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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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milice.
    â€” Le colonel n’est pas homme à se laisser influencer par des menaces, remarqua Marguerite.
    â€” Je suis persuadée qu’il a choisi mon frère pour ses qualités, et non par favoritisme. Mais je ne crois pas que les Niverville et les Lukin voient les choses de cette façon.
    â€” Monsieur Lukin est un parent de monsieur Vassal de Monviel? Comment cela se fait-il?
    â€” C’est un lien bien ténu, expliqua Emmélie. Tu te rappelles que madame de Niverville mère était une Baby? Les Baby sont apparentés par alliance aux Perrault et le capitaine Perrault est le beau-frère de Vassal de Monviel. Les liens de famille comptent pour l’octroi des postes qui rapportent dans les bataillons de la milice d’élite.

    Emmélie partie, Marguerite reprit son ouvrage abandonné. Mais il lui était impossible de bien se concentrer pour faire les points invisibles destinés à raccommoder la culotte d’un des garçons. Dans sa tête, ses pensées se livraient à une course désordonnée. L’arrivée d’Alexandre avait interrompu Emmélie. N’avait-elle pas dit qu’elle partageait ses appréhensions à propos du fils Rouville? Que savait-elle exactement?
    Son secret s’éventait… Que ferait-elle, s’il parvenait un jour aux oreilles d’Alexandre? Elle redoutait ce moment et faisait tout pour qu’il n’arrive jamais. Laissant tomber son raccommodage, elle se dirigea vers la cuisine pour voir aux repas de la journée. Marguerite avait grandement besoin de se changer les idées.

    Ã€ la ferme des Lareau, sur le chemin de la Petite Rivière, Victoire ne décolérait pas.
    â€” Nous sommes des cultivateurs, pas des soldats! pestait-elle furieusement. Laisse donc ça aux gars de la ville qui sont sans ouvrage. Ceux-là, ils ne savent pas quoi faire de leurs dix doigts. Tu aurais dû nous en parler avant. Jamais je n’aurais donné mon accord, ajouta-t-elle, oubliant que son fils, majeur, pouvait se passer de sa permission.
    â€” Mais vous étiez là, l’autre dimanche, à la porte de l’église, quand le capitaine de milice a lu l’annonce: braves et loyaux compatriotes, le sang qui animait vos pères coule encore dans vos veines, pour le salut de vos propriétés et de votre religion, rappela le jeune homme, déçu de la réaction de sa mère.
    Â«C’est vrai», se dit Victoire qui s’en voulait maintenant de ne pas avoir prêté plus d’attention aux réactions de Godefroi quand on lisait l’appel de volontaires pour le corps des Voltigeurs. Godefroi, qui répétait à qui voulait l’entendre que sa sœur Marguerite avait assisté au mariage du major Salaberry. Jamais elle ne s’était doutée que cet enthousiasme se traduirait par un engagement.
    â€” Et qui m’aidera à faire les moissons? demanda avec aigreur Noël, l’aîné des fils, qui faisait désormais office de chef de famille depuis que ses parents lui avaient fait donation de la terre et de la ferme.
    â€” Sacrédié! intervint François Lareau. Je ne suis pas encore bon pour la tombe.
    Noël observa son père. François Lareau avait passé toute sa vie à cultiver la terre et à prendre soin des troupeaux à la ferme ancestrale des Lareau, sur le chemin de la Petite Rivière, ce qui ne l’avait jamais empêché de s’intéresser à ce qui se passait ailleurs, à Québec ou à Montréal. Il avait beaucoup vieilli, ces derniers temps, et se plaignait à l’occasion de rhumatisme que n’arrivait pas à soulager le docteur Talham. Mais dans le regard bleu de l’habitant, brillait une lueur d’orgueil.
    â€” Pour ma part, je suis fier que tu défendes notre pays, dit-il à son cadet. Si c’est pas beau! Un régiment uniquement composé de courageux Canadiens, tous nés au pays! J’te comprends pas, ma femme. Faut encourager notre Godefroi.
    Il se tourna vers l’aîné.
    â€” Toi, Noël, tu es marié. Personne ne viendra te chercher. Mais dans le cas de Godefroi, aussi bien qu’il s’engage volontairement.
    â€” Mais il devra aller se battre! poursuivit Victoire. Là-bas, en Europe, on dit qu’il en meurt des milliers comme notre Godefroi. Ces jeunes-là, ils ne savent rien de la guerre. La faim,

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