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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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mariages en même
temps dans l’église de la Bienheureuse-Vierge-Marie. Tandis que le prêtre
récitait l’office à toute allure, Grigori remarqua non sans agacement qu’il ne
regardait personne dans les yeux. Si l’une des mariées avait été une guenon, il
ne s’en serait même pas aperçu.
    Grigori s’en fichait. Chaque fois
qu’il voyait une église, il se souvenait du prêtre qui avait voulu tripoter Lev
quand il avait onze ans. Et les conférences sur l’athéisme que donnait le
groupe de discussion bolchevique présidé par Konstantin n’avaient fait qu’attiser
son mépris pour le christianisme.
    Le mariage de Grigori et Katerina
était précipité comme ceux des quatre autres couples. Tous les hommes étaient
en uniforme. La mobilisation ayant multiplié les cérémonies nuptiales, le
clergé avait du mal à suivre. Grigori détestait l’uniforme, symbole de
servitude à ses yeux.
    Il n’avait parlé de son mariage à
personne. Il ne jugeait pas utile de le fêter. Comme Katerina le lui avait fait
comprendre, c’était une décision purement pratique, une façon pour elle d’obtenir
une pension. Une excellente idée, s’était dit Grigori, un peu rassuré de savoir
qu’après son départ au front elle jouirait d’une certaine sécurité financière.
Néanmoins, il ne pouvait s’empêcher de considérer ce mariage comme une farce
cruelle.
    Katerina avait été moins
discrète, et toutes les filles de la pension étaient là, ainsi que plusieurs
ouvriers de l’usine Poutilov.
    Après la cérémonie, il y eut une
petite fête dans la chambre des filles, avec de la bière, de la vodka et un
violoniste qui interprétait des airs folkloriques bien connus. Dès que les
convives commencèrent à s’enivrer, Grigori s’éclipsa dans sa chambre. Il ôta
ses bottes et s’allongea, vêtu de sa chemise et de son pantalon d’uniforme. Il
souffla la bougie, mais les lumières de la rue brillaient encore. Les blessures
que lui avait infligées Pinski lui faisaient toujours mal : son bras
gauche le tiraillait quand il le bougeait et ses côtes l’élançaient chaque fois
qu’il se retournait dans son lit.
    Demain, il prendrait le train à destination
de l’Ouest. Les combats commenceraient d’un jour à l’autre. Il était terrifié :
il aurait fallu être fou pour réagir autrement. Mais il était intelligent et
résolu, et il ferait de son mieux pour rester en vie, comme il le faisait
depuis la mort de sa mère.
    Il était encore éveillé quand
Katerina le rejoignit. « Tu es parti de bonne heure, se plaignit-elle.
    — Je ne voulais pas me
soûler. »
    Elle retroussa sa jupe.
    Il n’en revenait pas. Les yeux
exorbités, il fixa les contours de son corps, soulignés par la lueur des
réverbères de la rue, le galbe de ses cuisses et sa toison dorée. Il était
aussi excité que déconcerté. « Qu’est-ce que tu fais ? demanda-t-il.
    — Je me couche, évidemment.
    — Pas ici. »
    Elle se débarrassa de ses
chaussures. « Qu’est-ce que tu racontes ? Nous sommes mariés.
    — C’est seulement pour que
tu puisses toucher une pension.
    — Tu mérites quand même une
récompense. » Elle s’allongea sur le lit et l’embrassa. Elle avait l’haleine
chargée de vodka.
    Il ne put réprimer le déSir qui
montait en lui, le faisant rougir de passion et de honte. Mais dans un souffle,
il réussit tout de même à dire : « Non. »
    Elle lui prit la main et la posa
sur son sein. Bien malgré lui, il le caressa, pressant doucement la chair moelleuse,
trouvant du bout des doigts le mamelon sous le tissu grossier de sa robe. « Tu
vois ? fit-elle. Tu en as envie. »
    Son accent triomphal l’irrita. « Évidemment,
j’en ai envie. Je t’aime depuis le premier jour où je t’ai vue. Mais toi, c’est
Lev que tu aimes.
    — Oh, pourquoi faut-il
toujours que tu penses à Lev ?
    — C’est une habitude que j’ai
prise quand il était petit et vulnérable.
    — Eh bien, c’est un homme
aujourd’hui, et il se fiche pas mal de toi et de moi. Il t’a pris ton
passeport, ton billet et ton fric, et il ne nous a rien laissé, sauf son bébé. »
    C’était vrai, Lev avait toujours
été égoïste. « On n’aime pas ses proches parce qu’ils sont bons et
aimables. On les aime parce qu’ils sont de notre famille.
    — Prends un peu de bon temps !
dit-elle, agacée. Demain, tu seras à l’armée. Tu ne veux quand même pas mourir
en regrettant de ne pas avoir baisé

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