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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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Roland avait demandé à son
compagnon la main de sa sœur Aude ; elle ne lui avait pas été refusée. Des
noces, célébrées à Noyon, je garde le souvenir d’un tourbillon de musiques, de
chants et de lumière.
    Je me dois, pour clore cette partie de mon
récit, de dissiper une légende selon laquelle Roland serait né d’amours
incestueuses entre moi et ma sœur Gisèle. Comment aurais-je pu porter une main
perverse sur cet ange ?
    Retour d’une mission
en Gascogne, un de mes officiers m’a rapporté un chant de guerre du peuple
basque : L’Altobiscar, du nom de la montagne abritant les tribus
guerrières qui, à Roncevaux, avaient assailli et anéanti mes arrières. Il est
trop long pour que je le cite en entier. Je me contenterai du dernier
couplet :
    Il n’y en a plus
un, c’est bien fini / Libre Basque, tu peux rentrer avec ton chien / Embrasser
ta femme et tes enfants / Nettoyer tes armes et ranger ta corne de bœuf / La
nuit, les aigles vont dévorer ces chairs écrasées / Et tous ces ossements
blanchiront pour l’éternité…

3
Batailles dans la forêt

1
    Lourde d’angoisse, Hildegarde m’attendait à
Quierzy, où les nouvelles de la désastreuse expédition d’Espagne m’avaient
précédé. J’arrivai au palais alors qu’elle revenait de la chasse au faucon avec
autour de la taille une ceinture d’oiseaux morts. Elle se jeta dans mes bras
avec des larmes et me dit :
    — Mon pauvre ami, comme vous avez dû
avoir peine et souffrance ! Votre armée amputée de son arrière-garde et de
son convoi par des sauvages, quelle humiliation ! Vous allez avoir besoin
de repos. J’y veillerai.
    Par ses propres courriers, j’avais appris de
pénibles nouvelles : un appel au secours du pape Adrien, des troubles à
l’Est et, ce qui était plus sensible à Hildegarde, la famine sévissant en
Francie.
    — Nous n’avons pas eu la moindre goutte
de pluie depuis votre départ, me dit-elle. La terre est si sèche que plus rien
n’y pousse. J’ai pris la liberté en votre absence d’ouvrir les réserves de nos
greniers, mais elles ne sont pas inépuisables.
    Je la complimentai d’avoir adopté cette
initiative, que moi-même j’aurais prise. Durant des semaines, j’allais visiter
mes domaines pour effectuer des distributions de céréales et en faire venir
d’Aquitaine et d’Auvergne, où la situation était moins dramatique.
    Après avoir licencié mon armée et demandé à
mes vassaux de se tenir prêts à reprendre les armes à la première convocation,
je pris une semaine de repos que j’occupai à me baigner dans l’Oise et à
chasser le petit gibier dans la forêt de Coucy-Basse, pour la subsistance de ma
maison plus que pour le plaisir.
    J’avais fini par
prendre goût à la lecture des auteurs de l’Antiquité grecque et romaine.
    Je lus avec intérêt, au retour des marches
d’Espagne, la Vie des douze Césars de Suétone, les Vies parallèles de Plutarque, et me délectai des Bucoliques de Virgile ou de L’Art
d’aimer d’Ovide. Des images de dieux et de déesses livrés à leurs amours
dans les solitudes agrestes de l’Hellade me poursuivaient dans mon sommeil. En
revanche, je me lassais vite des ouvrages religieux. J’acquis cependant
quelques rudiments d’astronomie et d’astrologie dans de vieux grimoires rongés
par les vers que je tenais de la reine Bertrade, fort versée dans ces matières.
    Une missive du pape déclencha ma colère.
    Ses ambitions démesurées et ses exigences
perpétuelles finirent par m’exaspérer. À l’en croire, tout l’Occident s’était
ligué contre lui pour lui faire barrage. Il avait en permanence dans sa manche
des menaces d’excommunication.
    Dans une de ses lettres, il fulminait contre
ses opposants : « Quelle déchéance et quel déshonneur, m’écrivait-il,
quand de notre vivant nous voyons de misérables impies, tes adversaires et les
nôtres, nous arracher des biens dont nous disposions en maîtres du temps des
Lombards ! »
    Il prêtait à ses ennemis, plus ou moins
imaginaires, de noirs desseins et les accablait de propos amers : « À
quoi a servi la ruine du royaume lombard et sa soumission aux rois
francs ? Non seulement aucune des promesses n’a été tenue, mais les
territoires concédés par le roi Pépin, de sainte mémoire, nous sont
enlevés. »
    Qu’attendait encore de moi ce perpétuel
insatisfait ? Que je me mette de nouveau à la tête d’une armée pour imposer
ses ambitions ? Que je

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