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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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suis, d’accord ? Je vais nous sortir de là. Toi, tu nous ferais tuer. Maintenant, tu te tais.
    Elle prit sa respiration pour parler des hiwis que son groupe de partisans avait capturés et exécutés, des pancartes qu’ils avaient clouées sur la tête des traîtres pour dissuader les autres de collaborer avec l’envahisseur. Mais, au moment où elle commençait à remuer les lèvres, Fedya la secoua durement. Elle se tut, enfonça les poings dans ses poches et jeta un regard noir au félon.
    — Merci, dit Fedya en tendant la main au cuisinier. Tu nous as sauvé la vie. Qu’est-ce que tu as raconté aux Allemands ?
    — Que vous êtes deux paysans russes travaillant pour moi. Je vous ai envoyés nettoyer les chiottes et vous êtes tombés dedans.
    Fedya se tourna vers Tania.
    — Pas mal, son histoire, non ? Il réfléchit vite.
    — Putain d’hiwi, fit-elle entre ses dents.
    Fedya revint au cuisinier.
    — Ne t’occupe pas d’elle. Tu peux nous trouver des vêtements ?
    — Non. Qui vous êtes ? Comment vous êtes arrivés ici ?
    — Nous sommes de la 284 e division. Notre bateau a coulé. Une fois à terre, elle nous a fait traverser les égouts.
    — Et tu l’as suivie ? dit le cuisinier, menaçant la jeune femme de sa cuillère.
    Tania fit un pas vers lui, Fedya la retint mais prévint l’homme d’un ton calme :
    — À ta place, je ne ferais pas ça.
    Le cuisinier laissa retomber sa cuillère.
    — Tu peux nous donner encore à manger ?
    — Bien sûr. (Il se dirigea vers la cuisine, s’arrêta sur le seuil.) Je vous apporte ça dehors.
    Fedya se tourna vivement vers Tania.
    — Mais qu’est-ce qui te prend ? Comment peux-tu traiter ainsi quelqu’un qui vient de te sauver la vie ?
    — Il aide les Allemands !
    — Ce n’est qu’un petit cuistot de rien du tout. Qu’est-ce que tu sais de lui ? Ils retiennent peut-être sa femme et ses enfants en otages. Ce n’est peut-être qu’un pauvre type mort de trouille qui se retrouve pris là-dedans malgré lui et ne demande qu’à s’en sortir vivant !
    Tania s’assit sur le couvercle d’une poubelle métallique.
    — Si c’est un lâche, il faut le fusiller.
    Fedya croisa les bras. Elle fixa un moment ses yeux bleus en songeant : Moi aussi, je veux m’en sortir. Moi aussi je veux vivre. Mais je suis déjà morte. Les Allemands ont pris ma vie ; ils ont pris mon pays et mes grands-parents. Il ne me reste qu’un corps sans âme, et j ‘ai juré de me battre contre eux jusqu’à ce que ce corps s’effondre, brisé. Moi, Fedya, Youri, ce cuisinier, la Russie : nous sommes tous morts. Il n’y a que la lutte qui puisse nous faire revivre.
    Fedya décroisa les bras, les tendit vers elle.
    — Nous ne sommes pas tous aussi courageux que toi.
    Il la tint contre lui ; elle laissa sa tête s’appuyer un instant sur sa large poitrine puis s’écarta.
    — Tu pues.
    Le cuisinier revint avec deux assiettes fumantes de choucroute agrémentée d’un épais hachis brun, les posa sur une poubelle.
    — On se bat surtout par-là, déclara-t-il en indiquant un horizon dévasté. Le front est à trois kilomètres d’ici. De l’autre côté, c’est la Volga. N’y allez pas, il y a des patrouilles.
    Il regarda Fedya, hocha la tête et l’écrivain lui répondit de même. Les yeux du petit homme obliquèrent vers Tania, sans être sûrs de la réaction qu’ils trouveraient.
    Sa poitrine flasque tremblotait sous le tablier. Au bord des larmes, il écarta les bras.
    — Vous pouvez pas comprendre, geignit-il.
    — Personne ne peut, dit Fedya à la place de la jeune femme.
    Le cuisinier s’essuya le nez d’un revers de manche et retourna à ses fourneaux. Fedya et Tania nettoyèrent leurs assiettes, passèrent de l’autre côté du mur de la cour et partirent à la recherche des lignes russes. Il y avait peu de mouvement dans les rues. Des soldats allemands patrouillaient ; dans les trous béants des murs, on avait installé des mitrailleuses protégées par des sacs de sable. De petites troupes de sans-abri en haillons erraient tels des somnambules parmi les ruines calcinées, étrangement calmes. Ils fouillaient les décombres pour y dénicher des vêtements, des ustensiles qui les aideraient à survivre à l’holocauste de leur ville. Les Allemands laissaient ces fantômes mortels tranquilles. Tania et Fedya espéraient qu’ils n’attireraient pas davantage l’attention.
    Elle lui conseilla, s’ils tombaient sur une patrouille soupçonneuse, de

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