La confession impériale
récifs. Le pontife était d’une nature moins
malléable qu’il ne le supposait. Un incident allait embraser le ciel d’Italie.
Pour s’assurer des bons sentiments du roi
lombard à son égard, Adrien lui délégua une ambassade, munie d’intentions
pacifiques. Ayant appris en cours de route que l’armée lombarde était en marche
pour la reconquête de l’exarchat de Ravenne, elle ne put mener à bien sa
mission. Didier n’avait pas pardonné au pape son refus de donner l’onction
sacrée aux deux fils de Carloman, Pépin et Siagrus, mes neveux.
Adrien avait auprès de lui un évêque, Afiarta,
dont la fidélité lui paraissait sujette à caution. Ce misérable s’était vanté
auprès de Didier de pouvoir lui livrer le pape la corde au cou, et de le
remplacer par un personnage plus complaisant. Informé de cette intrigue, Adrien
le fit arrêter et somma le roi lombard de stopper le mouvement de ses armées.
Il n’obtint pas la moindre réponse.
J’appris le conflit
qui agitait l’Italie alors que je revenais de ma première incursion punitive
chez les Saxons, qui avaient omis de livrer le tribut rituel de chevaux qu’ils me
devaient. L’affaire ne me prit qu’un mois et n’eut pas de suites graves. J’en
étais revenu avec cinq cents têtes choisies par mes soins.
Une fois de plus, Didier avait poussé un peu
trop loin sa provocation et commis une double erreur : faire litière de l’âpre
volonté du pontife de défendre ses territoires et mépriser l’éventualité d’une
réaction de ma part. Ses armées avaient sur leur élan envahi l’exarchat de
Ravenne, la Pentapole, glané quelques cités et marchaient sur Rome.
Je venais de passer
les fêtes de Noël dans la ville d’Héristal, sur la Meuse, en compagnie
d’Hildegarde et de notre petit Charles. Je comptais y rester jusqu’à Pâques,
lorsqu’une délégation en provenance de Rome vint m’avertir de la situation
dramatique de la papauté. Le Saint-Père demandait mon intervention ; je ne
pouvais la lui refuser.
Prudemment, j’envoyai au préalable une
ambassade à Didier pour lui demander de faire rétrograder ses troupes et lui
proposer un entretien. Mes émissaires furent accueillis avec mépris et
molestés. Apporter mon aide à Adrien devenant une obligation, j’y cédai.
Mener quatre à cinq
mille hommes à travers les Alpes encore enneigées ne fut pas une partie de
plaisir ; j’y laissai beaucoup d’hommes, dont certains avaient déserté,
plusieurs chariots et nombre de chevaux. Notre progression était ralentie par
les véhicules de l’intendance et les chevaux de remonte, si bien qu’il nous
fallut deux longues semaines avant d’entrevoir, au débouché d’un col, les
lumineuses campagnes du Piémont.
J’avais fait deux parts de cette armée :
l’une sous mon commandement, l’autre sous celui de mon oncle Bernard, frère du
roi Pépin. Nous laissâmes nos hommes et nos montures se reposer au bord du
fleuve Pô avant de marcher sur Pavie. Nous tombâmes sur la ville comme la foudre.
Un noble turinois
m’avait rapporté que Didier manifestait des réserves ironiques quant à mes
qualités militaires et stratégiques. Certes, je n’étais pas un grand chef
d’armée, ou du moins n’en avais-je pas fait la démonstration à ce jour.
J’allais lui administrer la preuve qu’il se méprenait.
Enlever par assauts une ville aussi bien
défendue que Pavie ? Cette illusion ne m’effleura pas l’esprit. En
chevauchant autour des palissades, formant un arc de cercle appuyé par ses
extrémités sur la berge du fleuve Ticino, je rongeais mon frein. Il aurait
fallu sacrifier des centaines de soldats pour un résultat incertain, et je
n’étais pas pourvu du matériel de siège nécessaire.
Quelques sorties des cavaliers lombards,
assistés d’une milice urbaine ardente et bien armée, finirent de balayer mes
illusions : le peuple nous haïssait ; un long siège serait nécessaire
pour obtenir une soumission.
Je chargeai Bernard d’organiser le blocus de
la cité, par la terre et par le fleuve, ce qui nous contraignit à faire
construire des barques chargées de patrouiller.
Cependant que se
déroulaient ces opérations, je poussai jusqu’à Vérone avec un fort détachement
de cavalerie. Située sous les premiers contreforts des Alpes, cette cité était,
après Pavie, la ville la plus importante de la Lombardie. J’avais appris, par
des intelligences intra-muros, que le fils de Didier,
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