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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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chemise d’un obus d’artillerie.
En août 1916, les Russes, qui, en cette occasion, surprirent et déjouèrent
les défenses chimiques allemandes, inaugurèrent l’utilisation militaire de la
chloropicrine. Ils ne purent cependant la produire qu’en quantité extrêmement
limitée.
    En revanche, les autres protagonistes ne rencontrèrent pas
ces difficultés. Les Britanniques s’étaient intéressés à la chloropicrine dès
le mois de juin 1915. À la fin de l’année, le général Richard Butler,
qui commandait l’artillerie de la I re  armée, se montrait
enthousiaste à l’égard de ce nouveau toxique et le major Foulkes planifiait de
l’utiliser lors d’émissions de nappes dérivantes [558] . Après quelques
déboires initiaux, le Ministry of Munitions décida en avril 1916 de
construire à Cleckheaton une usine capable de produire 40 t de
chloropicrine par jour. Deux mois plus tard, une autre usine, située à Burslem,
commença également à produire de la chloropicrine. Cet agent reçut le nom de
code PS. La chloropicrine fut, après le chlore, le principal agent chimique
utilisé par les forces britanniques pendant le conflit. Plus de 8 000 t
de PS furent produites pendant le conflit par les usines anglaises. Rapidement
jugé inutilisable en cylindre mélangé avec du chlore, il fut essentiellement
conditionné sous forme d’obus et parvint sur le front dans les derniers mois de
1916 [559] .
Les Allemands, surpris par l’innovation russe, ne tardèrent pas à réagir. Dès
la fin de l’été 1916, les usines Bayer produisaient la chloropicrine (nom
de code Klop) [560] ,
destinée à être utilisée par l’artillerie allemande.
    Nous l’avons signalé, les chimistes français avaient testé,
dès 1915 [561] ,
des toxiques dont l’acide cyanhydrique, qui avait retenu leur attention en
raison de sa toxicité et de sa volatilité. Les chercheurs furent contraints,
pour compenser la volatilité de la molécule, d’ajouter des composés plus lourds
dans la charge chimique de l’obus (dont du tétrachlorure de titane). Ce
faisant, il diminuait la quantité d’acide cyanhydrique présente dans le
projectile, ce qui avait pour conséquence de doubler le nombre de munitions
nécessaires pour obtenir la concentration désirée, réduisant ainsi
substantiellement l’efficacité potentielle de l’obus. La décision d’autoriser
son emploi opérationnel, qui faisait l’objet de curieuses réticences de la part
des autorités politiques et militaires françaises, ne fut prise qu’à la fin du
mois de juin 1916 alors que des stocks conséquents étaient constitués
depuis avril [562] .
Après des essais concluants en mai 1916 [563] , le GQG autorisa
son utilisation le 7 juin 1916 [564] . Près de 30 000 munitions
(obus n° 4) contenant de l’acide cyanhydrique (ou Vincennite) ainsi
que du trichlorure d’arsenic furent tirées par l’artillerie française entre le
27 juin et le 6 juillet 1916 sous la forme de munitions de 75 et
155 mm. Malgré l’enthousiasme initial des militaires français et la
toxicité de l’acide cyanhydrique, cette tentative fut un échec. En effet, la
munition se révéla inappropriée. En raison de sa faible charge (0,5 kg d’acide
cyanhydrique), de la « combustibilité » de l’acide cyanhydrique mais
surtout de son extrême volatilité, il était impossible d’établir, même au moyen
de bombardements intensifs, des concentrations mortelles. Aucun autre
belligérant n’adopta ce toxique [565] et les essais
menés par les chimistes allemands, austro-hongrois et britanniques ne furent
pas plus concluants [566] .
Les quêtes françaises et britanniques dans la mise au point de toxiques de
guerre furent pour le moins confuses et désordonnées. En dépit de la qualité
des scientifiques attelés à cette tâche ardue, les Alliés ne mirent en place
aucune coordination véritable et on déplora, de part et d’autre de la Manche,
des travaux non seulement redondants mais souvent vains. De fait, une
coordination eût été d’autant plus fructueuse dans la mesure où des équipes
françaises ou britanniques auraient ainsi évité de perdre un temps précieux à
explorer des solutions écartées depuis déjà longtemps par le voisin.
Malheureusement cette coordination fut en tout point insuffisante et pour tout
dire anémique. À ce titre, l’exemple des travaux alliés sur l’acide
cyanhydrique, précédemment évoqués, est particulièrement

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