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La Fille Du Templier

La Fille Du Templier

Titel: La Fille Du Templier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Thibaux
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dépassaient de loin les leurs. Derrière eux, la
cohue des amis proches de la famille et des conseillers en robes ou en armures
poussait, désireuse d’en finir au plus vite. Mais l’évêque égrotant à la
carcasse usée ne se pressait pas. Il avait reçu des ordres de Raymond Bérenger
en personne et il s’y tenait, accentuant volontairement ses faiblesses
physiques. Le nouveau maître de la Provence voulait humilier ceux des Baux et
leurs alliés. La cérémonie devait se prolonger.
    À son tour, le comte de Barcelone entra, tel un futur marié
suivant sa promise. Il avait revêtu ses plus beaux atours. La soie de son
bliaud brodé était passée entre les mains de son maître couturier juif, un
artiste qui savait mettre sa carrure en valeur. Les pierreries brillaient à son
ceinturon d’apparat où pendait un magnifique poignard byzantin au manche
incrusté de rubis. L’arrogant personnage avait la main posée sur le quillon de
sa célèbre épée, Méduse. On disait que cette arme était magique, pourtant il ne
l’utilisait jamais sur les champs de bataille.
    Voilà l’épée qu’il me faudrait, pensa Aubeline.
    Une retentissante sonnerie de trompettes et des roulements
de tambours ébranlèrent les fondations de l’église. Les hourras des soldats
catalans résonnèrent sous les voûtes. Quand il plongea sa main dans le bénitier
et que son chapelain clama : « Prosternez-vous ! Le Christ est
avec lui ! », il y eut un froissement de métal. La moitié des gens
des Baux tirèrent épées et couteaux de leurs fourreaux, aussitôt imités par
leurs ennemis. Les regards se tournèrent vers le fils aîné de Stéphanie.
    Hugon n’eut aucune réaction. Il mit simplement un genou à
terre et se signa. Quand ils le virent si humble et serein, ce fut la
désillusion. Des orgueils furent rabaissés et des vengeances ravalées. Les
armes retournèrent à leur place. Stéphanie, qui avait craint le pire, s’avança
vers Raymond Bérenger et lui donna l’accolade.
    — Bérenger, nous vivons dans un temps maudit. L’Antéchrist
dont la venue est proche les éprouve déjà. Ce ne sont pas des parjures et des
profanateurs, ils respecteront la trêve en ces lieux. Mais ne joue pas avec
leur impatience. Finissons-en, qu’il soit fait lecture du traité de paix que
tes juristes ont préparé.
    — Je te crois, Stéphanie, mais en est-il de même pour
tes fils ? Respecteront-ils le choix de leur mère ?
    — Je suis d’abord leur comtesse, la représentante de la
maison des Baux en ce monde. Ils se plieront à ma volonté.
    Bérenger jeta un œil sur les trois plus jeunes avant d’examiner
longuement Hugon. Il ne fut pas dupe de l’attitude humble du bouillant garçon. Le
fils aîné de Stéphanie se mesurait à Jésus et lui demandait des comptes ; il
n’avait pas l’air de remarquer la présence du Catalan. Il y avait de la dureté
sur ses traits. On aurait pu croire qu’il pleurait, mais ce n’était que de la
sueur qui coulait le long de ses joues creuses, se mêlait à sa barbe noire et à
la crasse de son cou.
    Sur le côté, presque invisible, Bertrane contemplait la
scène. Elle avait passé une robe de bure, rassemblé ses cheveux en une longue
tresse et portait le bâton des pèlerins. Elle avait fait le vœu de retourner à
pied à Signes en passant par Saint-Rémy, Saint-Zacharie, Saint-Maximin et la
grotte de sainte Marie Madeleine après la signature du traité. Aubeline qui
avait du mal à la reconnaître la rejoignit ; elle remarqua l’extrême
pâleur de la dame.
    — Puis-je te venir en aide ? Souffres-tu ?
    — Oui, mais ce n’est pas d’un mal des marais, ni d’une
fièvre quelconque. Sois vigilante. J’ai besoin de ton épée.
    — Elle t’est acquise.
    Bertrane souffrait d’un mal profond. Hugon la terrifiait. Il
émanait une aura noire de toute sa personne et elle paraissait la seule à s’en
apercevoir.
    — Je prierai pour toi, mon cousin, murmura-t-elle.
    — Tes prières seules ne suffiront pas à délier les
serments qu’il passe avec les démons, fit Aubeline qui avait l’ouïe fine.
    — Que vois-tu ?
    — Je vois l’ombre s’étendre autour de lui. Il nous
entraînera tous en enfer si nous ne réagissons pas… Il ne doit pas vivre.
    — Tais-toi, malheureuse. Il existe d’autres moyens que
le fer et le poison pour mettre un terme à la haine qui le ronge.
    Aubeline garda le silence. Elle imaginait mal Hugon se
soumettant aux pratiques

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