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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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gantée de noir traversa le vasistas comme pour se refermer sur lui. Ernie poussa un cri et recula si subitement qu'il tomba à la renverse sur le bord de la baignoire. Titubant, il chercha à se rattraper au rideau de plastique de la douche et l'entraîna dans sa chute. Une douleur fulgurante lui déchira la hanche droite.
    Ernie ! s'écria Faye en ouvrant la porte. Ernie, mon Dieu, qu'est-ce qui t'est arrivé ?
    - N'approche pas, dit-il péniblement... Il y a quelqu'un dehors. ª
    L'air frais entrait en force par le vasistas et faisait bruisser le rideau à moitié déchiré. Faye frissonna, elle ne portait qu'un pyjama léger.
    Ernie frissonna aussi, mais pour une tout autre raison. Le rêve avait cessé avec la douleur dans la hanche il était soudain revenu à la réalité. Et il se demanda si la silhouette casquée n'était pas le produit de son imagination.
    Śur le toit ? demanda Faye. Derrière la fenêtre ?
    qui était-ce ?
    -Je n'en sais rien. ª Ernie se frotta la hanche et jeta un coup d'oeil par le vasistas entrouvert. Il ne vit personne.
    Á quoi ressemblait-il ?
    - Je ne sais pas au juste. Il était habillé en motard, avec un casque et des gants. ª Ernie se rendit compte de ce que ses paroles pouvaient avoir d'absurde.
    Il prit appui sur le rebord de la fenêtre afin de bien voir au-dehors. Il n'y avait personne sur le toit de l'appentis ni autour de la maison. Le visiteur s'était enfui-s'il avait jamais existé.
    Et soudain, Ernie prit conscience de l'obscurité qui entourait le motel, des ténèbres dans lesquelles était plongé le paysage tout entier. Il émit un cri et l‚cha le rebord de la fenêtre pour se réfugier au bout de la baignoire.
    ´ Ferme ça, vite ª, dit Faye.
    Les yeux clos pour ne plus entrevoir la nuit profonde, il trouva à t‚tons le loquet et le poussa après avoir ramené le panneau.
    quand il sortit de la baignoire, il découvrit de l'inquiétude dans les yeux de Faye. De l'inquiétude et de l'étonnement. Cela n'avait rien que de très normal.
    Mais il y lut aussi la conscience de quelque chose d'autre.
    Ils restèrent longtemps sans se parler. Puis Faye rompit le silence: Ést-ce que tu es prêt à tout me raconter ?
    -Je viens de te le dire... j'ai cru voir un type sur le toit.
    - Ce n'est pas de cela que je parle, Ernie, tu le sais bien. Est-ce que tu te sens assez fort pour me dire tout ce qui ne va pas, ce qui te tracasse depuis plusieurs mois ? ª
    Lui qui pensait avoir si bien dissimulé son état...
    ´ …coute, reprit-elle, tu es préoccupé. Et surtout, tu as peur.
    -Je suis préoccupé, oui, mais je n'ai pas peur...

    - Si, tu as peur ª, dit Faye. Il n'y avait absolument rien de méprisant dans sa voix. ´ Je ne t'ai vu qu'une seule fois dans cet état, Ernie. quand Lucy avait cinq ans et qu'on craignait qu'elle ait la polio.
    -C'est vrai, je crevais de trouille alors.
    - Et depuis, rien ?
    - Si, j'ai quelquefois eu peur quand on était chez les Viets.
    - Tu n'en as rien laissé paraître. Ecoute, Ernie, je ne te vois pas souvent dans cet état, alors quand tu as peur, j'ai peur moi aussi. Plus peur que toi, même, parce que je ne sais pas ce qui te tracasse, tu comprends ? Rester comme ça dans l'ignorance, c'est pire que tout... ª
    Les larmes lui vinrent aux yeux et Ernie dit: Ńe pleure pas, je t'en prie, tout va s'arranger. D'ailleurs, je me sens déjà mieux.
    - Raconte-moi tout, tout !
    -Comme tu voudras.
    - Maintenant! ª
    Il l'avait scandaleusement sous-estimée, et il s'en voulait. C'était une femme de militaire après tout, et une bonne dans le genre. Elle l'avait suivi de quantico à Singapour, puis de Pendleton jusqu'en Alaska même, presque partout, sauf au Viêt-nam, jusqu'à Bey-routh. Elle avait recréé pour lui un foyer partout o˘
    l'armée autorisait la famille à suivre, avait supporté
    les moments difficiles avec un aplomb admirable, ne s'était jamais plainte, ne lui avait jamais fait défaut.
    Elle était solide. Il ne comprenait pas comment il avait pu l'oublier.
    ´ D'accord, je vais tout te raconter ª, dit-il, soulagé
    de pouvoir enfin partager son fardeau.
    Faye fit du café. Ils étaient tous deux en pantoufles et robe de chambre, assis dans la cuisine. Elle pouvait voir qu'il était embarrassé. Il était très lent à donner des détails, mais elle buvait lentement son café, patiemment, pour lui donner toutes les chances d'épancher son coeur.
    Ernie était le meilleur des époux qu'une femme p˚t souhaiter, mais il

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