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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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sombre, houleuse, déchaînée par endroits. Comme il ne pouvait représenter le Déluge sans son arche, il situa le bateau de Noé sur la ligne d’horizon, pas plus grand qu’un confetti.
    Après l’épreuve, il rentra dans sa chambrette et écrivit à Stefanie une lettre de vingt et une pages qu’il détruisit aussitôt après l’avoir relue. Il dormit moins paisiblement que la veille, rêvant par à-coups qu’il s’étouffait, puis qu’il se noyait, et enfin qu’il tombait dans le vide… oubliant tout à l’instant du réveil.
    Le lendemain, il joua des coudes pour s’approcher des placards affichant les résultats. Ne trouvant pas son nom, il crut à une erreur et sollicita une entrevue avec le recteur, qui le reçut sans délai.
    – Il s’agit d’une erreur, monsieur le recteur, au pire un simple oubli.
    Le recteur réajusta ses lorgnons pour consulter les fiches du jury.
    – Ce n’est pas une erreur, jeune homme, je lis ici : « Travaux insuffisants, trop peu de portraits. » Pourquoi ne pas vous donner une année supplémentaire et à nouveau tenter votre chance ?
    Adolf quitta le palais Hansen aussi désemparé qu’un somnambule réveillé en équilibre sur une gouttière.
    ***
    Hannitante fit entrer le jeune Kubizek et le conduisit jusqu’à la chambre de Frau Klara.
    August fut choqué par le teint grisâtre, la peau flétrie et les bras anormalement amaigris de la mère de son ami ; de plus, des cernes mauves sous les yeux lui donnaient un air de tragédienne trop maquillée.
    – Herr Kubizek ! Quelle bonne surprise ! Vous avez des nouvelles d’Adolf, n’est-ce pas ?
    – Hélas non, madame. Je venais justement vous en demander. Depuis la carte du mois dernier où il m’annonçait qu’il était inscrit, je n’ai plus rien reçu.
    Il lui tendit la carte. Klara chaussa ses lunettes pour la lire.
    – Il m’a pratiquement écrit la même chose, et depuis, plus rien. S’il était en mauvaise santé il m’aurait prévenue.
    – Il sait que vous êtes à nouveau malade ?
    – Non, bien sûr, à quoi bon le contrarier… De toute façon, je vais me rétablir.
    Hannitante lui proposa une tisane de verveine qu’il accepta, tandis que Klara relisait le post-scriptum de la carte postale.
    – Je n’imaginais pas que Linz puisse autant lui manquer.
    August baissa la tête et regarda ses vieilles chaussures comme font les menteurs pris en flagrant délit. Linz était le nom de code choisi par Adolf pour désigner Stefanie.
    Klara lui rendit la carte.
    – Je ne sais même pas s’il a été reçu… Oh mais de toute façon, qu’il le soit ou pas, comment voulez-vous que la peinture le fasse vivre correctement ? Et quand je ne serai plus là, qui va s’occuper de la petite ? Vous au moins, vous avez votre métier de tapissier, mais lui, à part ses rêves ?
    Désignant le portrait d’Aloïs suspendu au-dessus de son râtelier à pipes, Klara ajouta d’une voix à peine audible :
    – Et comme disait son père, quand on rêve c’est qu’on dort.
    ***
    Adolf ne sortait pratiquement plus de sa chambrette. Il n’avait goût à rien, sauf peut-être à se gratter des piqûres de punaises : il ne lisait plus, il ne dessinait plus, il ne
sifflait plus du Wagner, ce qui lui laissait tout loisir de ruminer son échec en boucle, se cherchant des excuses, parfois s’en trouvant.
    Par un matin froid mais ensoleillé de novembre, une lettre postée de Linz arriva au courrier. Il reconnut l’écriture d’Angela.
    Personne n’ose t’écrire, mais moi si. Notre mère va très mal et il faut que tu reviennes vite. D’ailleurs le docteur Bloch dit qu’il y a des décisions à prendre.
    ***
    L’atelier Kubizek und Söhne bourdonnait d’activité lorsque Adolf apparut sur le seuil de la porte. Herr Kubizek lança un regard désapprobateur vers son fils qui abandonnait ses outils pour accueillir son ami.
    – Pourquoi tu n’as rien dit ? Je serais venu te chercher à la gare !
    Adolf lui tendit une main anormalement molle.
    – Le docteur Bloch vient de me dire que ma mère est incurable ! Selon lui, son opération a eu lieu trop tard.
    Herr Kubizek, qui avait entendu, prit un air de circonstance.
    – Je suis désolé pour toi, mon garçon. Si ma femme et moi nous pouvons être utiles, n’hésite pas.
    Adolf le remercia, les yeux embués, le cou raide.
    – Tu es arrivé quand ? demanda August en dénouant le cordon de son tablier pour le suspendre au

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