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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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Canadiens français, nous allons perdre toute
     autorité sur le peuple ». Le roi de répondre : « Nous ne pouvons donner notre
     aval à une flagrante injustice. » « Bien sûr que non, de rétorquer le premier
     ministre, mais vous pouvez adopter une position neutre et nous laisser régler ce
     litige à notre façon… »
    En souriant, Julianna avait imaginé la scène. C’était ce côté de Henry qu’elle
     aimait le plus et qui l’avait fait frémir. Quand la passion l’emportait sur le
     calme de l’avocat, quand elle sentait dans les propos de l’homme tout son
     engagement, elle frémissait encore.
    François-Xavier ne parla guère. Il avait pris une branche et
     jouait distraitement dans le feu, les yeux fixés sur les flammes. Henry expliqua
     à nouveau toute la complexité de cette tragédie. Ce n’était pas la première fois
     et certainement pas la dernière que des gens étaient expropriés pour laisser
     libre cours au progrès. Cela était dans la normale des choses. Qu’une compagnie,
     riche et américaine, veuille profiter des plus petits, cela aussi se voyait et
     se verrait encore. Mais de découvrir que des gens de pouvoir, des gens élus pour
     être à votre service, pour prendre soin de vous, soient de mèche avec
     l’usurpateur, le menteur, le voleur, cela rendait les victimes encore plus
     meurtries et les plaçait dans une situation complexe. Les membres du comité de
     défense avaient été décriés. Des gens médisaient sur leur compte. Ils disaient
     que des hommes comme Ti-Georges essayait juste de profiter de la situation pour
     faire un coup d’argent. Les journaux s’étaient emparés de l’affaire et en
     avaient fait une guerre de clans. Pour ou contre Taschereau. Henry ne comprenait
     pas que ses compatriotes puissent ne pas voir clair ! Que l’on ne s’unisse pas
     face à l’ennemi le sidérait ! Tout aurait été si simple si d’un seul bloc, on
     avait dit : « Cela suffit ! » Allons, tous ces discours ne servaient à rien
     maintenant. Julianna décida de ne pas déranger Marguerite et alla rejoindre les
     autres. Son frère lui lança un regard apeuré. Elle le rassura bien vite.
    — Marguerite va mieux.
    Julianna regarda le petit groupe. Ils affichaient tous une mine
     d’enterrement.
    Georges était défait, son mari avait les yeux hagards et Henry était cerné.
     Léonie fronçait les sourcils et paraissait si vieille.
    — C’est assez ! dit Julianna d’un air sévère. Allez tous dormir un peu. Ça va
     rien arranger si vous tombez malades aussi !
    Léonie sembla sortir de sa torpeur.
    — Ma Julianna a raison. On va aller se reposer. Avant, Ti-Georges, tu vas aller
     embrasser ta femme pis lui dire que bientôt, elle va avoir une maison à
     elle.
    Tous jetèrent un regard d’incompréhension à la femme.
    — Oui, reprit Léonie d’un ton décidé. Pour toé, ma fille, pis ton mari, y a pas
     de problème. Vous allez continuer de vivre à Montréal. Pour Ti-Georges, ben, y
     va se racheter une ferme à lui pis y va pouvoir régler ses dettes petit à
     petit.
    — De quoi vous parlez, matante Léonie ? demanda Ti-Georges.
    — T’as toujours été mon neveu préféré, commença Léonie. Y est rien que normal
     que j’te laisse un p’tit quelque chose en héritage.
    — En héritage ? répéta son neveu.
    François-Xavier sourit. Il était facile de deviner où voulait en venir
     Léonie.
    — Oui, c’est là que t’as besoin d’argent, pourquoi attendre ma mort pour te
     gâter ?
    — Vous voulez me prêter de l’argent ? balbutia Ti-Georges.
    — Pas prêter mais donner ! rectifia Léonie. Ta part d’héritage en avance.
    L’intéressé sembla comprendre enfin. Il se redressa et regarda sa tante, la
     bouche ouverte, deux gros points d’interrogation dans les yeux.
    — Vous... vous voulez dire quoi vous là ? Bateau, j’ai-tu ben compris, moé
     là ?
    — Oui, Ti-Georges, j’veux que tu partes à la recherche d’une belle terre,
     prometteuse, où tu voudras, pis que tu l’achètes.
    — Oh matante Léonie, j’en reviens pas ! Je sais pas quoi dire…
    — Juste merci mon beau frisé pis que j’vas pouvoir rester chez vous me reposer
     un peu.
    — Quoi ? fit Ti-Georges sans comprendre à nouveau.
    — Ben oui, répondit Léonie d’un air rieur. François-Xavier pis Julianna doivent
     retourner à Montréal, c’est moé qui vas rester pour aider Marguerite.
    Julianna enlaça

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