Jack Nicholson
voiture chez l’acteur et lui avait serré la main en lui disant que son scénario était « juste comme il fallait », son imagerie étant du même niveau que celle de Fellini. Bruce Dern trouvait lui aussi le script originel « tout simplement sensationnel », doté de « quelques idées visuelles originales que personne n’avait jamais testées avant ».
Malheureusement, ce script était trop long. Et Nicholson ne put assister au tournage de The Trip, qui eut lieu au cours du printemps 1967. Corman insista pour que des modifications soient effectuées ; il voulait des dialogues plus terre à terre, moins de symbolisme. Susan Strasberg se souvient par ailleurs avoir vu le réalisateur-producteur arracher des pages sur le plateau pour gagner du temps et de l’argent.
Certaines scènes furent filmées à Paris (par Pierre Cottrell) et à Londres (par l’une des personnes qui se trouvaient dans les coulisses du Magical Mystery Tour des Beatles, Peter Theobald). Fonda devait ajouter des séquences tournées à New York, mais Corman annula le budget et l’idée de tour du monde fut abandonnée. Fonda et Corman se disputèrent amèrement. Et quand le producteur-réalisateur, comme il en avait l’habitude, quitta le plateau avant la fin du tournage pour aller superviser un autre film, il délégua les décisions de post-production à d’autres.
Fonda, Hopper et Jack furent complètement écœurés par la forme de compromis que prit au final The Trip. Et Corman lui-même exprima de la colère face à la fin arrêt sur image qui avait été dictée par les gros bonnets d’ AIP , inquiets à propos du contenu pro- LSD .
Mais il n’y avait pas d’inquiétude à avoir. Au moment de sa sortie, The Trip reçut beaucoup d’attention. Le film généra quelques réactions négatives (il fut censuré au Royaume-Uni), mais reçut globalement beaucoup de commentaires positifs de la part de la critique, agréablement surprise. The Trip trouva des admirateurs à Hollywood pour son ambition sincère tout autant que pour ses effets visuels – l’extravagante rêverie provoquée par la drogue chez le personnage principal – inspirés à la fois par Fellini, par Bergman, par des scènes de la Bible, et en partie créés, visiblement, à partir de séquences de précédents films d’horreur d’ AIP .
Le message pro- LSD ressort de façon claire et nette. Le personnage principal (tout comme Jack) traverse au cours de son trip une mort et une renaissance symboliques puis redécouvre sa capacité à vivre et aimer. Son trip (tout comme celui de Jack) est en partie paranoïaque et dangereux, mais globalement heureux, très lié à une sexualité rendue meilleure par l’ouverture de la perception (suggéré par les mouvements furtifs de la caméra au-dessus de la peau nue).
Pour toute personne disposée à prêter attention à autre chose que le message pro- LSD et les merveilles techniques, The Trip révèle un parallèle entre l’épanouissement de Nicholson en tant que scénariste et son épanouissement en tant qu’acteur : l’homme se montre plus ouvert, plus expressif, parfois confessionnel.
Discrètement, à cette époque, Nicholson quitta la William Morris Agency pour la plus petite Bob Raison Agency, qui, depuis des années, représentait des personnalités plus iconoclastes telles que la grand-mère chanteuse de rock Mrs (Elva) Miller, les Bottoms Brothers, Michelle Phillips et Dennis Hopper. Jeff Corey, rescapé de la liste noire grâce aux efforts de représentation acharnés de Raison, faisait également partie des clients de l’agence.
Trouver le bon agent était toujours un problème pour Jack. À la William Morris, la plus grande agence de la ville, on racontait une blague sur Nicholson : on disait que tous les soirs, à six heures, le téléphone sonnait, mais que personne ne voulait répondre car tout le monde savait que c’était Jack qui appelait « juste pour vérifier ».
La vérité, c’était que le temps de Jack n’était pas encore venu, et que Raison lui-même ne pouvait le faire avancer. Jack était toujours difficile à vendre. Et ce même si, en faisant la tournée des castings (sans parler de celle des fêtes), il croisait le chemin des meilleurs et des plus brillants jeunes réalisateurs.
Comme tous les autres acteurs disponibles de la ville, Jack auditionna pour le premier rôle du film de Mike Nichols, Le Lauréat. Il n’arriva même pas à l’étape de la seconde
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