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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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aujourd’hui, me voilà rassuré. La pénitence est terminée, n’est-ce pas ? Tu vas reparaître au grand jour, passer chez le barbier et relancer ton enquête avec ardeur…
    — Veux-tu, je te prie, Pistol, abandonner ce ton déclamatoire qui te caractérise, mais éreinte ton auditoire ?
    — Très bien, je m’exécute. Toutefois, je t’apportais des nouvelles de notre homme, mais si...
    — Lequel ?
    — Peste ! Celui que tu m’avais en d’autres temps, peut-être au siècle précédent, demandé de pister en tête de liste : le chevalier de Rohan.
    — Et alors ?
    — Si nous allions nous restaurer avant de tomber d’inanition ? Je connais une petite auberge où la poularde rôtie dans sa graisse est divine. Tes joues creuses sous ta broussaille m’annoncent pas moins de dix jours de jeûne. Suis-je loin du compte ?
    — C’est d’accord. Je passe un habit plus convenable et nous descendons. Tu me résumeras tout cela en trois phrases devant une bonne bouteille.
    — Voilà une excellente parole !
     
    La poularde et le dîner étaient à la hauteur de la propagande qu’en fit l’intarissable bavard tout au long du chemin menant à Saint-Michel, rue des Poitevins. Fort heureusement car, dans son humeur maussade, Géraud s’en serait retourné au moindre accroc.
    — Rohan est aux abois, délaissé par ses amis d’autrefois, harcelé par les créanciers, attaqua Pistol entre de copieuses bouchées et un verre de nectar. Depuis le camouflet de Maëstricht, tout un chacun bien informé estime qu’il s’est définitivement fâché avec le roi. Si bien que, privé de revenus pour entretenir son train de vie somptueux et dispendieux qu’il ne saurait restreindre, il a recours à toutes les extrémités, jusqu’à se lier avec des alchimistes qui se disent en mesure de transmuter le plomb en or et de multiplier par cent ses derniers écus. On raconte qu’il se serait procuré une baguette divinatoire susceptible de détecter cette « poudre de protection », mystérieux arcane qui change tout en métal précieux.
    — Comment peut-on être prince et aussi naïf ?
    — Les savants ont découvert, il y a fort longtemps – mais se gardent d’en dévoiler le secret par crainte d’y perdre leur tête –, que l’intelligence n’est pas une qualité absolument inhérente à la naissance et qu’elle peut être semée aux quatre vents, se perdre dans des terres arides ou germer comme par miracle dans la cervelle en friche d’une petite gueuse.
    — Où veux-tu en venir, intarissable papotier ?
    — Reprends de ces pois à l’échalote… Parfois, Rohan croit en Dieu, mais il est dévoré par une peur panique du diable ; c’est confirmé : manque évident d’instruction, il suffit de lire ses missives, gribouillées dans un vocabulaire approximatif. Il est capable d’élans de tendresse et de charité – de moins en moins souvent, d’ailleurs – mais sait se montrer obséquieux, voire odieux dans l’instant suivant. J’en arrive par ce chemin tortueux à dire qu’il faut toujours chercher la femme et que j’ai repéré celle qui, aujourd’hui, retient ses faveurs, une charmante petite de bonne souche : trop amoureuse pour ne pas voir qu’il abuse d’elle, la maltraite, la trompe à l’occasion, l’avilit, sans pour autant qu’elle parvienne à le quitter car il garde un pouvoir de séduction presque intact malgré sa déchéance dont il est responsable.
    — Quand respires-tu ?
    — Voilà qui est fait !... Buvons à la vie. Cette beauté s’appelle Renée-Maurice d’O de Villiers – à ne pas confondre avec ta conquête la marquise de Villars – demoiselle d’honneur de Madame Henriette. Ils se cloîtrent à Saint-Mandé dans un nid douillet nommé « la logette du diable ». N’est-ce pas croquant ?
    — Dans ce labyrinthe, je ne distingue toujours pas ton objectif, à moins que tu ne m’apportes une preuve de la compromission du chevalier dans la mort de d’Artagnan.
    Ils devaient s’interrompre souvent car la salle était exiguë, les clients nombreux et le service dérangeant par les allées et venues empressées des serveuses qui louvoyaient entre les tables.
    — J’en connais des plus haut placés qui s’en seraient accommodés pour embastiller l’encombrant et capricieux personnage, avant que sa déraison, ses extravagances, ses abus en tout genre et son enragerie ne l’entraînent à des extrémités dommageables.
    — Le

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