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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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Dieu seul sait pourquoi…
    Le coroner termina la phrase à sa place :
    – Soit que le poison ait été obtenu par quelqu’un
qui peut entrer et sortir à sa guise du château.
    – C’est ça ! Ce qui nous conduit à Limbright,
peut-être à sa fille, toute simple qu’elle soit, à notre bon et célèbre médecin
Aspinall ou, même, à Sir Maurice.
    – Je ne crois pas que Maltravers soit un
empoisonneur. C’est un soldat et un combattant.
    – Non, non, Sir John, c’est un serviteur du
régent. En campagne, il est peut-être une personne différente : équipé
pour la bataille, il fond sur les ennemis et les frappe. Mais loin de l’action,
il ressemble à un destrier nerveux, réduit à quelque tâche domestique.
    – Donc ? demanda Sir John, agacé. Expliquez-vous,
mon frère !
    – Il y a, à Londres, un riche marchand, Sir
Thomas Parr. Jean de Gand pourrait l’acheter en proposant à sa fille la main d’un
prince, mais il ne le fait pas. À la place, il soutient un prétendant courageux
mais pauvre.
    – En échange de quoi, Maltravers fera tout ce que
veut Gand ?
    – Il se peut.
    – Mais pourquoi, mon bon moine ?
    – Frère, Sir John.
    – C’est la même fichue chose ! Pourquoi Gand
désirerait-il le trépas des Français ? Non seulement il gagnera une grosse
somme avec leurs rançons, mais encore il les tient loin de la mer et de la
flotte anglaise.
    – Ce pourrait être une raison suffisante, contra
Athelstan, qui se rendit compte que son ami ne pouvait le croire.
    – Venez, mon frère, allons voir Sir Thomas Parr.
    Ils traversèrent les champs et laissèrent la voie libre
à un groupe de cavaliers qui, leurs habits chamarrés brillant au soleil, passèrent
en riant et en plaisantant dans un bruit de tonnerre. Devisant entre eux, ils
jetèrent à peine un coup d’œil au gros coroner et au dominicain. Des gerfauts
et des faucons pèlerins, au capuchon baissé et aux jets cliquetant comme des
clochettes magiques, étaient perchés sur leurs poings. Derrière eux se bousculaient
chiens de chasse et mastiffs avec leurs piqueurs. Sir John plissa les paupières
en les regardant s’éloigner.
    – Ils vont dans les marais, commenta-t-il. J’ai
pitié des pauvres hérons. C’est ça qui ne va pas dans cette ville, Athelstan :
les riches ne se soucient de rien et les pauvres, tapis dans leurs masures, les
épient en pensant aux armes qu’ils ont dissimulées sous les planchers crottés.
    Athelstan lui jeta un regard inquiet.
    – Avez-vous peur, Sir John ?
    – Il en serait de même pour vous, mon frère, si
vous aviez lu ce que j’ai lu.
    Comme pour confirmer les paroles du magistrat, le
soleil disparut derrière un nuage et une ombre soudaine couvrit la campagne.
    – Vous croyez que la grande révolte ne va pas
tarder à éclater, n’est-ce pas ? interrogea le dominicain.
    – J’en suis sûr, mon frère, mais Gand et sa bande
ne veulent rien entendre. Souvenez-vous de la France, dit-il en ramenant son
secrétaire sur le sentier. Les Anglais, Athelstan, ne font pas confiance aux
chevaliers, mais aux francs-tenanciers, aux fermiers et aux paysans avec leurs
grands arcs. Depuis que nous avons été boutés hors de France, à l’exception de
Calais, tous ces soldats sont rentrés chez eux où ils rongent du pain dur et
boivent de l’eau saumâtre. Les hommes de l’ombre, les espions du régent, affirment
qu’armes et équipement ont été introduits en ville. Qui plus est, les chefs des
paysans ont des alliés ici qui devraient être plus avisés : ils sont
persuadés qu’ils peuvent gagner en divisant les paris et en plaçant des sommes
égales sur chaque cheval.
    – Ce qui signifie ?
    – Si la révolte échoue, ils soutiendront Gand, mais
si les rebelles s’emparent de la cité, prennent la Tour et marchent sur
Westminster, alors ceux qui sont terrés dans leur cachette en sortiront, prêts
à rallier la Grande Communauté.
    Athelstan s’arrêta. Il observa les cavaliers qui
disparaissaient au loin. Il avait toujours redouté cette situation : prêtre
à Southwark et veillant sur sa paroisse, il avait ouï les rumeurs et les ragots
qui, sous la gaieté et l’affairement de la vie, couraient dans les ruelles
malodorantes. Il régnait un profond sentiment d’injustice et, parfois, on
rappelait cette formule : Quand Adam bêchait et qu’Ève filait, qui, alors,
était un noble ?
    – Venez, mon frère, allons rendre visite à Sir
Thomas Parr. Je

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