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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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même d’un mélange très subtil de délicatesse et de sauvagerie. Sidéré par tant de grâce et de plus en plus émoustillé, l’Anglais avait assisté à l’opéra de bout en bout.
    À l’issue du spectacle qui s’était achevé par un triomphe, la salle debout, applaudissant à tout rompre et lançant des pétards, Niggles était allé trouver le rabatteur.
    —  Pourrais-je aller saluer l’acteur principal   ?
    L’homme avait tordu le nez.
    —  Lequel   ? Il y a trois acteurs principaux dans la Chronique des Trois Royaumes…
    Niggles, qui ne s’en était même pas rendu compte, avait précisé :
    —  Celui dont l’épaule porte le corbeau qui tient le soleil…
    —  Il s’appelle Garçon des Nuages et, si tu veux m’en croire, il ira loin…
    Jack avait trouvé que c’était là un très beau nom, à la fois poétique et coquin, convenant de surcroît à merveille à celui qui le portait.
    —  Il a fait une excellente prestation   !
    —  Les gens viennent de Pékin jusqu’ici pour le voir   ! Dans quelques années, la renommée de Garçon des Nuages brillera comme une étoile au milieu du ciel.
    —  Je voudrais le rencontrer pour le féliciter.
    —  Il a l’air de te plaire… T’aurais pas le béguin   ?
    Le rabatteur le regardait avec un sourire en coin et ses propos avaient choqué Niggles qui lui avait répliqué sur un ton pincé :
    —  Je ne répondrai pas à ce genre de question. Et d’abord à qui ai-je l’honneur   ?
    Niggles s’était senti détaillé des pieds à la tête par son interlocuteur. Après quoi, son verdict était tombé :
    —  Je suis le directeur de cet opéra ambulant. Et vous, vous avez l’air d’un homme riche   !
    L’homme n’y allait pas par quatre chemins. L’allusion était évidente. Une rencontre avec l’acteur était monnayable.
    —  Puis-le voir ce Garçon des Nuages   ?
    —  Attends un peu. Je vais le prévenir. Il est timide… Quelques espèces le décoinceront.
    Le directeur n’avait pas tardé à revenir, hilare, avant d’annoncer à Jack :
    —  C’est bon   ! Passe par-derrière   ! Il est en train de se changer et t’attend dans ta carriole.
    —  Merci.
    L’homme l’avait saisi par le bras.
    —  Tu me dois trois liang d’argent   !
    Il s’était exécuté, rajoutant même deux liang , tellement il était content de pouvoir rencontrer le bel acteur. Cinq liang d’argent, c’était une belle somme, avec laquelle une famille de six personnes pouvait tenir un bon mois. Et pourtant ce n’était pas grand-chose, au regard du spectacle auquel Niggles avait eu droit, lorsqu’il avait déboulé dans la charrette qui servait de loge aux artistes.
    Entièrement nu, Garçon des Nuages s’y frottait avec une éponge imbibée d’huile. Ses muscles gonflés par l’effort luisaient comme du cuivre astiqué. De près, il était encore plus beau et ressemblait à une statue d’éphèbe grec.
    Niggles, bouleversé, s’était senti fondre comme un nuage de lait dans une tasse de thé brûlant.
    —  Bonjour, Garçon des Nuages… avait-il murmuré, intimidé comme un débutant.
    Garçon avait paru à la fois étonné et amusé de voir ainsi surgir ce nez long rouquin aux doigts chargés de bagues qui le dévisageait de la tête aux pieds sans cacher son éblouissement.
    —  Que me veux-tu, ô « nez long aux cheveux rouges   »   ?
    Nez long aux cheveux rouges, c’était plutôt flatteur et poétique. Encourageant pour la suite… s’était dit Niggles, de plus en plus émoustillé. C’était le cœur battant, tétanisé à l’idée d’essuyer un refus de la part d’un être si extraordinaire qu’il lui semblait inaccessible, qu’il avait bredouillé à l’intéressé :
    —  T’inviter à dîner. J’imagine que tu dois avoir faim après un tel effort…
    —  Pourquoi pas, si tu paies   !
    Le dénommé Garçon n’avait pas froid aux yeux… ni l’air de s’embarrasser de manières. Heureux comme un gamin, l’Anglais était sûr qu’il arriverait à ses fins. En Chine, avec un peu d’argent, tout finissait par s’arranger… Dans les pays riches, c’était différent. Que de fois, en Angleterre, il avait été éconduit par des bellâtres qui ne le trouvaient pas assez à leur goût, compte tenu du peu d’argent qu’il avait en poche…
    Ici, avec la même somme, les gens étaient bien plus ouverts et on en avait deux fois plus…
    —  Bien sûr que je paie tout, et même le

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