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Khadija

Khadija

Titel: Khadija Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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soient exaucés leurs vœux.
     
    Les premiers cris, ceux des enfants, s'élevèrent dès que les chamelles furent à portée de voix des tentes. Les femmes accoururent. Les youyous de bienvenue strièrent l'air proche du crépuscule. Khadija ordonna qu'on rabatte les dais voilant les palanquins. Elle apparut aux yeux de tous, rendant saluts et sourires. Sous la houle des voiles agités, des chevelures en désordre, elle distinguait ici et là un visage connu et le gratifiait d'un signe de reconnaissance. Derrière elle, Barrira ne quittait pas la mine sévère qui avait fait sa réputation dans Mekka.
    Chacun ici vénérait celle qui était marchande comme un homme. Plus d'une fois l'an, Khadija les avait fait vivre en leur achetant ce qu'ils parvenaient à produire : des fruits de la terre, des tissages, des tressages, des onguents et des poudres de couleur, du petit bétail sur pied ou déjà devenu viande, laine, cuir.
    Dans un grand charivari d'appels et de joyeuses salutations, les enfants bédouins coururent aux côtés des bêtes jusqu'à l'enceinte de la cité, où il leur était interdit de pénétrer. Leurs petits corps vifs à demi nus, gris de poussière et roux de crasse jusqu'aux tignasses, s'immobilisèrent en une haie parfaite, respectueuse. Les gardes, nimcha à la taille, lance au poing, ouvrirent en grand les vantaux bleus. Ils n'avaient nul besoin de contrôler l'arrivante. Depuis le matin, le murmure magique du désert avait annoncé le retour de la saïda Khadija.
    Sans ralentir, la caravane pénétra dans le calme de la cité. Les cliquetis des harnachements, le grincement des bâts et des paniers, le martèlement des bêtes résonnèrent dans l'ombre déjà fraîche des ruelles.
    Les plus belles maisons, ici, étaient d'immenses enclos dissimulés par des murs deux fois plus hauts qu'un homme et sans autre ouverture qu'une unique porte à double battant. Adossées et comme semées tout au long de l'enceinte, des pièces basses, chambres, cuisines, entrepôts, étables et resserres cernaient une cour centrale. Parfois, celle-ci était pavée avec soin, ornée d'un vieil arbre abritant une citerne sous sa frondaison. Les chambres des serviteurs et des esclaves, souvent d'obscurs dortoirs où s'entassaient les nattes, étaient seulement meublées de l'indispensable. Celles des maîtres jouissaient d'espaces spacieux, d'amas de coussins, de coffres, de tables basses, de tapis et d'alcôves tendues de lin frais sous des plafonds peints d'un bleu qui rappelait les ciels de l'aube.
    Dans la demeure de Khadija, certaines de ces enfilades de pièces ne donnaient pas directement sur la cour, mais sous une sorte de portique aux longues arches qui les protégeaient habilement du soleil. Contrairement à celles de Ta'if, aucune de ces pièces, pas même celles de Khadija, ne possédait d'étage. Les terrasses des toitures, ici, servaient au séchage du linge, des graines ou des bottes d'alfalfa pour le tressage des paniers, nattes et tentures.
    Khadija n'alla pas directement à sa maison, où les serviteurs qui ne l'avaient pas suivie à Ta'if l'attendaient avec impatience sur le seuil. Abdonaï conduisit la caravane sur l'esplanade de la Ka'bâ. Une foule s'y pressait déjà. Dans Mekka, les retours des puissants étaient un spectacle dont personne ne souhaitait se priver. Ceux de Khadija, plus rares, car elle ne quittait la cité qu'une fois l'an pour Ta'if, étaient des plus prisés. Chacun cherchait à deviner son aptitude de femme à tenir un rang d'homme. Chaque fois, c'était l'occasion de belles palabres et de prédictions sur son obstination à demeurer veuve.
    Cette fois, cependant, Abdonaï, sans rien en montrer, remarqua que la foule était plus abondante et, semblait-il, plus avide que d'ordinaire.
    La chamelle blanche s'agenouilla à distance des murs de la Ka'bâ. Khadija quitta son palanquin avec assurance, feignant d'ignorer les regards qui guettaient chaque expression de son visage, le moindre de ses gestes.
    Elle franchit les cercles des idoles, s'approcha de l'angle est de la construction et se recueillit devant la Pierre Noire extraite des ténèbres de l'univers par Hobal, le puissant protecteur de Mekka. Sa présence pleine de mystère avait donné naissance à l'union du premier homme et de la première femme, racontait-on.
    Khadija ferma les paupières. Ses lèvres tremblèrent sur des paroles que nul ne put entendre ou deviner, pas même ceux qui avaient pris soin de lui faire

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