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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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uns aux autres, peu de temps après avoir embarqué.
    Nous avions écouté son discours, un peu dubitatifs. La rhétorique subtile dont il nous avait rebattu les oreilles sur les raisons profondes de sa présence parmi nous, nous inclinait à pencher pour d’autres hypothèses. À voir l’embonpoint plus que prononcé que mettait en relief la ceinture qui sanglait l’étamine sous sa robe de bure. D’autres raisons, plus proches de la pénitence pour péché gourmand que de l’apostolat, n’auraient-elles pas conduit son supérieur à l’expédier en Terre sainte ?
    Cette longue expédition au pays des croisés et la nouvelle expérience d’une navigation en haute mer (aucun de nous trois n’avait encore mesuré l’immensité de la mer ni, a fortiori, navigué sur une nef) auraient plu à bien des écuyers.
     
     

     
     
    Au cours de l’été, après la prise de la bastide royale du Mont-de-Domme par les Anglais, une trêve acceptée d’un commun accord entre les parties en présence, Français et Anglais, avait été signée pour permettre à chaque camp de consolider ses positions, de panser ses blessures. Et laisser aux paysans le temps d’ensemencer et de récolter tout ce qui ne tarderait pas à être à nouveau pillé ou incendié au cours de ces folles chevauchées qui ravageaient notre belle contrée.
    Mes recherches sur Isabeau de Guirande étaient demeurées sans effet. Après mon expédition malheureuse au Mont-de-Domme, qui avait bien failli me coûter la vie, j’avais profité de rares moments de détente pour me glisser aussi dans la librairie du château de Beynac à la recherche de quelque autre codex sur la science des blasons. En vain. S’il en existait un, il avait disparu. N’aurait été cette terrible opiniâtreté qui enflammait mon corps et mon âme, j’eusse renoncé depuis longtemps.
    J’avais profité de ces inestimables instants de répit pour poursuivre mes recherches avec plus de méthode, entre deux corvées et autres servitudes. Moins de fougue, mais en principe plus d’efficacité : recherche de codex, visite de monastères, de prieurés, utilisation de procédés détournés pour tenter de prendre en défaut quelque scribe ou quelque moine convers.
    Un beau jour, déguisé en chanoine, j’avais même réussi à me faire ouvrir les portes de la librairie de l’évêché de Sarlat. Un autre jour, profitant d’une occasion militaire, je m’étais aventuré près des abbayes de Chancelade et d’Obazine, plus au nord. Sans aucun résultat : confrontés à ma force de persuasion que je croyais désarmante, les portiers m’avaient finalement confondu et presque botté le cul.
    J’avais le cœur triste et l’humeur maussade : ma quête s’éloignait. Mon espoir de retrouver m’amie, ma promise, Isabeau de Guirande. Et le meurtrier qui suivait ma trace, aussi. Lorsque j’avais interrogé le Baron de Beynac sur la tournure des relations qu’il entretenait avec son cousin par alliance, le sire de Castelnaud, il m’avait sèchement répondu qu’elles ne me concernaient point, avant de tourner les talons.
     
    Mes relations amicales avec Arnaud s’étaient sensiblement durcies avec le temps. Lorsque je lui avais annoncé la disparition probablement tragique de Blanche, il m’avait affirmé, d’un air fendant, que j’avais fait grande erreur sur cette personne : sa gente damoiselle n’était point fille de savetier, mais fille de consul. Il avait ensuite éludé mes questions. Arnaud ne comprenait pas cette passion insensée qui m’animait, et il avait même renoncé, depuis peu, à me convaincre qu’il existait de par les terres connues et inconnues des centaines de drôlettes plus belles les unes que les autres qui n’attendaient que notre venue pour se laisser déflorer.
    Non seulement je n’aimais pas les termes vulgaires qu’il employait pour parler d’amour, mais de plus je ne comprenais pas pourquoi j’aurais dû renoncer à Isabeau, à qui je vouais un amour sans limites, pour tenter sur d’autres terres quelque conquête sans beauté et sans saveur à mes yeux.
    Une seule damoiselle me comblerait. Isabeau de Guirande. Ce serait elle ou personne d’autre. Je l’avais décrété ainsi. Par ordonnance prise en conseil du roi. Au conseil de mes voix personnelles. Car en l’affaire, j’étais le roi. Un roi de cœur. Un roi sans terre ni couronne, mais un roi tout de même.
    De ce fait, entre Arnaud et moi, un véritable dialogue de

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