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Kommandos de femmes

Kommandos de femmes

Titel: Kommandos de femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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protéger et de les aider.
    — Souvent souffrante, je dus à trois reprises faire des séjours à l’infirmerie. Les infirmières étaient des prisonnières allemandes ou polonaises sans aucune compétence ; d’ailleurs, on manquait de médicaments… Cependant, le séjour à l’infirmerie nous évitait l’appel du matin et du soir, dans le froid ou la neige ; nous étions allongées et économisions nos forces… Quand il y avait trop de malades, on opérait des sélections : les moins malades, les récupérables étaient renvoyées d’autorité au travail, les « bouches inutiles » éliminées par une piqûre de benzine au cœur. Une infirmière belge avait réussi à se faire embaucher à l’infirmerie pour aider ses camarades belges et françaises ; à mon troisième séjour, en février 1945, elle vint m’enlever précipitamment, m’habilla et m’envoya à la corvée d’épluchage, déclarant que j’étais guérie et que le lendemain je devrais reprendre le travail à l’usine. En effet, ma compagne de châlit, qui revenait de sa piqûre, se mourait déjà : on avait ordre de vider toute une salle. J’avais échappé de peu à l’extermination.
    *
    * *
    Les Alliés xlii avançaient rapidement.
    L’ordre est venu de nous évacuer.
    C’est en grande partie dans ce dernier transport, véritable convoi d’extermination que sont mortes beaucoup de nos camarades. Du 10 avril au 2 mai, par une chaleur atroce, sans vivres, sans air, sans eau, nous avons été évacuées dans des wagons à bestiaux.
    Depuis quelques jours l’avance des alliés sur Magdebourg et Brunschwig précipitait les ordres et les contre-ordres au sujet de notre évacuation. La veille de notre départ, on arrêta le travail à midi. Au sortir de la mine, les travailleurs allemands et étrangers, les femmes, les enfants, tous endimanchés nous regardèrent défiler curieusement comme s’ils ne nous avaient jamais remarquées.
    Un soleil radieux donnait l’impression des préparatifs pour une grande fête ou mieux pour un départ en vacances. Soldats, Aufseherinnen allaient et venaient valises à la main ou sacs au dos. Des autos, des camions circulaient bondés de fuyards ou simplement d’objets hétéroclites. Dans notre block, « Radio-Bobard » de minute en minute annonçait :
    — Ils ne sont plus qu’à huit kilomètres…
    — Non dix !
    — Non, on m’a affirmé qu’ils ont passé la grande route.
    Et toujours nous interrogions :
    — Crois-tu que nous allons être évacuées ?
    — Mais non, tout est coupé. D’ailleurs il n’y a plus de trains. Et puis tu ne vois pas leur tête… Ils seront là demain.
    — Demain…
    Hélas, le soir même il fallut se coucher tout habillées, prêtes à partir. Six heures nous trouva debout dans la cour. En silence bien entendu.
    Le Blockführer, du bout du bâton, nous compta tel un marchand de bestiaux. Puis ayant fait vider tous les casiers et les armoires du magasin d’habillement, il nous obligea à nous charger d’énormes ballots de vieux linges et de vieux vêtements. « Il ne tombera rien entre les mains de l’ennemi », dit-il (sic…). Puis, cinq par cinq, dûment encadrées, nous avons quitté le camp en direction de la gare. Lugubre défilé, grotesque et pitoyable cortège de ces trois mille femmes que l’on embarquait précipitamment afin de les conduire au grand camp de Neuengamme, près de Hambourg, pour y être gazées. Et le bruit du canon se rapprochait toujours. Derrière nos bourreaux, nous avions aperçu quelques tanks qui manœuvraient dans la campagne. Le soleil était radieux, demain ils seraient là. Quelle fête… Mais le convoi après une nuit d’attente sur une voie de garage s’ébranle lentement. Les Alliés arrivaient…
    Le voyage commençait. Durant les premiers douze jours, neuf cents sur trois mille devaient mourir.
    Ce fut atroce. Cent dix à cent vingt personnes par wagon, dans ces wagons que vous connaissez bien, sur lesquels vous voyez inscrit : chevaux : 8 ; hommes : 40. Nous y étions cent vingt vivantes et mortes, françaises et allemandes, polonaises ou juives. Essayez d’imaginer, de concevoir ce que put être la souffrance physique et morale de ces femmes pendant trois semaines. Les nuits surtout étaient terribles. Le train stationnait, la chaleur devenait suffocante, l’obscurité se peuplait d’ombres effrayantes. Les sinistres lueurs des incendies alentour découpaient des silhouettes de

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