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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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feindre l’arriération mentale, de grommeler, la bave aux lèvres. Elle, elle expliquerait par gestes aux soldats que l’asile avait été détruit et que le grand gaillard qu’ils voyaient-là n’était qu’un de ses inoffensifs pensionnaires. Elle l’avait trouvé dans la rue et le conduisait aux Russes pour qu’il soit évacué vers l’arrière. Ils étaient couverts de merde parce qu’ils étaient tombés dans un conduit éventré, ou dans une fosse. Si Fedya jouait convenablement le taré, les Boches marcheraient. En tout cas, il faudrait se contenter de ce plan jusqu’à ce qu’elle en concocte un meilleur.
    — Mais ne t’en fais pas, ils ne nous arrêteront pas, assura-t-elle. Nous n’avons pas d’arme, nous ne nous cachons pas. Et nous sommes couverts de merde, n’oublie pas.
    — C’est vrai, je n’y pensais plus. Je crois que je vais rester comme ça jusqu’à la fin de la guerre. C’est encore mieux que porter une armure, non ?
    Dans l’après-midi, ils croisèrent une patrouille dont les soldats couraient en faisant claquer leurs lourdes bottes. Tania poussa un juron furieux en dialecte biélorusse tandis que Fedya gloussait comme un demeuré. Un des Allemands les regarda, plissa le nez. La patrouille pénétra dans un bâtiment par un trou d’obus, disparut dans un escalier.
    Devant eux, de l’autre côté d’un boulevard désolé, s’étendait un dépôt de chemin de fer où des rails tordus dessinaient des arabesques entre les wagons couchés sur le flanc. À droite des voies, ils avisèrent un bâtiment de cinq étages long d’une centaine de mètres. Au-dessus des fenêtres brisées, des traces de suie indiquaient qu’il avait brûlé de l’intérieur. Des chars allemands noircis semblaient avoir été arrêtés dans leur élan. Tania estima que huit cents mètres environ la séparaient du point le plus proche du bâtiment.
    Elle regarda l’immeuble dans lequel la patrouille allemande s’était engouffrée. Des canons de fusil hérissaient plusieurs fenêtres, donnant toutes sur les voies ferrées.
    C’est le front, pensa-t-elle. Le no man’s land.
    D’un coup d’œil, elle vérifia la position du soleil. Ce serait trop dangereux d’essayer de traverser en plein jour. Ils risqueraient de se retrouver entre deux feux, d’être pris pour des déserteurs ou des espions par chacun des deux camps. De l’autre côté du boulevard, Tania remarqua un abri de cheminot, tira Fedya par la manche.
    — Nous allons attendre la nuit dans cette cabane et nous traverserons les voies quand il fera noir. (Elle pointa l’index vers le bâtiment de cinq étages.) L’Armée rouge est là-bas.
    Il regarda dans la direction indiquée.
    — Comment tu le sais ?
    Elle se mit à marcher vers l’abri, agita le pouce pardessus son épaule, entendit les claquements des trépieds de mortier qu’on mettait en place.
    — Les Boches le savent, eux.
    Derrière la porte en bois de la cabane, des étagères vides ne supportaient plus que des éclats de verre et de la poussière. Des vis, des tire-fond graisseux jonchaient le sol. Les fenêtres étaient brisées, mais le toit demeurait intact.
    On avait poussé contre un mur un sommier métallique et un matelas, couvert lui aussi de débris de verre et de poussière. Tania le retourna, révélant une toile bleue rayée de gris avec des taches rousses. L’air sentait l’huile et le renfermé. Elle battit le matelas du plat de la main, souleva un nuage de poussière qui la fit reculer.
    — Des rideaux, quelques pots de fleurs aux fenêtres, suggéra-t-elle à Fedya resté sur le seuil. Un potager pour avoir des légumes frais.
    — Tout à fait confortable, approuva-t-il en allant s’asseoir sur le lit. Une chaumière de poète près de la voie ferrée. Les trains m’ont toujours inspiré…
    Tania vint se planter devant lui.
    — Enlève ces sous-vêtements. Ils empestent et ils me font penser à ce pauvre Youri.
    Elle tira sur le maillot durci par une croûte d’excréments. Fedya leva les bras pour lui faciliter la tâche et elle jeta le vêtement par la fenêtre.
    — Les bottes, tu peux le faire toi-même.
    Fedya se baissa pour les ôter cependant que Tania enlevait sa tunique et la lançait dans un coin. Dessous, elle portait une blouse en lin grossier couleur paille. Des taches de sueur assombrissaient les aisselles et le col. Elle entreprit de la déboutonner.
    Fedya releva la tête et elle sentit son regard se porter sur la pointe

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