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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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morts et pillages, avait donné permission aux Brioudais…
    – Brivadois, monseigneur, rectifia une voix qui pouvait être celle de Boucicaut.
    – Certes !… Il leur avait donné permission de composer avec ce malandrin en lui fournissant leurs richesses. Ce qu’ils n’ont point voulu faire, les sots !… L’on m’a dit qu’il y avait des morts… Et ce n’est pas tout… Au sud, toujours, Gautier, dit l ’Estoc, le magister navium (333) d’une bande où figurent Perrin Boias et quelques autres avait exigé des moines de Saint-Chaffre une rançon contre leur liberté. Il ne semble pas qu’ils l’aient acquittée. Comment voulez-vous que nous soyons quiets si même les gens d’Église ne respectent pas leur parole !
    – Monseigneur, dit Tristan, traiter avec un routier, c’est traiter avec un suppôt du diable… Quand on ne peut user de fermeté, la reculade s’impose, du moins pour les gens d’Église.
    – C’est vrai… Et puis nous sommes loin pour juger des choses avec équité… C’est d’ailleurs à l’entour de Paris que ces routiers abominables agissent impunément… L’effroi, désormais, hante nos for-bourgs. Vous savez, tout comme moi, que ces gens n’hésitent pas à se vêtir en presbytériens pour franchir les portes de notre bonne cité… Certains même se sont momés en évêques ! Hé oui !… Désormais nous prendrons de sévères mesures. Chaque évêque nouvellement nommé devra, après son sacre, franchir l’enceinte par la Porte Bordel 102 afin d’être reconnu par le guet, mais avant… Allons, messires, cette rumeur et ces ébaudissements étouffés ne sont point de bon goût…
    Le prince ne riait ni ne souriait. Cette porte Bordel ne lui inspirait rien.
    – … mais avant, dis-je, notre nouveau prélat devra subir une épreuve probatoire… Passer une nuit au-dehors de Paris, devant cette porte où ses vassaux le viendront quérir pour l’amener en grand bobant 103 à Notre-Dame et procéder à son installation… Nous verrons ainsi si, nuitamment, notre nouveau mitré ne reçoit point de visites suspectes !
    Tristan se demanda s’il ne rêvait point. Au cas où les routiers eussent voulu pénétrer dans Paris, ils l’eussent fait par la violence. Il vit Richard de Brumare avancer d’un nouveau pas :
    – On dit à Rouen, monseigneur, que ces démons dévorent les enfants.
    – Qu’en saurais-je ? demanda, souriant enfin, le dauphin de France. Ils ne m’ont jamais convié à leur table !
    On rit, cependant que, de palier en palier, Tristan redoutait que la menace évoquée gaiement ne prit une terrible ampleur. Il sentait l’irréductible complicité de routiers – où qu’ils fussent –, se régénérer en audace et en malfaisance. Par chevaucheurs, ils communiquaient entre eux plus vélocement et plus sûrement que les messagers du roi et de son fils.
    –  S’ils venaient par malheur au mitan de Paris, eh bien, messires, je lâcherais mes lions et mes tigres !
    Un homme rejoignit Richard de Brumare. Il était un peu plus haut que le maître du Clos des Galées, plus large d’épaules : une espèce de gladiateur qui se fût trompé de lieux et de siècle. C’était Guillaume Séguier, le Garde des Lions 104  :
    Nous pourrions, dit-il sans sourire, priver, monseigneur, vos bêtes de nourriture afin qu’elles aient plus d’appétit le moment venu !
    Il fut déçu sinon dépité : nul ne se sentait plus enclin à la gaieté. On se concerta sans que le prince eût dit un mot. Les Anglo-Navarrais s’étaient approprié la plupart des forteresses du Bessin d’où ils rançonnaient les pays autour de Bayeux. Ils venaient de prendre le château de Beaumont-le-Richard ainsi que ceux du Quesnay et de Molay (334) . Que faire ? Si l’on ne tentait rien, leur audace s’amplifierait.
    Ils sont comme la grattelle (335) dit enfin le dauphin. Plus notre bonne gent les veut arracher des lieux où ils sévissent, plus ils s’y incrustent et désespèrent la contrée. S’en vont-ils par on ne sait quel miracle ? C’est pour étendre ailleurs toutes leurs horribletés… Voilà deux ans que Guesclin les combat en employant leurs us et coutumes de guerre… Efforcez-vous d’en faire autant !
    De sa main valide, le prince parut se débarbouiller. Il regarda les chandelles sur le luminaire au-dessus de lui. L’une d’elles, dont la bobèche devait être pleine, avait fait tomber sur son nez une goutte de suif.
    – La peste soit de

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