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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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à la balistique ainsi qu’à la sécurité du
processus de fabrication des munitions.
    En mars 1916, l’usine Bayer de Leverkusen reçut les
premières commandes de diphosgène. Peu après, Hoechst devint également
fournisseur de l’armée allemande. Jusqu’à la fin de la guerre, ces deux
sociétés produisirent 11 500 t de diphosgène qui fut, après l’ ypérite, le principal toxique utilisé par l’artillerie allemande au cours du conflit.
Cette munition était disponible en 77, 105 et 150 mm pour canons et
obusiers. Dans un premier temps, les tentatives allemandes furent réduites et
peu nombreuses. Ces munitions furent utilisées pour la première fois près de
Douaumont le 9 mars 1916, puis dans la nuit du 4 au 5 avril. Le 7 mai,
à Tavannes, 13 800 obus K2-stoff furent tirés par l’artillerie
allemande, et 13 000 le 19 à Chattancourt. Ce n’est qu’au cours de l’été
que cette proportion augmenta substantiellement. Dans la nuit du 22 au 23 juin,
lors de l’assaut allemand sur Thiaumont et Souville, 116 000 munitions K2-stoff furent utilisées en un peu moins de six heures et l’état-major
allemand se montra pleinement satisfait de ce nouvel obus [485] . De fait, les
protections respiratoires des artilleurs français se révélèrent insuffisantes
et l’artillerie fut incapable de répliquer pour stopper l’avancée allemande.
Après ce succès, il fut donc décidé d’apporter quelques modifications
techniques à cette munition pour l’adapter à l’ensemble de l’artillerie
allemande ainsi que des améliorations de sa structure interne, permettant d’augmenter
la quantité de gaz contenue dans la chemise de l’obus. Toutefois, cela ne put
être réalisé que vers le mois d’août 1917. Au cours de l’été 1916, il
n’était pas rare de voir 100 000 de ces obus tirés en une seule journée.
En mai 1916, les Allemands adoptèrent un système de qualification au moyen
de croix de couleur peinte sur le corps de l’obus qui indiquait le contenu de
la munition. Une croix verte signifiait un contenu volatil et
hautement toxique, une croix jaune un agent non volatil et donc
persistant. L’obus K2-stoff était marqué d’une croix verte.
    D’un point de vue opérationnel, les Allemands, comme le
prouvent certains documents [486] , avaient dès le
printemps 1916 une vision tactique très avancée de l’utilisation militaire
des nouveaux obus. Au début du mois de mars 1916, le plan d’une offensive
élaboré par Max Bauer et Fritz Haber prévoyait l’utilisation de 120 000 obus croix verte et 50 000 obus conventionnels lors d’une attaque
sur la ligne Avoncourt – Cote 304 – Pont-des-Enfants. L’emploi
massif de munitions chimiques présageait les tirs de saturation qui apparurent
à partir de 1917 et qui étaient destinés à annihiler l’artillerie et les
mitrailleurs ennemis avant que l’infanterie ne donne l’assaut. Ce plan ne put
être mis en œuvre en raison de l’insuffisance, à cette date, des stocks d’obus croix verte .
En 1916, malgré cette remarquable clairvoyance tactique de la part de certains
stratèges allemands (dont Max Bauer à la section technique de l’OHL), l’artillerie
allemande éprouvait de sérieuses difficultés à égaler son homologue française
dans le domaine chimique. Tout d’abord, l’artillerie allemande ne disposait, à
cette époque, que d’un type d’obus chimique, à savoir l’obus croix verte contenant du diphosgène. Cette absence de choix réduisait considérablement la
flexibilité et la spécificité qui constituent les qualités déterminantes d’une
artillerie. Ensuite, l’obus chimique était une complète nouveauté et il
convenait de vaincre les pesanteurs et convaincre un corps relativement
conservateur, les artilleurs, de la valeur militaire des munitions chimiques.
Cela prit du temps et ne fut fait que grâce aux trésors de persuasion déployés
par les responsables du programme chimique allemand. On peut même ajouter que
ce processus ne fut pas véritablement achevé avant la fin des hostilités.
    Dans la plupart des pays engagés dans le conflit, le corps
des artilleurs entretenait en effet une solide tradition d’indépendance
technique qui reposait sur des compétences assurées dans le domaine de la
physique et des mathématiques. La chimie, si l’on excepte l’élaboration des
substances explosives, était souvent perçue comme une discipline sans rapport
avec

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