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La complainte de l'ange noir

La complainte de l'ange noir

Titel: La complainte de l'ange noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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sa face replète suant l’arrogance et la méchanceté.
    — Je suis un homme très occupé, Sir Hugh. Posez-moi vos questions, mais avant que vous me menaciez, permettez-moi de vous rappeler que notre cour de justice a délivré un verdict de culpabilité à l’encontre de Gilbert et de sa mère. Et nous n’avions pas l’intention de la tuer.
    Corbett s’approcha de lui.
    — Bailli, vous êtes une brute et un assassin puant d’orgueil ! Vos actes ne visent qu’à dissimuler tous vos petits secrets !
    Robert Fitzosborne pâlit.
    — Que voulez-vous dire ? bafouilla-t-il.
    Corbett sourit à part lui : le bailli en avait oublié ses insultes. Il tremblait à l’idée d’être accusé de cacher quelque secret honteux. Ses yeux de fouine observaient anxieusement le magistrat.
    — Des secrets ? s’exclama-t-il. Quels secrets ?
    — Votre richesse subite.
    — Un héritage. Un legs.
    — De qui ?
    — Un parent éloigné.
    — Où habite ce parent éloigné ?
    Le bailli détourna le regard.
    — Messire Robert, l’avertit Corbett à mi-voix, je peux ordonner qu’on vous arrête et envoie à Londres pour être jugé à la Cour du Banc du roi {24} . Ce n’est pas ce que vous voulez, n’est-ce pas ? Votre épouse vient de donner naissance à un enfant et vous êtes, à juste titre, un homme important dans la région. Vous seriez retenu des mois dans la capitale.
    Le bailli, l’air morne, rongeait un de ses ongles sales.
    — Cet argent, je l’ai reçu honnêtement.
    — De qui ?
    Il soupira.
    — Je veux la vérité, Robert, insista Corbett.
    — Un colporteur est venu à Hunstanton. Il apportait un message d’Edward Orifab, orfèvre de Bishop’s Lynn : celui-ci détenait une certaine somme pour moi. J’y suis allé et il m’a donné cinq pièces d’argent et une d’or.
    Corbett plissa les paupières.
    — Et vous ne vous êtes pas enquis de l’identité du bienfaiteur ?
    Robert hocha la tête.
    — L’orfèvre a été intraitable. Il n’a rien voulu me dire.
    Corbett le dévisagea attentivement : « Tu mens, mon gaillard ! » songea-t-il.
    — Vous en êtes bien sûr, bailli ?
    — Aussi sûr que deux et deux font quatre, Sir Hugh.
    — Et votre fille, Blanche ?
    — Elle a rejoint les pastoureaux et elle est partie, répondit Fitzosborne avec un sourire.
    — Vous semblez vous en réjouir.
    — Elle me manque, mais j’ai sept bouches à nourrir et quel avenir avait-elle ? D’une part, elle était trop pauvre pour entrer au couvent Sainte-Croix et d’autre part, qui aurait-elle épousé ? Quelqu’un comme Gilbert ? Je ne roule pas sur l’or, Sir Hugh. Blanche sera heureuse.
    Corbett acquiesça et renvoya le bailli en le remerciant. Puis il resta un moment à fixer le mur.
    — Bishop’s Lynn ! Bishop’s Lynn ! se répétait-il.
    — Messire ?
    Il leva les yeux. Ranulf se tenait à ses côtés.
    — Assieds-toi, Ranulf. Te sens-tu mieux ?
    — Oui-da ! C’est fou comme l’air pur du Bon Dieu fait des merveilles.
    — Bien ! Écoute, pour l’instant nous naviguons à l’aveuglette. Monck parcourt la région en faisant Dieu sait quoi. Il serait temps de tailler de la besogne à notre tour ! Que Maltote et toi partiez au bourg demain : essayez de trouver un indice. Et parle avec Gilbert. Il aime se promener sur la lande : il a peut-être vu quelque chose.
    Ranulf fit la grimace. Mais, en fait, il se félicitait de mener l’enquête seul pour une fois, et non plus sous l’oeil de son Maître Longue Figure.
    — Pas d’autres instructions, Messire ? demanda-t-il sans broncher.
    — Non, sois discret et habile, comme à l’habitude !
    Aide-moi à éclaircir cette affaire ! Je t’assure que le Diable rôde sur la lande de Hunstanton !
    — Et vous, vous allez à Bishop’s Lynn, Messire ?
    Corbett secoua la tête.
    — Pas encore ! Je pars pour Walsingham. Puisque Monck ne me dit pas la vérité, je la demanderai au roi en personne. Soit il me la dévoile, soit nous nous éclipsons et laissons Monck trouver le fin mot de l’histoire.
    Corbett se leva.
    — Et toi, tu ne te rappelles toujours pas où tu as déjà rencontré Maître Joseph ?
    Ranulf fit signe que non.
    — Bon. Transmets mes instructions à Maltote.
    Corbett retourna à sa chambre. Il prépara ses fontes et revêtit bottes, cape et baudrier. Il regarda par la fenêtre : c’était une belle journée d’automne, encore un peu voilée par la brume. Il se

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