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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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cuisine la silhouette de son ancienne amante, légèrement enveloppée mais toujours aussi appétissante, vêtue d’une robe froncée vert pomme qu’il avait eu l’occasion de défaire maintes fois avant la naissance de Laura, il éprouva un pincement au ventre et écarta les pieds pour ne pas vaciller. C’était toujours ainsi, lorsqu’il revoyait Barbara : le choc se transformait en onde qui remontait à la tête et le faisait légèrement tituber tandis que son instinct de possession décuplait, avec la rage d’avoir raté l’occasion de se marier avec elle. Dans ces moments détestables, il l’aurait volontiers enlevée sur-le-champ pour l’emmener le plus loin possible et l’avoir enfin à lui seul…
    Leurs regards se croisèrent furtivement, lourds de sous-entendus et de non-dits. Il savait qu’elle détestait le voir en présence de Brandon.
    Il eut néanmoins le temps de remarquer qu’elle avait l’air aussi défaite que son mari, au point qu’il finit presque par s’en vouloir d’être venu chez eux sans les prévenir.
    Mais ce n’était pas le moment de faiblir. Il était venu accomplir une tâche précise, pour le bien de Barbara et pour le sien… une tâche qu’il était hors de question d’abandonner en route. Il fallait simplement amener le sujet sur le tapis et convaincre Brandon du bien-fondé de son idée.
    —  Monsieur Clearstone, je suis venu vous…
    À peine avait-il prononcé les premiers mots de la phrase qu’il s’apprêtait à asséner à l’intéressé, quant à son comportement inadmissible de locataire mauvais payeur, que Barbara lui coupa la parole :
    —  Nous sommes inquiets, monsieur Stocklett. Cela fait deux heures que notre petit Joe aurait dû revenir de l’épicerie où je l’avais envoyé chercher un paquet de sucre. Il n’a que onze ans et il s’exprime avec difficulté…
    —  Le jour de son anniversaire… ça tombe plutôt mal   ! ajouta Brandon, qui se frottait le menton, comme lorsqu’il cherchait à se donner une contenance.
    —  C’est la première fois qu’il nous fait ce coup. D’habitude, il revient sitôt la commission faite   ! gémit la mère du petit garçon trisomique.
    —  Tu n’aurais pas dû lui demander d’y aller… maugréa le père.
    —  Joe ne peut tout de même pas rester toute la journée dans ce petit appartement   ! C’est un enfant comme les autres. Tous les enfants aiment sortir de chez eux   ! fit-elle en regardant Nash comme si elle attendait qu’il acquiesçât à son propos.
    Cette façon qu’avait Barbara de parler de Joe comme si Nash ignorait son handicap était des plus agaçantes. Et Barbara, à cet égard, jouait la comédie à merveille. Mais la règle qu’ils avaient explicitement instaurée voulait qu’en présence de Brandon, il était hors de question de laisser apparaître fût-ce un soupçon de la réalité de leurs rapports.
    —  Le pire n’est jamais sûr… madame Clearstone… Joe finira bien par revenir   ! se crut-il obligé de souffler avec une moue de contrariété.
    Il enrageait, détestant la vouvoyer, et plus encore l’appeler pompeusement « madame Clearstone   ».
    Les conventions sociales peuvent réduire à néant la vérité des êtres.
    —  Mais n’est-ce pas l’heure du dîner, ma chère   ? Monsieur Stocklett, vous êtes notre invité   ! s’écria l’époux de Barbara qui s’efforçait de faire bonne figure.
    —  Nous pouvons passer à table… Tout est prêt… lâcha sa femme avant d’ajouter une chaise et un couvert à la table ovale de la salle à manger.
    Cette pièce, qui servait également de salon, était basse de plafond et plutôt mal égayée par une tenture d’une vague couleur prune, à laquelle des rideaux de satin vert pomme conféraient une solennité un peu ridicule, typique de ces intérieurs petit-bourgeois de l’époque victorienne qui se comptaient à Londres par milliers.
    Suivie par Laura, toujours prompte à aider sa mère, Barbara se rendit à la cuisine d’où elle revint avec un plat d’étain sur lequel reposaient les fameux beignets de morue nichés dans leur lit de salade frisée.
    —  Je les ai faits pour Joe… souffla Barbara en écrasant une larme.
    Nash Stocklett avala sa salive et, malgré ces circonstances peu propices, se fit violence pour entrer dans le vif du sujet d’une voix ferme.
    —  Monsieur Clearstone, comment vont les affaires   ?
    L’atmosphère était pesante et Nash pouvait entendre

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