
Soudain, Duncan bondit sur ses pieds et fit face au
grand et puissant chevalier qui le regardait de ses yeux aux
couleurs de la pluie d’hiver, l’épée à moitié tirée de son
fourreau.
— Dominic le Sabre, dit-il.
Le chevalier hocha la tête.
— Et qui êtes-vous, sombre guerrier ? murmura Ambre
avec désespoir. Quel est votre véritable nom ?
Duncan ferma les yeux et essaya de parler. Les ténèbres
livraient un combat acharné contre les souvenirs brillants
qui s’associaient enfin, formant une tapisserie de savoir
fragment par fragment, jusqu’à ce que les ténèbres ne puis-
sent plus cacher le motif incandescent de la vérité.
Lorsqu’il rouvrit les yeux, Ambre fut reconnaissante de
ne plus le toucher.
— Je suis Duncan de Maxwell, le Fléau Écossais, dit-il
avec férocité.
Dominic hocha de nouveau la tête.
— Je suis Duncan de Maxwell, intendant d’Erik le
Sorcier dans le château même que vous, mon seigneur légi-
time, m’avez donné à garder en fief pour vous.
Dominic aurait voulu parler, mais il n’en eut pas l’occa-
sion. Les mots de Duncan continuaient à tomber comme
une pluie amère. La fierté, l’humiliation et la rage qu’il avait
en lui étaient presque palpables.
— Je suis Duncan de Maxwell, un homme ruiné par
une sorcière aux yeux d’or et à la langue mensongère. Je
suis Duncan de Maxwell le Parjure.
357
c 18
Repliée sur elle-même, muette, Ambre observait les
hommes charger le reste de l’équipement du camp sur
les chevaux.
— Pouvez-vous monter sans qu’on vous aide ? demanda
Meg.
— Oui.
— Bien. Nous ne voudrions pas vous faire de nouveau
du mal.
— Et Duncan ne supporte plus de me toucher, dit-elle
calmement.
Meg hocha la tête à contrecœur. Elle voyait bien le
désarroi de la jeune femme. Ambre était pâle, et la douleur
se lisait sur son visage.
— J’ai déjà vécu sans toucher personne, dit Ambre. Je
vais refaire de même.
— Avant vous ne connaissiez pas…
La voix de Meg se brisa.
— Oui. La connaissance est ma punition.
Ambre avait la voix empreinte de noirceur. Meg eut un
élan de sympathie pour elle.
— Je suis désolée, dit-elle.
— Ne le soyez pas. Désormais, je préfère vivre sans être
touchée plutôt que de l’être par Duncan.
— Jamais il ne lèverait la main sur vous.
— Il n’en aurait pas besoin. Je sens sa rage comme des
ailes noires battant contre mon âme.
ELIZABETH LOWELL
Instinctivement, Meg tendit la main pour la réconforter.
Puis, elle se souvint que la jeune femme ne ressentirait
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