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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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bâtiment de la Poste britannique, avait fait une sortie
en mer du Nord ; il avait remonté du fond les lourds câbles allemands de
télécommunications et les avait tous sectionnés. Par ce coup de maître, les
Anglais avaient obligé l’ennemi à utiliser la radio pour transmettre la plupart
de leurs messages. Or les signaux sans fil pouvaient être interceptés. Les
Allemands, qui n’étaient pas idiots, utilisaient donc des codes. Que le bureau
40 était chargé de décrypter.
    Fitz travaillait avec un groupe
de gens assez étranges, et fort peu militaires pour la plupart. Leur mission
consistait à déchiffrer le charabia que détectaient des stations d’écoute
installées le long de la côte. Fitz n’avait aucun talent pour les tâches de
décryptage proprement dites, qui exigeaient une grande intuition – il
n’était même pas fichu de découvrir l’assassin dans les romans de Sherlock
Holmes ; en revanche, il était capable de traduire en anglais les messages
allemands décryptés et, chose plus précieuse encore, de faire le tri, grâce à
son expérience du terrain, entre les renseignements importants et les autres.
    Cela ne changeait pas grand-chose
à la situation, il faut bien l’admettre. À la fin de l’année 1916, le front occidental
avait à peine bougé par rapport au début de l’année, malgré les efforts
considérables déployés par les deux camps : l’assaut implacable des
Allemands à Verdun et l’offensive des Anglais sur la Somme, encore plus
coûteuse en vies humaines. Les Alliés avaient absolument besoin d’un événement
qui leur remonte le moral. Si les États-Unis rejoignaient leur camp, ils
pouvaient espérer faire pencher la balance de leur côté – mais, pour le
moment, rien ne laissait présager une entrée en guerre de l’Amérique.
    Dans toutes les armées du monde,
les ordres sont donnés tard dans la nuit ou à l’aube. Fitz arrivait donc au
bureau de très bonne heure et travaillait avec acharnement jusqu’à midi. Le
mercredi qui suivit la partie de chasse, il quitta l’Amirauté à midi et demi et
rentra chez lui en taxi. La côte de Whitehall à Mayfair, pourtant courte,
exigeait de lui un trop gros effort.
    Les trois femmes qui partageaient
sa vie – Bea, Maud et tante Herm – étaient en train de prendre
place à table. Il tendit sa canne et sa casquette d’uniforme à Grout et
rejoignit ces dames à la salle à manger. Après le décor fonctionnel de son
bureau, il avait plaiSir à retrouver sa maison, le riche mobilier, les
serviteurs discrets, la porcelaine française et la nappe immaculée.
    Il demanda à Maud des nouvelles
du monde politique. Entre Asquith et Lloyd George , la bataille faisait
rage. La veille, dans un geste théâtral, Asquith avait démissionné de son poste
de Premier ministre. Fitz, qui était pourtant loin d’admirer ce libéral d’Asquith,
craignait que son successeur ne se laisse séduire par des discours de paix
simplistes.
    « Le roi a reçu Bonar
Law », lui apprit Maud. Dans la politique britannique, le privilège de
nommer le Premier ministre était l’ultime vestige de pouvoir encore entre les
mains du souverain – mais son choix devait ensuite être approuvé par le
Parlement. Andrew Bonar Law était le chef de file des conservateurs.
    « Et le résultat ?
demanda Fitz.
    — Bonar Law a refusé.
    — Décliner une requête du
roi ? Comment a-t-il osé ? s’indigna Fitz, pour qui l’obéissance au
souverain était un devoir absolu, surtout de la part d’un conservateur.
    — Il considère que ce poste
revient à Lloyd George . Mais le roi n’en veut pas.
    — Je l’espère bien,
intervint Bea. C’est un socialiste, ni plus ni moins !
    — Vous avez parfaitement
raison, renchérit Fitz. Mais il est plus pugnace que tous les autres réunis. Au
moins, il mettrait un peu de ressort dans l’effort de guerre.
    — Je crains en effet qu’il
ne laisse passer toute occasion de faire la paix, dit Maud.
    — La paix ? À ta place,
je ne m’en ferais pas trop pour ça. » Il essayait de ne pas s’énerver mais
les discours défaitistes sur la paix lui rappelaient toutes ces vies sacrifiées :
le pauvre jeune lieutenant Carlton-Smith, tous ces soldats des copains d’Aberowen,
et même ce misérable Owen Bevin, fusillé par le peloton d’exécution. Leur
sacrifice aurait-il été vain ? Cette idée lui paraissait blasphématoire.
Se forçant à garder un ton neutre, il ajouta :

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